Ange et Boule de Neige

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Le nez enfouit sous ma couette, je livre un rude combat avec le sommeil ; ce fourbe n'est pas décidé à m'attraper dans ses filets. Il est vrai que la journée n'a pas été des plus sereines et calmes. Mes pauvres nerfs ont œuvré comme des dingues pour me maintenir à flot. Ce n'est pas tant l'homosexualité de Chris, dévoilée au grand jour, ni l'idée que j'ai été mise sur le fait accompli, qui me chagrine. C'est plutôt ma conversation étrange avec Ange, et les sentiments qui s'y sont greffés. Je l'ai toujours considéré, au plus profond de mon âme, comme mon pire ennemi.

Voilà que mon cœur me pousse la chansonnette !

— Et merde ! grogné-je en me redressant subitement.

Je me prends la tête entre les mains, exténuée de batailler avec mes ressentis. Il n'est pas question une seule seconde que je me laisse envahir par mes émotions. Ange va se marier, ce n'est pas vraiment le moment de tomber amoureuse de lui.

— Mais qu'est-ce que tu racontes ? m'esclaffé-je, abasourdie par ce constat ridicule.

Moi ? Tomber amoureuse d'Ange ? Impossible !

D'un geste agacé, je repousse ma couette et saute du lit. Je m'enveloppe dans mon peignoir pour rallier la cuisine, bien décidée à chasser ces pensées grotesques avec une bonne tasse de chocolat chaud. Le calme qui règne dans la maison me fait un bien fou. Silencieusement, je dévale les escaliers et foule le parquet du rez-de-chaussée. Je m'attarde un instant sur le sapin, disposé judicieusement dans le hall. Béatrix a toujours eu énormément de goût, c'est presque inné chez elle. Tout est harmonieusement coordonné et placé, de sorte à en faire un réel chef-d'œuvre. Une décoration en particulier attire mon regard, une boule transparente contenant un ange doré. Je la secoue délicatement. Des petits copeaux blancs s'éparpillent à l'intérieur, comme de la neige.

— Ange et Boule de Neige ! murmuré-je, en pouffant doucement. Ridicule !

Je secoue la tête. Ce n'est pas parce la période est propice à la magie, que je vais croire à ce genre de signe. De toute façon, il n'y a aucune chance pour que ça arrive. Je dois garder en tête qu'Ange a trouvé chaussure à son pied.

Cette journée a été fatigante, j'aurai l'esprit plus clair demain matin !

Forte de cette bonne résolution, je prends la direction de la cuisine. Une assiette de petits sablés traîne sur le plan de travail. Béatrix s'en est donné à cœur joie pour les agrémenter de nappage coloré et de diverses petites décorations.

Le ScrapCooking n'a plus aucun secret pour elle !

La tentation est trop forte pour la gourmande que je suis. J'en vole un au passage, et le grignote en préparant mon chocolat chaud.

— J'en prendrais bien une tasse aussi !

Je sursaute, appréhendée en plein délit de fringale à plus de minuit. Ange me sourit et s'installe sur un des tabourets de bar en bois. Je me contente de lui faire un signe de tête, la bouche encore pleine de ce délicieux sablé. Mes gestes sont un peu gauches. Sentir son regard sur moi ne m'aide pas vraiment à me concentrer.

Moins de cinq minutes plus tard, je m'assois sur le tabouret voisin et lui tends sa tasse. Nous le dégustons sans piper mot, seul le tic-tac de l'horloge nous parvient de manière régulière.

— Je peux te demander un service ? s'enquiert-il soudainement.

Je tourne ma tête. Ange, le regard rivé sur sa tasse, s'amuse à la faire glisser entre ses mains.

— Cela dépend du service !

Il rit doucement et lève les yeux vers moi. Je me laisse encore surprendre par l'intensité de ses prunelles vertes. Mes battements cardiaques s'affolent.

— Il n'y a rien de compromettant, rassure-toi !

Je ris à mon tour.

—Je voudrais que tu viennes choisir les alliances avec moi !