58 ~ Abandon

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Les heures s'écoulent et je ne sais toujours pas comment me dépêtrer de cette situation délicate. J'ai beau tourner et plier ma main dans tous les sens, impossible de la faire passer par la menotte pour m'en libérer. J'ai même tenté de cracher sur ma main pour la lubrifier afin qu'elle puisse se libérer plus facilement mais rien n'y fait, Livaï a trop serré cette foutue menotte. J'ai bien essayé de briser ces menottes avec une de mes lames mais le résultat s'est montré peu concluant, de même que lorsque, de rage, j'ai voulu couper le tuyau auquel le gnome m'a attachée.

J'ai appelé à l'aide mais personne ne m'a entendue. Il faut dire que cette salle de réunion est enfoncée profondément dans les entrailles de cet immense bateau, il n'y a personne aux alentours pour entendre mes suppliques, et personne ne pensera à venir me chercher ici.

D'ailleurs, je pense même que personne ne partira à ma recherche car, connaissant Livaï, il a sans doute dû raconter des bobards aux autres afin qu'ils ne s'inquiètent pas de mon absence prolongée. Je l'imagine très clairement leur sortir son regard le plus blasé en leur disant « Elle a préféré ne pas prendre part au combat », « Elle est encore trop faible », « Elle ne maitrise toujours pas son pouvoir », « Elle s'est enfuie comme une lâche, comme elle l'a toujours fait. Elle nous a abandonnés, une fois de plus ».

Ces paroles ne sont qu'hypothétiques, et pourtant elles me blessent. Livaï serait-il capable d'employer des termes aussi crus et aussi blessants ? Après tout, ce n'est que la pure vérité. Je suis faible, je ne maitrise plus mon pouvoir et, de ce fait, je suis un réel danger pour les autres. Même si, par je ne sais quel miracle, je parvenais à me transformer sur le champ de bataille, rien ne m'assure que je le contrôlerai. Je risque de blesser les autres et de les gêner plus que de les aider.

Néanmoins, je suis déçue que personne ne soit parti à ma recherche. Jean me connait par cœur, il aurait dû savoir que Livaï a menti. Il sait pertinemment que je ne manquerais ce combat pour rien au monde. Il sait que je préfèrerais crever plutôt que de rester planquée dans mon coin pendant que mes amis risquent leur vie. Alors pourquoi ne vient-il pas ? Pourquoi n'est-il pas parti à ma recherche ? Pourquoi m'a-t-il abandonnée, tout comme Livaï ?

Je pousse un long soupir résigné tout en ramenant mes genoux contre ma poitrine. J'enroule mes bras autour de mes jambes et lance un regard empli de désespoir par le minuscule hublot. Je constate alors que la côte est toute proche, signe que nous avons probablement accosté. A l'heure qu'il est, les ingénieurs du clan Azumabito doivent sans doute préparer l'hydravion à partir au combat. J'aurais au moins pu me montrer utile en pilotant cet avion mais, même pour ça, ils n'ont pas besoin de moi puisqu'Onyankopon peut s'en charger. Si seulement il n'avait pas été là, ils n'auraient eu d'autre choix que moi pour piloter l'appareil. Une fois de plus, je suis remplaçable.

A travers le hublot, je remarque qu'une épaisse fumée s'élève dans les airs, signe que le grand terrassement se rapproche de plus en plus. Le temps nous est compté, il va falloir qu'on se tire rapidement d'ici si on ne veut pas finir en barbecue. Et si tous les autres partaient se mettre à l'abris en m'oubliant dans ce maudit bateau ? Après tout, ils ont l'esprit très occupé à cause du grand terrassement, et il ne serait pas étonnant que la plupart ait carrément oublié mon existence. Et puis, même s'ils se souviennent de moi, je pense que certains d'entre eux, comme Mikasa par exemple, seraient totalement indifférents à l'idée que je meure seule sur ce bateau. Je ne peux pas vraiment lui en vouloir puisque ce sentiment est partagé.

Mes minces espoirs de prendre part à ce combat volent en éclat lorsque, par le hublot du bateau, j'aperçois l'hydravion s'élever dans les airs. Ça y est, tout est fini pour moi. Quoi que je fasse, je suis contrainte de rester ici, impuissante. Je ne pourrai pas participer à ce combat, je ne pourrai pas tuer Eren ni même Sieg de mes propres mains. Quelques larmes coulent sur mes joues suite à cet abandon de la part de mes camarades, mais elles se muent rapidement en larmes de rage.

A l'extérieur des murs [Livaï x OC] [Reiner x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant