Relations Complexes

Esther

TW: Auto-mutilation, violences sexuelles, transphobie

Audrey

*

Je passai un léger coup d'œil par la fenêtre pour observer mes lapins dans leur parc quand je distinguai la silhouette d'une jeune fille. Je crus la reconnaître, pensant que c'était mon amie Nao. Mais quand celle-ci s'approcha de moi et passa par-dessus le rebord de la fenêtre je remarquai que son visage n'était pas le sien. Elle avait le regard assombri par du maquillage, de fines lèvres, un petit nez, les traits marqués.

- Coucou toi ! s'écria-t-elle.

- Salut, répondis-je.

Cette inconnue me semblait familière ce qui était paradoxal alors je rentrai dans son jeu.

- Comment ça va ? m'interrogea-t-elle.

- Je me sens décontenancée et toi ? demandais-je en retour.

- Ça va merci.

- D'où viens-tu ?

- D'un endroit invisible pour les autres.

- De quel signe es-tu ?

- Je ne sais pas vraiment...

- Quel âge as-tu ?

- Tu crois qu'un âge peut rester figé à un moment précis de ta vie à cause d'un évènement traumatisant ?

J'ignora sa dernière question ne comprenant pas où elle voulait en venir.

- Tu t'appelles Esther pas vrai ? questionnais-je avec l'impression curieuse d'en être certaine.

- Oui mais ne parlons plus, soyons discrète, affirma-t-elle en souriant malicieusement.

Je me disais que cette fille était ma conscience matérialisée voire un alter qui était en co-conscience. Je me voyais déjà parler de cette rencontre à ma psychologue.

Soudainement elle m'enlaça. Elle m'embrassa dans le cou puis descendit au niveau de la poitrine.

Mais qui est cette fille ? Pourquoi m'enivre-t-elle dans son parfum de douces caresses et baisers ? Est-ce une amie imaginaire ? C'est si réel... ça ne peut pas être une invention de mon subconscient et pourtant comment je connais son prénom ?

- Tu te poses beaucoup de questions à ce que je vois... Tu ne veux pas juste profiter ? C'est la première fois que je peux te toucher après tout.

Elle me porta et me déposa sur le lit puis commença à me déshabiller. Elle s'apprêta à s'affranchir de mon intimité quand ma mère frappa à la porte de ma chambre.

- Ne rentre pas ! ordonnais-je gênée.

Ce bruit m'avait extirpé de la montée d'excitation qui s'emparait de moi mais il avait aussi fait disparaître Esther comme si elle avait craint qu'on ne la découvre avec moi.

Peut-être que cette fille était une hallucination que mon cerveau a produite dans le but d'apaiser mes angoisses. Je suis très tourmentée en ce moment après tout... Serait-ce paranormal ?

Je n'en avais aucune idée mais elle me tracassait. Chaque nuit je ne pouvais plus dormir, créant des scénarios limpides à propos du comportement d'Esther et de son corps. Je l'avoue, elle devint un fantasme, une aventure secrète qui n'a pas eu le temps de s'embraser. C'est sur cette pensée que j'alluma une bougie, ferma les yeux et m'amusa à faire danser mes doigts au-dessus de la forme altérée et flamboyante. Quand je les ouvris, je n'eus le temps de parler que je constatai que les lèvres d'Esther épousaient les miennes et que ses yeux demeuraient fermés. Quand elle se retira et me regarda d'un air interrogatoire.