Chapitre 14 :

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Je fus transportée d'une chambre à une autre, la maison se transforma en ruche. Le monde vola, s'anima autour de mon corps brûlant. Mes cris ne leur firent pas peur contrairement à leurs mouvements au-dessus de moi. Ils me touchèrent d'un bout et d'un autre de mon corps, une substance froide fut déposée sur mon ventre m'arrachant un hoquetement. Ma vue était troublée par mes larmes mélangées à la sueur qui recouvrait chaque parcelle de mon corps. Je crus apercevoir ma mère puis Thomas, la douleur que je ressentais s'amusait à troubler mon esprit, mes sens. Je voulais, je suppliais pour qu'on me retire cette atroce douleur, ce bébé qui semblait écarteler chacun de mes organes. J'agrippa la première personne que je sentais autour de moi, la main était froide, glacée comparé à ma peau ardente. Un linge humide fut posé sur mon front, l'eau dégoulina jusqu'à l'arrière de mon cou. Les contractions étaient de plus en plus régulières et douloureuses. Je laissa échapper des injures ponctuées de cris me brûlant la gorge. Je maudissais mon corps d'être aussi gros, lourd, douloureux. J'haïs ces nuits que j'avais tant aimé, celles qui avaient provoqué mon état actuel. Je le détestais un peu plus, mais pas assez pour l'oublier. Mon cri résonna une nouvelle fois, l'instant se figea, la douleur amplifia, j'avais l'impression de broyer la main qui tenait la mienne.

Ils disaient que ce n'était pas normal que le bébé ne descendait pas malgré les contractions régulières. Ils prirent quelques instants avant de se décider, ils m'oscultèrent une nouvelle fois. A travers mes gémissements, je fredonna une nuée de supplice face à la douleur qui s'était installée au creux de mes reins. "Aidez-moi". "J'ai mal.", "ça va aller Romy." Je me sentis partir, je chus dans une espèce de voile blanc. Il était doux, il me tenait chaud, je me sentais bien. Je ne me sentis pas quitter mon corps.

De quelle manière, des événements dit heureux pouvaient être aussi douloureux. Comment un bébé pouvait être aussi petit et pourtant m'avoir fait autant de mal. Je n'étais pas dans ma chambre, les meubles étaient plus larges et plus hauts. Les draps étaient marrons contrairement au mien qui étaient habituellement blanc ou encore jaune. Sur le porte-manteau reposait un vieil manteau accompagné d'une éternelle casquette. J'étais dans l'ancienne chambre de Thomas. Mon corps était endoloris, chaque mouvement était douloureux. J'étais calée contre un gros édredon assez fourni pour caler mon corps blessé. Mon enfant, je voulais voir mon enfant, ma chair, mon exploit.

"- S'il vous plaît, je veux voir mon enfant."

Ma plainte s'échoua sur la porte close. Je savais pertinemment que je n'aurais pas eu la force de me lever du lit, que j'avais besoin de ce temps alité. La maison n'était pas silencieuse, je percevais les mouvements de ses membres. Le soleil s'introduisit dans la pièce par les ouvertures du volet. Les rayons envahissaient de plus en plus la chambre, révélant une belle journée. Ce temps où mes oiseaux chantaient, les femmes riaient et les hommes fumaient. Le calme de la chambre fut rompu par l'arrivée d'une infirmière.

"- Bonjour, Madame. Je vais devoir vous ausculter."

"- Bonjour, où se trouve mon bébé. Comment va-t-il ?"

Elle replia la couverture sur mes pieds, je la regarda remonter ma robe de nuit jusqu'au-dessus de mon ventre. Il paraissait flasque comme un ballon dégonflé. Un ballon traversé par ce qui s'apparentait à un pansement. Elle le retira avec délicatesse laissant apparaître une plaie fraîchement cousue, encore bouffie, rougie. Elle me paraissait barrer une grande partie de mon ventre, assez grande pour laisser passer mon bébé, pour donner la vie. La soignante prit son temps pour nettoyer la plaie et la recouvrir d'un bandage propre. J'eus ordre de réduire mes mouvements, plus je restais alitée et mieux c'était. Je réclama mon enfant, elle me promit que j'allais le voir mais qu'il fallait en contrepartie que je me repose. Elle tira un long rideau blanc derrière elle, me séparant de ma voisine, une femme d'une trentaine d'année passée au visage écarlate. Les murs n'étaient pas assez épais, les pleurs des mères et des nouveaux-nés résonnaient si forts qu'ils me tiraient de mon demi-sommeil. Mon corps était secouée d'une montée de fièvre, il suait. J'avais chaud, la robe blanche se mit à coller à mon corps encore arrondi. Derrière le rideau, les ombres des infirmières allaient et venaient, les pleurs se rapprochaient tout en s'éloignant. Je n'attendais qu'une seule chose, sentir mon enfant près de moi. Je le voulais pour moi. Rien que pour moi. Dès que mes yeux se fermaient, je n'entendais que lui, ces pleurs, son petit corps me réclamant. Le rideau fut tirer pour laisser passer les infirmières, elles installèrent deux petits chariots près de mon lit.

"- Bonjour, Madame Shelby. Comment vous sentez-vous ?"

"- Madame Wright. Vaseuse, j'aimerai voir mon enfant s'il vous plaît."

Elle s'excusa pour la confusion, ces joues s'étaient légèrement teintés. Sa collègue un peu plus âgée prit le relai, elle s'expliqua comment s'était déroulé l'accouchement et la césarienne d'urgence.

"- Et voici, vos enfants. Deux jolies filles nées respectivement à vingt-trois heure trente-six et vingt-trois heure quarante. Elles sont en parfaite santé. Elles ne demandent qu'à vous voir."

Deux jolies filles

Deux bébés

Mes enfants

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 10, 2024 ⏰

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Si le sang avait un prix [Peaky Blinder]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant