Dimanche 12 janvier, Séoul, Corée du Sud,
La pluie tombe abondamment contre les volets de notre chambre, dans laquelle je me suis plongé dans le noir, dont seule la faible luminosité de la lampe de chevet éclairée mon visage et mon corps entièrement nu dans le reflet du miroir — devant lequel je me tiens difficilement debout à l'aide de ma canne. C'est ainsi que je me retrouve chaque soir, à me fixer longuement et silencieusement dans la glace avec dégoût, retraçant du bout de mes doigts tous les endroits que Ha-joon a pu toucher, embrasser et frapper durant la longue année de notre relation.
Deux jours seulement se sont écoulés depuis ma petite dispute avec mon meilleur ami. Et il n'y a pas une seule seconde de mes journées, où ses mots ne passent pas en boucle dans mon esprit, telle une mélodie se répétant indéfiniment sur un tourne-disques rayés.
Il m'est difficile de regarder et d'aimer ce corps que je déteste tant, que je martyrise par des pensées et des actes odieux. Un corps avec lequel j'aurais aimé pouvoir m'en séparer, pour me faufiler dans un autre, et délaisser derrière moi tous les tourments de mon passé et de mon présent. Le chemin est le même à chaque fois que je glisse ma main sur mon corps. Elle part de mon visage, pour redescendre le long de mon cou, là où il aimait laisser ses marques de succions. Elle continue de tracer les mêmes lignes, me paraissant visible à l'œil nu, jusqu'à mes clavicules, ma poitrine et mes côtes, là où il aimait aussi me frapper quand je n'obéissais pas à ses demandes, à ses ordres.
Ma main tremble — tout comme mes jambes qui commencent à s'affaiblir sous le poids de mon corps — sur mon ventre que je n'arrive pas à regarder sans avoir l'envie de vomir et d'éclater en sanglots tant je me trouve répugnant à contempler. On voit encore un peu les os de mes côtes, ainsi que les pointes de mon bassin, et pourtant, je continue de me voir tel que j'étais au lycée ; un garçon boudinet et rondelet que l'on comparaît à un porcelet.
Ma respiration se fait plus difficile et étouffante, mon cœur bat à tout rompre contre ma poitrine, prêt à se frayer un passage dans ma cage thoracique pour s'enfuir loin de toute cette souffrance, lorsque ma main s'approche lentement de mon pénis, de cet organe mort que j'ai longtemps oublié et mis de côté pour tenter de ne plus penser à ce qu'il m'avait fait faire et subir sexuellement.
Je retiens un souffle glacial dans mes poumons, quand je me saisis enfin de ma virilité. Mes doigts de pieds se crispent en forme de bec de corbeau, à cette étrange sensation de lourdeur dans ma main. Mon duvet et mes poils pubiens se hérissent dans une vague de frissons de gêne et de répulsion, remontant le long de mon échine, jusqu'à la racine de mes cheveux. Je lâche soudainement mon pénis, accompagné d'un haut-le-cœur, en comprenant que je ne suis pas encore prêt mentalement et physiquement à me familiariser avec lui.
Je suis hideux. Il n'y a rien d'attirant, d'exaltant ou de séduisant à regarder sur mon corps. Tout est horriblement disproportionné à mes yeux. Plus je me regarde dans le miroir, plus je vois l'ombre de mes démons se dessiner nettement derrière moi, souriant et riant diaboliquement à gorge déployée des pensées négatives me submergeant, me noyant dans les abysses des océans.
Je commence à manquer d'oxygène — ou est-ce parce que je plonge dans une nouvelle crise d'angoisse ? — et je me laisse lourdement tomber sur mes genoux dans un fracas assourdissant en ne parvenant pas à pleurer. C'est comme si mon corps avait décidé de me couper de mes émotions, comme s'il en avait eu assez que je le torture quotidiennement à chaque moment de la journée et de la nuit, et qu'il désire enfin être en paix avec lui-même.
Pourtant, j'ai terriblement envie de pleurer. J'ai envie de crier, de hurler, d'extérioriser tout ce que j'ai emmagasiné à l'intérieur de moi depuis toutes ces années. De maudire toutes les personnes qui m'ont fait du mal volontairement, et de me libérer de ses chaînes auxquelles j'étais encore attachée. Cependant, rien ne sort de ma bouche. Une bouche qui s'efface dans le reflet du miroir, me faisant écarquiller les yeux de terreur face à ce scénario digne d'un film d'horreur. Mes mains se mettent à tâtonner vigoureusement mon visage, comme si cela allait faire revenir mes lèvres désormais inexistantes, criant désespérément dans des gémissements lointains et étouffés, avant de voir mon nez se volatiliser à son tour, et être entièrement privé d'oxygène.
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A Nos Âmes Écorchées
General FictionA nos âmes écorchées (anciennement WHO'S HE, que j'avais écrite en fanfiction BTS, groupe coréen). Dans la vie de Joshua, les épreuves ont toujours été monnaie courante. Depuis son enfance, il est soumis à une pression constante de la part de sa fam...