IL fait froid, il faisait froid. c'est de ça dont je me souviens, surtout. le froid le froid le froid le froid et puis oh pourquoi tu es mort en plein mois de décembre ? comment on fait pour se remettre d'un tel froid ; je me demande comment ils vont faire pour s'en remettre.
JE me souviens avoir eu froid, comme ça ne m'arrive pas souvent ; tout ce froid qui dégouline partout, qui emprisonne ma peau, mes os, qui me livre à l'effroi. je n'aime pas l'hiver, je n'aime pas décembre, je n'aime pas janvier.
OH et puis pourquoi tu es mort une semaine avant ton anniversaire ? je te déteste.
J'ÉCOUTE la chanson, parfois. je le fais surtout depuis quelques jours, je ne sais pas exactement pourquoi. je ne pense pas qu'il y est de raison à ça — à ta mort. j'écoute la chanson comme j'écoute toutes les autres, mon cœur ne se tend pas plus. j'écoute tranquillement, patiemment, inévitablement, la chanson et lorsqu'elle se termine je découvre une petite larme sur ma joue. je suis toujours aussi étonné.e de découvrir la larme sur ma joue, cette larme qui ne connaît pas la colère, qui ne la connaît plus.
POURQUOI les seules fois où je pleure vraiment pour toi c'est lorsque tu n'es plus là pour le voir ? je suis désolé.e. je repense à la chanson et aux pétales de roses, de si beaux pétales, de si belles couleurs, qui se sont éparpillés sur qui tu étais. ils ont fané dans la lenteur de décembre, enterrés comme des morts — comme toi. oui, les pétales ont connu la mort et maintenant ils ne connaissent plus rien ; tu ne connais plus. tu ne me connais plus.
POURTANT, me connaissais-tu ? je ne t'ai jamais donné la possibilité de le faire. je ne voulais pas que tu me connaisses ; je crois que je le veux maintenant. je suis désolé.e.
J'ESPÈRE que le froid de décembre n'a pas abîmé ton corps, qu'il n'a pas rendu tes lèvres encore plus bleues. j'espère qu'il ne t'a pas rendu encore moins toi.
S'IL te plaît, ne m'oublie pas ; je n'ai plus peur que tu me connaisses.
