Chapitre 5

131 7 13
                                    

Après un petit mois passé à essayer de convaincre le sergent Miller, de qui elle s'était beaucoup rapproché, de la mettre en contact avec l'amiral Kimmel, Marie vit à la fin mai ses efforts payer.

[Flashback]
- Doris, je t'en prie ! J'ai vraiment besoin de toi. Je ne peux pas te raconter pour le moment mais je le ferai dès que possible, je t'assure. Cette situation est déjà très compliquée pour moi.

- Mais comment veux-tu que je m'adresse à l'amiral ? Sérieusement, Marie, j'épluche des patates dans les cuisines de l'Arizona, il ne m'écoutera jamais, pas moi.

- Pas toi, exactement ! C'est justement là-dessus que je voulais venir.

- ...

- Pourrais-tu en toucher deux mots à ton capitaine ? Insister sur les effets catastrophiques si je n'arrive pas à lui parler. Alleezzzz, s'il te plaît. Fais ça pour moi.

- ... Je ne te promets rien.

- Merci ! Je t'adore.

- Fais gaffe, Johnny nous regarde, dit-il alors qu'elle lui sautait au cou pour l'embrasser.

- Il sait très bien que nous sommes meilleurs amis et rien de plus. Et si il ne me fait pas confiance alors notre relation est sans but.

- Au moins c'est clair.
[Fin du flashback]

Alors qu'elle rentrait chez elle, sautillant à l'idée de retrouver Johnny le soir-même, une main sur son bras l'arrêta net. Marie se retourna brusquement pour se retrouver face au bras droit de l'amiral. Elle se dépêcha de se mettre au garde-à-vous.

- Bonsoir, puis-je vous aider ? dit-elle, tendue.

- Nul besoin d'être aussi raide. Je suis simplement là pour vous informer que l'amiral Kimmel vous attendra ce soir à 20h à l'embarcadère. Il semblerait que vous ayez à lui parler, il vous écoutera. Vous avez grand intérêt à être convaincante, ce n'est pas un homme facile.

- Oh... Oh! Oui, bien sûr ! Merci beaucoup. Je serai là. 20h. À l'embarcadère.

- C'est ça. Eh bien, à bientôt, je suppose.

- Oui...! À bientôt...

Encore sous le choc de cette annonce, Marie réalisa qu'elle ne pourrait pas manger avec son petit-ami. Elle décida donc de lui rendre visite pour le prévenir.

Sur le chemin, elle réfléchit d'abord à l'excuse qu'elle donnerait à Johnny, puis à comment elle aborderait le sujet avec Kimmel. D'abord, dire à Johnny que c'était un rendez-vous purement professionnel, très important pour elle. Ensuite, raconter à l'amiral toute sa folle histoire. Facile ! En théorie...

Puisque raconter son histoire signifiait également lui annoncer qu'il n'était qu'un personnage de film et que son identité de Hailey Jones était fausse, et ainsi risquer d'être aux arrêts et que son père finisse au bloc. Voilà pourquoi il fallait être convaincante et insister sur le nombre de morts. Pourquoi pas l'exagérer un peu... Juste un petit peu...

Soudain elle réalisa qu'elle avait largement dépassé la maison de son petit-ami. En maugréant, elle revint sur ses pas et se recoiffa avant de sonner. Ce fut le père de Johnny qui lui ouvrit.

- Marie, quelle bonne surprise ! Nous ne t'attendions pas avant 20h ! Johnny aurait oublié de me prévenir du changement ?

- Hum... Non. En fait... Ce soir j'ai un rendez-vous professionnel très important pour moi à 20h justement... Je ne pourrai malheureusement pas venir manger avec vous. Je suis absolument confuse, je l'ai appris à l'instant... Pourrions nous reporter ça à plus tard ? Mercredi, par exemple ?

- Oh, c'est dommage ! Mais si c'est si important pour toi alors Johnny devrait comprendre.

- Il n'est pas là ?

- Non, il est encore à l'entraînement. Ne t'inquiète pas, je lui dirai que tu es passée.

- Merci infiniment, et encore désolée.

- Sue va être déçue, elle avait préparé une superbe blanquette...

- Ce n'est pas très gentil de me faire culpabiliser comme ça, répliqua-t-elle d'un air amusé.

- Bon allez, je ne te retiens pas plus. Bonne chance pour ton rendez-vous et à mercredi !

- Merci beaucoup, à mercredi !

Elle regarda sa montre. 18h30. Elle avait une heure pour se préparer. Alors elle rentra en vitesse chez elle et monopolisa la salle de bain pendant une heure entière. Métamorphosée, elle s'attira en sortant les regards soupçonneux de ses parents et leur lança pour toute explication un simple : "Rendez-vous professionnel !"

En marchant aussi vite que ses talons le lui permettaient, elle alla à l'embarcadère, plus stressée que jamais depuis son arrivée à Pearl Harbor, un mois auparavant. Sur le chemin, elle croisa plusieurs de ses connaissances qu'elle salua, avant de tomber sur Johnny. Elle s'arrêta net et le regarda, embarrassée.

- Ma maison est de l'autre côté, l'aurais-tu oublié ?

- Johnny, je suis absolument désolée, j'ai déjà prévenu tes parents mais j'ai un rendez-vous professionnel très important pour moi et je dois me dépêcher d'y aller. J'ai reporté notre repas à mercredi, je serai là sans faute !

Exaspéré, il la regarda le dépasser en courant et soupira. Pourquoi ne s'était-elle jamais faite aussi belle pour lui ?

Pearl HarborOù les histoires vivent. Découvrez maintenant