Psychose: La liberté a un prix

CHAPITRE 5 : Prémonition

Katerina dormait à poings fermés et s'agitait nerveusement dans son sommeil en poussant de légères plaintes, comme si quelqu'un la secouait doucement pour la réveiller.

Sa couverture vola tout à coup à l'autre bout de la pièce, comme sa mère avait l'habitude de le faire quelques années plus tôt. Elle sursauta dans son lit et se redressa brusquement en le faisant légèrement grincer. La porte de sa chambre face à elle était grande ouverte. Une étrange lueur blanche semblait flotter dans les airs, une boule de lumière qui lui paraissait si rassurante qu'elle se leva pour aller inspecter ce petit point brillant de milles feux de plus près. Cette boule de lumière était magnifique, elle ressemblait à une minuscule étoile. À son approche, ladite étoile vola doucement vers la droite en direction du bureau de son psychiatre et traversa sans mal la porte en bois. Se retrouvant tout à coup dans le noir le plus total, l'impression de bien-être que Katerina ressentait quelques minutes plus tôt s'évapora comme neige au soleil. Elle plongea alors sur la porte du bureau en espérant que la boule de lumière l'attendrait derrière.

Cependant, elle constata que le bureau de son nouveau médecin était illuminé uniquement par une pleine lune stupéfiante et presque surnaturelle. Le docteur Garcia se trouvait là, face à la fenêtre et les mains dans les poches. Il se retourna à son entrée et s'approcha d'elle d'un pas extrêmement lent et prudent. Il posa une main fraîche sur sa joue et plongea des yeux paniqués dans les siens.

–Katerina, aide-moi... la supplia-t-il.

Un grand bruit de verre brisé la fit bondir. La pièce s'obscurcit soudain comme si un nuage épais recouvrait le ciel en cachant la lumière de la lune. Une voix chantante surgit alors de nulle part, à peine distinguable bien qu'elle semblait venir de partout à la fois.

–C'était dans la nuit noire...

Deux brefs tapements de mains résonnèrent à côté de son oreille droite. Katerina fit volte face, en alerte.

–Dans un sombre manoir...

Deux autres claquements retentirent cette fois sur sa gauche. Regardant tout autour d'elle, Enzo continuait de la fixer de ses yeux remplis de terreur et l'attrapa de ses deux mains fortes par les épaules. La voix déformée par une douleur intense, le docteur Garcia la supplia de nouveau :

–Katerina...

Le lendemain, Katerina s'était levée de mauvaise humeur et s'en prenait à quiconque avait le malheur de lui adresser la parole. À la fin de matinée, tout le monde avait compris le message et elle put ruminer en paix le reste de la journée. Elle avait repassé en boucle son étrange rêve toute la journée en se posant mille et une questions. Que signifiait-il ? Était-il possible que le docteur Garcia soit en danger ?

Katerina se leva du lit où elle était prostrée depuis un bon moment. La nuit commençait à tomber. Elle se mit à faire les cents pas dans sa petite chambre d'un bout à l'autre en réfléchissant à toute vitesse. Perdait-elle la tête à imaginer les gens autour d'elle mourir un à un ? S'agissait-il d'une autre des ses« hallucinations sensorielles » dont parlait souvent le docteur López ? Était-elle paranoïaque ?

Repenser à son vieux psychiatre décédé lui serra le cœur dans un pincement et renforça son sentiment de culpabilité. Une confusion intense s'empara d'elle et la tête se mit à lui tourner. Elle se culpabilisait pour la mort du docteur López car elle n'avait rien fait pour le prévenir. Elle n'avait rien dit. L'ironie de la situation était qu'elle essayait en même temps de se convaincre que son pressentiment pour le docteur Garcia n'était pas fondé.

Katerina était perdue. Que devait-elle faire maintenant ? Elle soupira longuement et jeta un regard en biais à la fenêtre condamnée de sa chambre. La lune était aussi pleine qu'une boule de billard et semblait la narguer pour la mettre à l'épreuve.