Chapitre 13 :
Sur le chemin qui la menait à l'hôtel où séjournait le Docteur Eugène Courtois, Gabrielle avait hésité, peut-être aurait-elle dû appeler pour s'annoncer? D'un sens, il était sûrement plus sûr d'éviter de trop se montrer, de trop attirer l'attention, et se rendre directement à l'hôtel au lieu de se retrouver en lieu neutre était peut être la solution la moins voyante. Elle avait voulu prendre rendez-vous, mais l'idée s'était vite effacée pour laisser place à la discrétion. Sa recherche du docteur Courtois avait déjà été très facile à suivre, elle avait donné son nom, avait même donné celui de Pierre. Avec le recul, elle regrettait d'avoir fait cela. Mêler Pierre à quelque chose qu'elle faisait derrière son dos était une mauvaise idée...
Il ne fallut que quelques minutes en fiacre pour rejoindre le petit hôtel du Docteur Courtois, un endroit sans prétention, qui ne retenait pas vraiment l'attention. Très bien. Une fois à l'accueil, elle demanda directement la chambre du médecin, se fichant bien de ce que l'on aurait pu penser d'elle. Une fois l'information obtenue, elle prit l'escalier pour rejoindre l'étage où il logeait. Déterminée et sans hésitation, elle frappa à la porte.
***
Il avait bien fallu une heure à Gabrielle pour expliquer tout ce qu'elle avait vécu au Docteur Courtois, en rentrant dans les détails, en tentant de lui faire parvenir la moindre petite chose qui aurait eu son importance. Revenant sur l'avancement de l'affaire, mais surtout l'événement avec Monsieur Dharvilliers, sa mort, ses blessures, son récit, puis le suspect, sa façon de se tenir, ses vêtements, la longueur de ses cheveux. Elle n'avait rien omis, prenant le soin de décrire tout avec application. Celui—ci l'avait écouté, sans rien dire, avec une attention soutenue. Son regard trahissait son impatience et sa surprise.
Il n'avait été étonné de trouver Gabrielle devant sa porte d'hôtel que pendant quelques secondes, car celle-ci avait expliqué le but de sa venue sans attendre. Tous deux s'étaient alors enfermés discrètement dans la chambre pour parler tranquillement. Eugène Courtois avait fini par sortir son carnet et un stylo pour prendre des notes, il fit répéter à Gabrielle parfois plusieurs fois certains détails, en particulier les blessures sur le corps du malheureux. Une fois qu'elle eut terminé, qu'elle expliqua sa perte de connaissance au milieu de la route sur la butte Montmartre, il y eut un silence. Un long silence, brisé par un immense soupir, Eugène remit ses cheveux blond en place, par réflexe, car il n'avait pas bougé.
« Un être humain... Comment un être humain a pu faire cela? Ses bras étaient brisés, il ... aucun homme d'une telle carrure ne peut faire cela. Les hommes se battent, ils se blessent souvent, mais à pas à ce point. Quand deux hommes se battent, on retrouve des blessures typiques: des os brisés dans la main, le pouce, à la suite à des coups de poings et un mauvais positionnement des doigts ou du poignet. On retrouve aussi souvent des nez cassés, des fractures de la mâchoire, des commotions cérébrales. Les gens frappent le visage, et quand ils ne le font pas, ils cherchent le ventre, donc parfois des contusions de la rate... Mais ce que vous me décrivez n'y ressemble pas: avoir la cage thoracique enfoncée c'est... exceptionnel et demande une force incroyable, c'est plutôt quelque chose que l'on retrouve lors d'accidents avec des automobiles, ou à cheval. Mais encore une fois, c'est réellement dans un contexte de grande violence du choc, expliqua Eugène avec application, illustrant son propos en montrant les différentes parties du corps dont il parlait.
— Oui c'est bien ce qu'il me semblait. J'ai également l'impression que cela relève plus d'une agression que d'un combat entre deux personnes.
— Tout à fait! De toute façon, de ce que vous me décrivez, ce monsieur n'aurait rien pu faire. C'est même un miracle qu'il n'ait pas succombé bien avant. Un agresseur avec une force pareille... Je regrette tellement d'avoir été muté. Je voulais tellement en savoir plus, essayer d'aider à résoudre cette affaire, soupira l'homme, posant son stylo qu'il n'arrêtait pas de toucher.
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La Nuit Des Etoiles - T.1 (Réécriture)
RomanceA 23 ans, Gabrielle vient de se fiancer à Pierre. Un soulagement pour son tuteur qui l'élève depuis sa petite enfance et qui la prédisposait à un mariage arrangé. Mais alors qu'elle revient de long mois de convalescence pour une maladie qui la défig...