L'affliction d'aimer ce(ux) qui ne sait aimer

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Mon corps traversa des milliers de secondes depuis le commencement, tellement qu'il lui est impossible de s'en rappeler. Quand ai-je commencé à aimer ? Etait-ce le jour où je suis née ? Comment aurais-je pu aimer en ce jour où tout m'était inconnu ? Je ne pense pas que ce soit ce jour, sinon cela signifierai qu'on n'aime pas ce qu'on a apprit à connaître. Non. Je réfute cette idée. Je refuse de croire que l'on aime ce qu'on ne connait. Si tel est le cas, je ne serais jamais aimée comme je le voudrais. Si tel est le cas, on ne m'aimera pas pour ma personnalité, mes défauts et qualités.

Quand ai-je commencé à aimer ? Je ne saurai me rappeler du jour où j'ai commencé à aimer la dernière personne que je me suis mise à aimer. Je ne saurai non plus me rappeler du jour où j'ai arrêté d'aimer la dernière personne que je me suis mise à oublier. Si je connaissais les réponses à ces questions, peut-être aurais-je pu comprendre les raisons qui me poussent à aimer et à oublier. Ces connaissances m'auraient-elles offert le pouvoir d'éviter les commencements ou de hâter l'arrivée de la fin. Quitte à ne pas pouvoir choisir quand aimer, j'aimerais au moins pouvoir reconnaître lorsque les signes arrivent, pour que je puisse éviter d'aimer ceux qui ne savent aimer, et si c'est une fatalité, que l'on me donne l'opportunité de m'y préparer. Aussi, j'aimerais pouvoir me précipiter vers la fin, pour que l'affliction soit courte.

Mais il n'est visiblement pas de mon pouvoir d'arrêter d'aimer, alors il me faut subir les sentiments et leur lot d'injustices. Subir d'être celle qui t'aime et celle que tu dis aimer. Aux yeux de beaucoup, la véracité de ces paroles importent peu lorsqu'elles sortent des lèvres de ceux qui, comme toi, ne savent aimer. Un cadeau empoisonné reste empoisonné, les bonnes intentions importent peu. Mais je suis de ceux qui gardent ces cadeaux par peur de perdre la personne m'en ayant fait don, dans l'espoir que ce cadeaux soit offert avec la plus grande sincérité et que cette dernière soit suffisante pour me consoler. Peut-être est-ce dû au fait que je n'ai reçu que très peu de ces cadeaux. Ma mère n'aurait pas daigné m'offrir une once de son affection qu'elle préférait accorder à d'autres, comme tu sembles apporter ton affection à d'autres tout en murmurant que je suis la seule à la recevoir.

Ce que tu me dis être de l'amour ne me semble être jusqu'à présent qu'un lot de haine, de négligence et d'infidélité. Ton amour est rabaissant, méprisant, colérique. C'est ainsi que tu m'aimes mal, mais tu sembles tant m'aimer. Pourtant je me souviens d'un temps où ton amour était synonyme de chaleur, de respect, de paix et de joie. Ce temps qui revient à certains moments à travers lesquels j'aperçois une illusion qui mérite que l'on s'accroche. Alors je m'accroche, mais aujourd'hui mes phalanges me font mal et mes bras faiblissent. Mes mains commencent à lâcher prise et je me sens doucement tomber, plus proche de ce vide un peu plus chaque fois que tu me blesses. À certains moments, je ne pense qu'à lâcher prise, mais je réalise mon impuissance. Mes membres sont rouillés à force de tenir si fort à quelque chose de si fragile, et il me semble qu'il n'y a que le jour où tu me pousseras dans le vide que mes mains pourront lâcher prise. Alors, dans ces moments, je ferme les yeux et prie pour être libérée un jour du fardeau de t'aimer.

Un jour oui, peut-être, serais-je libérée d'aimer ce qui ne sait aimer.

Flot de paroles non-prononcéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant