hotel california | the last of us part III

[ iv ]

— Laissez-moi passer putain !

Ellie repoussa d'un coup de main hargneux le garde qui cherchait à la scanner depuis un moment, ce dernier ne s'attendant visiblement pas à voir quelqu'un avec un tel caractère se présenter, tandis que son cheval récemment volé l'attendait en broutant non loin.

— Madame c'est la procédure. Soit vous acceptez les scanners soit vous repartez, répéta-t-il pour la quatrième fois, ne pouvant rien faire contre le tempérament explosif de la jeune femme.

— Mais je connais des gens merde, j'ai même une maison ici ! Allez chercher Tommy, il vous dira que je peux rentrer !

— Ça ne change rien au fait que je doive vous scanner, on ne peut pas risquer d'admettre un infecté à Jackson. Je suis désolé mais c'est la procédure, asséna sèchement l'homme en parvenant à attraper son bras et à plaquer son scanner sur la tempe de la jeune femme avant qu'elle ne puisse le repousser.

Ellie serra les dents, savant pertinemment ce qui allait se passer, sauf que cette fois Joel et Tess ne seraient pas là pour l'aider à se défendre. La machine émit un « bip » aiguë et le soldat s'écarta brusquement d'elle en sortant son arme, voyant la led virer au rouge. Instinctivement, elle porta la main à son couteau, l'homme n'ayant pas l'air bien difficile à tuer, mais se ravisa à contre-cœur. Même si elle n'aimait pas se sentir si vulnérable, et aurait préféré pouvoir au moins avoir son couteau, cela pouvait se retourner contre elle, et elle ne voulait pas risquer d'être bannie de Jackson.

— Les scanners ont toujours eu un problème avec moi, je suis pas infectée, vous pouvez vérifier si ça vous chante. Allez demander à Tommy, il vous le confirmera. Dites lui qu'Ellie est ici.

L'homme, sans pour autant baisser son arme, fit signe à un autre homme de retourner dans la ville, pour aller chercher Tommy et non des renforts, espérait Ellie, puis lui intima de retirer sa veste et de retrousser son pantalon, pour vérifier qu'elle n'avait pas de marque de morsure. Heureusement pour Ellie, son tatouage camouflait celle qu'elle avait au poignet, aussi l'homme ne vit rien, et cette dernière lui jeta un autre regard haineux, essayant de lui faire comprendre que si elle l'avait voulu il ne serait actuellement plus qu'un cadavre.

— Baissez votre arme, vous faites peur au cheval. Si j'étais infectée je me serai déjà transformée et vous seriez probablement déjà mort aussi de toute façon.

L'homme ne lui adressa pas un mot et ne bougea pas, ce qui eut pour seule conséquence d'exaspérer encore plus la jeune femme. Heureusement, c'est à ce moment que Tommy arriva, accompagné de l'autre garde qui était parti le chercher quelques minutes plus tôt.

— Ellie ?

— Dis à tes putains de gardes d'être moins coincés, Tommy. On a connu meilleur accueil à Jackson.

Il la regardait, les sourcils froncés, comme s'il ne pouvait pas être certain qu'elle était vraiment là, puis fit signe aux gardes de baisser leur arme.

— Elle n'est pas infectée, vous pouvez la laisser passer.

Tommy se décala pour la laisser passer la clôture, puis attrapa son poignet et l'attira dans un coin à l'écart. Moins d'un an s'était écoulé depuis leur dernière discussion, mais il semblait avoir pris dix ans, comme si le rôle de père et de dirigeant étaient trop importants pour lui seul. Ellie aurait pu s'en inquiéter, à une époque elle l'aurait fait, mais les choses avaient changé. Tommy l'avait poussé à recommencer sa traque d'Abby, s'il dépérissait, c'était mérité. Il pouvait crever, Ellie n'en aurait rien à faire, elle ne lui devait rien.

— Dina a dit que tu étais morte.

— Dina est ici ? se redressa Ellie, le visage s'illuminant soudainement, reprenant espoir. Je veux la voir.

Le frère de Joel fronça les sourcils puis serra les poings.

— Tu m'expliques ce que tu fous ici au juste ?

— Je veux voir Dina avant, répliqua la jeune femme, ne comptant nullement lui dire quoi que ce soit.

— Écoute, je sais pas ce que t'as foutu, mais elle est arrivée ici un jour avec JJ, a dit que tu ne reviendrai sûrement pas, et ne m'a plus jamais adressé la parole. Donc explique moi ce que t'as putain de fait.

Elle haussa les sourcils, et se retourna, avant de partir vers son ancienne maison, sans répondre à cet homme qu'elle avait un jour considéré comme un membre de sa famille. Elle savait que ce n'était pas une bonne idée de l'avoir demandé, mais Maria ne l'aurait pas laissé rentrer et elle n'était pas sûre que Dina soit bien ici. S'il ne voulait pas l'aider, elle le ferait toute seule, elle s'était toujours débrouillée, elle n'avait pas besoin d'aide.

— Ellie attends.

La jeune femme l'ignora et continua son chemin, les poings serrés.

— Je suis désolé, lâcha finalement Tommy, sa voix laissant transparaître un effort considérable, preuve qu'il lui en coûtait réellement de s'excuser. Je n'aurais pas dû revenir chez vous pour te forcer, je ne pouvais pas faire mon deuil et ça t'a empêché de faire le tien, je regrette d'avoir fait ça. J'y ai beaucoup réfléchi, j'ai passé longtemps sur sa tombe, et j'ai fini par trouver la paix. La vengeance n'est pas ce qu'il aurait voulu, et tu l'avais compris avant moi, mais je t'y ai poussé, et je m'excuse sincèrement pour ça.

Ellie resta un moment immobile, sentant ses yeux se remplir de larmes, mais elle les refoula et serra les dents, avant de se retourner vers Tommy, qui osait à peine la regarder. Elle aurait voulu pouvoir lui pardonner, elle aurait voulu faire la paix avec lui, et pouvoir renouer une relation, mais tout ce qu'elle était capable de ressentir c'était une immense rancoeur. Il y avait une trop grande distance entre eux pour qu'elle puisse le pardonner, pour qu'elle puisse lui dire que tout n'était pas que de sa faute. Elle aurait pu, mais elle ne le voulait pas.

— T'as niqué ma vie Tommy, va te faire foutre.

Et sur ces paroles elle partit sans un regard en arrière, vers son ancien chez-elle. Les rues de Jackson n'avaient pas tellement changé, il y avait juste un peu plus de monde. Les enfants couraient toujours partout, évitant de justesse les cavaliers sur leur monture qui trottinaient, rentrant de patrouilles, un petit marché s'était mis en place, toujours basé sur le communisme, et un nouveau bâtiment était en construction. On pouvait même apercevoir quelques véhicules dans un garage, probablement récupérés dans un centre WLF.

La petite ville était désormais presque identique à ce qu'on aurait pu trouver avant l'infection, du moins le supposait la jeune femme, n'ayant jamais vécu dans le monde d'avant, et il y régnait un tel sentiment de sécurité et de bien être que le contraste avec sa ferme à l'abandon mit une claque à Ellie.

Elle déambula un moment dans les rues, souriant quand un des enfants se cachait derrière elle pour éviter de se faire attraper par ses camarades qui lui couraient après en riant, puis se figea devant une petite aire de jeu. C'était ici qu'elle avait pris la décision de partir avec Dina, il y avait une éternité lui semblait-il. Des enfants faisaient du toboggan ou escaladaient les structures, sous la surveillance de leurs parents. Une scène paisible qu'Ellie aurait voulu pouvoir vivre un jour avec Dina et Joel à ses cotés. Alors qu'elle s'apprêtait à partir, elle se figea en entendant un rire familier, et chercha du regard l'enfant dont il provenait.

Elle finit par s'arrêter sur un bébé bien chevelu, qui avait bien grandi depuis la dernière fois qu'elle l'avait vu, et qui marchait dorénavant d'un pas un peu bancal mais tout de même assuré, vers une femme aux longs cheveux sombres, qui tendait les bras vers lui. Elle avait un grand sourire et ses yeux brillaient comme à l'époque ou Ellie l'avait connue. Elle n'avait pas changé, si ça n'est qu'elle semblait un peu plus épanouie et heureuse, et Ellie se sentit soudain bien miteuse dans ses vieux vêtements à peine propres. Elle essaya de lisser les plis de sa chemises, sans songer d'à quel point elle avait l'air ridicule à se mettre dans de tels états juste pour une femme, puis s'avança d'un pas mal assuré vers la jeune mère. Tout allait enfin pouvoir s'arranger et redevenir comme avant.

— Dina ?