Chapitre 5 : Un Nouveau Départ

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Avant qu'Aro ne parte, il m'avait confié qu'il souhaitait rentrer chez lui ce soir et que ses affaires se règleraient dans l'après-midi. Je ne voulais pas partir, pas comme ça, pas maintenant. Comment allais-je en parler à Auguste ? Accepterait-il que mon bienfaiteur m'héberge ?

En y réfléchissant, bien que je sois une femme, je peux réfléchir par moi-même. Là n'était d'ailleurs pas le problème. C'était le regard d'autrui. Ils allaient me juger, me prendre pour une putain et rien d'autre. Mais c'était mon malheur de plaire aux hommes me disais-je. (Si seulement c'était la véritable raison.)

La matinée était déjà passé et mon ventre se mit à grogner. Entre mon bannissement et une demande d'hébergement, je n'avais pas pris le temps de manger. Maria, qui était partie lorsqu'Aro désirait me parle, était revenue peu après pour finir de faire mes valises. Après avoir entendu mon estomac crié famine, nous décidâmes de partir en direction des cuisines visitées plus tôt ce matin.

C'était sûrement la dernière fois que j'empruntais ce chemin qui m'avait valu la première fois que je l'avais pris, de me perdre comme dans un labyrinthe. Aujourd'hui, jamais je ne pourrais l'oublier, je le connaissais les yeux fermés. Mais pour admirer ses décors et ses sculptures, je les gardais ouverts car chaque passage me faisait découvrir un nouveau détaille et une nouvelle histoire. C'est cela que j'aimais dans le palais. Chaque jour, on découvrait de nouveaux lieux si l'on y prêtait un tant soit peu attention. Peut-être la demeure d'Aro allait-elle me surprendre ? Je l'imaginais déjà comme une vieille bâtisse sombre et repoussante, éloignée de toute civilisation, dans les montagnes.

Le temps de rêvasser et le chemin était effectué. Il fallait que je me concentre au retour pour garder tout cela en mémoire.

La cuisinière, Madame Claudia, était déjà aux fourneaux et une odeur alléchante de viande bouillie et confite sortait de ses casseroles avec lesquelles elle aurait pu faire manger un régiment entier. Quand elle me vit arriver, ses lèvres s'étirèrent en un sourire fatigué mais heureux. Elle devait avoir eu vent de mon bannissement, comme tout le personnel. Livia devait sûrement transmettre le message le plus rapidement possible à ses sbires pour leurs informer de sa victoire. Elle pouvait la savourer et malheureusement je ne pouvais rien y faire. Ou néanmoins, il ne valait mieux pas que je puisse me venger. (Il est bien connu que les femmes sont rancunières, ou tout du moins, qu'elles n'oublient rien. C'est ce qu'il fait qu'elles sont redoutables de nos jours.)

- Oh, ma charmante jeune fille ! Je suis tellement attristée par cette nouvelle des plus affreuse. Comment sa majesté à tel pu vous chasser alors que vous étiez son rayon de soleil ? Il ne vous mérite tout simplement pas ! Et puis Dame Livia a été odieuse avec vous. Ce n'est pas vous qui devriez partir mais elle. De plus, elle est affreuse avec tout le personnel. Il serait temps qu'elle soit bannie !

Je n'arrivais plus à l'arrêter. Madame Claudia, ainsi que tant d'autres serviteurs détestaient Livia et j'en étais ravie. Leur soutient m'était d'une grande aide mais pas aujourd'hui. Je voulais simplement profiter de mes dernières heures et de mon dernier repas en leur compagnie en évoquant nos souvenirs. Alors que la cuisinière était à bout de souffle, je m'empressai de prendre la parole.

- Madame, rien ne sert de ressasser tout cela. Je souhaite simplement partager ce dernier festin avec vous si cela ne vous dérange pas ? Je ne blâmerais personne pour mon bannissement et vous écrirait quand je le pourrais. Qu'en pensez-vous ?

- Oh oui Mademoiselle Juvenalis ! crièrent tout le personnel de cuisine en chœur.

Très vite, en entendant que je me trouvais dans la cuisine, tous les serviteurs me rejoignirent ainsi que quelques gardes et enfants dont j'avais eu la chance de rencontrer durant mon séjour au palais. Je leur annonçai la demande d'Aro. Tous étaient surpris puisqu'ils m'avaient vu en proie à ma plus grande terreur, mais s'étaient très vite ravisés d'en parler. Ils étaient tous heureux et soulagés pour moi. Notre déjeuné se déroula sous les meilleurs auspices. Nous étions tous à table, racontant nos anecdotes rocambolesques sur tout et n'importe quoi. C'était mon dernier repas mais le meilleur et avec mes amis qui plus est.

L'après-midi était déjà bien entamé quand je finis de ranger mes affaires. Il était temps d'aller voir Auguste pour lui annoncer qu'Aro souhaitait m'héberger. Je congédiai Maria pour qu'elle se prépare elle aussi à partir et me dirigeai donc en direction de son bureau. Les couloirs étaient pleins de jeunes aristocrates venant faire leur requête pour diverses raisons. Certains, qui me connaissaient, me saluèrent, les autres me dévisagèrent. Je n'avais jamais été bien vu par tout le monde, c'était une évidence. Arriver devant la grande porte en bois, mon cœur s'accéléra. Les gardes l'ouvrir s'en prêter attention à mon inquiétude et m'annoncèrent :

- Mademoiselle Vénus Aurelius Juvenalis !

Depuis quand m'appelaient-ils par mon nom complet ? Oh, mais oui. J'étais considérée comme une étrangère désormais ! Mon angoisse disparue et laissa place à une forme de colère vide et désarçonnée. Je le vis, au fond de la salle, assis à son bureau. Aro était assis face à lui. Gênée d'avoir interrompu leur échange, je m'inclinai et m'excusai poliment. Pourquoi avaient-ils ouvert la porte sachant qu'il était en entretient ?

- Excusez-moi de mon intrusion. Vos gardes ne m'ont pas averti que vous aviez de la compagnie. Je repasserais...

- Attends ! Heu, je veux dire que vous ne nous dérangiez point. Que vouliez-vous me dire, cela à l'air urgent ?

- Enfaite votre majesté, nous voulions vous parler. Lança Aro

- Vous deux ?

Je regardai Aro circonspecte. Il souhaitait donc m'aider à annoncer cette nouvelle que j'avais si peur de révéler. Intérieurement, je le remerciai. Auguste m'indiqua un fauteuil sur lequel je m'empressai de m'installer car mes jambes commençaient à trembler.

- J'aimerais vous demander la permission de recueillir Juvenalis chez moi comme vous l'avez fait pour elle.

Auguste se décomposa et devint livide.

- Il en est hors de question !

Cette fois ci, c'est moi qui me décomposai. Mais pourquoi refusait-il ? Ah ! Je le savais que c'était une mauvaise idée, je me faisais déjà des films sur une toute nouvelle éducation. Puis, à côté de moi, Aro se mit à rigoler d'un rire fou, presque machiavélique. C'était à n'y rien comprendre. Il se ressaisit et repris la parole.

- C'est simplement par charité votre altesse. Je ne souhaite point faire de Juvenalis ma concubine.

Il souffla de soulagement à cette annonce. Alors c'était cela qui avait mis Auguste dans un tel état. Mais en quoi cela le regardait-il ? Après tout il m'a banni et je fais désormais ce que je veux.

Auguste se tourna vers moi comme pour déceler si j'en avais vraiment envie. Je me tenais fièrement comme pour montrer que c'est ce que je voulais ardemment. Ma détermination avait dû finir par le convaincre puisqu'il se résolu à me laisser partir.

Extérieurement, je souriais pour les remercier l'un comme l'autre de leur aide et explosais de joie intérieurement de découvrir de nouveaux horizons et de peut être démarrer une nouvelle vie.

Éternel Où les histoires vivent. Découvrez maintenant