Chapitre 14: Nath, Au septième étage

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Il est quasiment onze heure lorsque j'arrive à l'adresse indiquée par Bright. Alors c'est ici qu'il vit désormais. Harlem a vraiment beaucoup changé ces dernières années. On est loin des clichés de ghettos et de coupe gorge que l'on retrouve encore dans les films. Le quartier qu'il a choisi semble même plutôt  huppé et son immeuble flambant neuf n'a rien à envier à ceux du sud de Manhattan. 

Même si Julia m'a prouvé ces dernières heures qu'elle est complètement folle, je doute qu'elle soit capable de faire du mal à ma mère. Du moins physiquement. Mais j'avoue que j'attends quand même son coup de fil pour me dire qu'elle est bien rentrée avec impatience. J'espère que les menaces de maman seront efficaces et que cette garce nous laissera tranquille. 

Vider mon sac m'a épuisé, mais ça m'a aussi fait un bien fou. Et voir ma mère accepter ce que je suis et accepter Bright dans la foulée est un soulagement encore plus salvateur. Je sais que mes problèmes sont loin d'être résolus, mais j'entrevois enfin une chance de m'en sortir. D'autant plus que si la solution venait de ma mère, ça serait bien plus facile pour Bright de lui pardonner et de l'accepter à son tour. 

Ma casquette enfoncée sur la tête, je descends du taxi et me dirige directement vers la porte. Bright n'a pas lu mon message lui indiquant mon arrivée. J'espère qu'il ne tardera pas à ouvrir. Il ne manquerait plus que quelqu'un me reconnaisse et indique aux journalistes où je me trouve. Dès que j'entends sa voix grave raisonner à travers l'interphone, mon coeur se met à battre la chamade. La simple idée de me retrouver de nouveau dans la même pièce que lui me transporte de bonheur.

-Oui...

-C'est moi bébé!

-Moi qui?

L'enfoiré! Dans un moment pareil? Sérieusement? 

-Ouvre! On pourrait me reconnaître!

-Vous devez donner le mot de passe d'abord!

Mais quel gamin!

-Un mot de passe? Je n'ai pas de mot de passe... Bébé ouvre, je ne suis pas rassuré, s'il te plait!

Le son caractéristique d'une porte qui se déverrouille retentit. Aussitôt, je pénètre dans le sas puis dans l'ascenseur qui est déjà là et monte directement au septième et dernier étage.  Bright m'attend devant la porte ouverte de son appartement sourire aux lèvres.  

-Comme vous n'avez pas donné le mot de passe monsieur Smith, vous allez avoir un gage. 

-Laisse moi entrer idiot! Tu sais à quel point c'est angoissant pour moi d'être dehors ces dernières heures? On dirait tu n'as même pas envie de savoir comment ça s'est passé avec ma mère?

Il se met à ricaner gentiment.

-Mon amour, si tu es là, c'est qu'elle n'a rien trouvé à inventer qui t'aurait donné envie de me fuir. C'est la seule chose qui m'importe venant d'elle!

-Non, en effet. On va vraiment continuer à discuter sur le palier ou tu me laisses entrer?

Le sourire radieux qu'il affiche sur son magnifique visage me fait rater un battement. Il a l'air tellement heureux, tellement détendu. C'est presque trop beau pour être vrai, c'est surtout très bizarre si on connait la situation dans laquelle on est. Délicatement, il m'attrape la main et m'invite à entrer.

-D'accord, mais ne te moque pas, s'il te plait mon amour... Je n'ai pas eu beaucoup de temps...

Je m'apprête à lui demander pourquoi lorsque je passe la porte. Mon dieu, j'ai du mal à en croire mes yeux. Cet endroit est juste un énorme bordel! La pièce n'est pas petite, mais l'immense lit qui trône en plein milieu envahit complètement l'espace. Les cartons entassés un peu partout semblent servir de table à manger et d'étagères pour les bouquins, les scripts et les bibelots. Une énorme montagne de fringues s'adosse au mur près de la fenêtre et un tas de magazines et de journaux jonchent le sol. Le seul endroit à peu près en ordre dans cet appartement, c'est la cuisine. Pourquoi est-ce que ça ne m'étonne pas?

Notre maître chanteur (tome 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant