La Volonté du Diable

Chapitre 7 - Kaï

Une fois certain que l'odeur de mon gel douche au pamplemousse a remplacé celle de ma transpiration, je m'extrais de la douche. Un claquement de doigt me suffit pour supprimer la buée du miroir, gigantesque par rapport à la pièce - un autre caprice des filles qui, je dois l'admettre, me plaît bien plus que l'autre. Et qui me permet d'inspecter mon reflet sous toutes les coutures. Mais j'ai beau laisser traîner mon regard de glace sur toute la surface de mon corps, je ne vois pas ce qui cloche chez moi.

Hormis la blancheur de ma peau qui persiste malgré cette petite décennie à vivre sous les tropiques.

Détournant le regard de mon reflet avare en réponses, j'enfile le tee-shirt de mon frère et le jogging qui me servent de pyjama. J'étouffe un bâillement agacé en sortant de la salle de bain - être fatigué après un combat de ce genre n'est pas mon genre. Quoique je me suis bien purgé comme il faut ensuite.

Maxime, accoudée sur notre bar multi-fonctions, relève le nez de son téléphone à mon approche.

- Bah alors, t'en as mis du temps ! Presque quatre heures ! La bestiole était puissante à ce point ?

Je hausse les épaules.

- Pas tant que ça. Isas et Gordon se seraient débrouillés sans moi s'ils connaissaient le principe d'organisation. J'ai passé plus de temps à faire le trajet qu'à me battre.

Et j'ai la sainte horreur d'une telle situation.

- Alors pourquoi tu as mis autant de temps à revenir ?

- J'ai fait un détour par le centre d'entraînement. J'avais... une frustration à évacuer.

Ma sœur hausse un sourcil, pas dupe pour deux sous. À sa décharge, même si je n'ai jamais dévoilé l'intensité de ma relation avec mon Feu, je ne suis pas particulièrement discret. Presque toute notre communauté connaît mon côté... volcanique. C'est pour cela que l'on m'a permis d'accéder au centre d'entraînement d'Ayoub - en principe réservé aux Novices et non aux Prouvés comme moi - quand je le souhaitais, histoire de réaliser une catharsis.

Action nécessaire chaque fois que j'utilise d'autres éléments que mon Feu.

Mais si Maxime sait que je ne dis pas toute la vérité, elle ne cherche pas pour autant à me tirer les vers du nez, aussi passé-je une main dans ses longs cheveux en guise de remerciement. C'est dingue comme elle adore quand on les lui touche, on croirait voir notre frère.

Je toussote pour dissiper la peine qui m'enserre la gorge à cette pensée et vais m'affaler dans le canapé. Violet et une série m'attendent dans la chambre, je le sais, mais j'ai besoin d'une sieste. Et je préfère aller sur le canapé. À coup sûr, ma copine patiente en révisant ; je n'ai pas envie de la déranger.

Le sommeil me tend les bras, mes yeux se ferment sans me demander mon avis.

Avant de se rouvrir quelques instants plus tard. Et pour cause : mon portable crache les paroles de L'internationale dans le fond de ma poche. Il semblerait que j'ai oublié de désactiver le son avant d'entamer ma sieste. Fait chier. Mes yeux me brûlent, mes paupières et mes membres se font lourds, mes neurones peinent à réagir. D'après mon téléphone, j'ai en fait dormi une heure et demie ; j'aurais tout aussi bien pu faire une sieste de cinq secondes.

L'infâme musique réservée à Montgomery continue d'envahir la pièce. Et d'agresser mes oreilles. Pourquoi est-ce que je garde cette fichue sonnerie ? Je fais craquer mes doigts et prends la communication juste avant qu'elle ne soit rejetée.

- Quoi ?!

- Je vous veux, ta sœur et toi, dans une demi-heure à la Rivière bleue.

Et moi, je veux lui dire d'aller se faire voir. Mais l'absence de sa fameuse blague sur le fait que je suis aussi chaleureux qu'une porte de prison m'en dissuade. Je me contente donc de répéter ses instructions pour m'assurer d'avoir tout compris, avant de vérifier :