" L'appartement d'en face brûlait "

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Dehors, le soleil brille. Les oiseaux chantent, ils me narguent, moi qui, avachie sur la chaise de ma chambre, révise mon cours d'histoire. Je regarde l'heure: dix heures et quart. Je me lève de ma chaise et apporte mes affaires à l'entrée de chez moi. Dans 15 minutes - si elle n'est pas en retard-, ma meilleure amie Emma devrait passer me prendre pour m'amener à la piscine municipale! Je passerai ensuite la nuit chez elle avant de rentrer chez moi, vers 13h, demain après midi. 

Je sentis doucement se fermer mes pauvres yeux, larmoyants à cause du manque de sommeil. Après mon affreux cauchemar, je n'étais pas parvenue à me rendormir, et croyez moi, ma leçon d'histoire ne m'aidait pas vraiment à supporter cette affreuse fatigue : " Charlemagne,  747-81, fut envoyé sur l'île de St Hélène..."

 Mon téléphone sonna alors, me sortant de ma torpeur, et la voix d'Emma retentit :
- Allô, Élise ?
- Salut Emma, comment vas-tu ?
- Ça va, ça va. C'était pour te prévenir : je suis là dans 5 minutes. A tout de suite !
J'entends un crissement de pneus suivi d'un « Maman ! » exaspéré. Je me demande parfois comment Line -la mère d'Emma - a bien pu avoir son permis...Je raccroche et descends les escaliers, après avoir embrassé mes parents.
- Bonjour, Élise ! me dit Line lorsque j'arrive à la voiture.
- Salut!
Je rentre dans la voiture et m'exclame :
- Hello Jean-Jacques !
- Salut, Jean-Baptiste !
Mes amies et moi nous surnommons en effet les Jean : il y a aussi Jean-Claude, Jean-Hubert, Jean-Marc, Jean-Michel, Jean-Pierre et Jean-Patrick.
La voiture démarre, non sans manquer de rentrer dans le mur, et nous partons.
À la piscine, nous nous sommes bien amusées : nous avons joué au concours de la plus grosse bombe, nous avons fait la course, nous nous sommes poussées dans l'eau... Bref, nous avons bien ri. J'étais loin de me douter de ce qui allait bientôt nous arriver...

                                ...

Après la piscine, lorsque nous sommes arrivées chez Emma, nous avons rangé mes affaires et nous nous sommes promenées dans le jardin de sa petite maison, sous la pluie...et le regard exaspéré des voisins qui nous pensaient sûrement folles, même si je dois avouer que nous l'étions un peu. Nous sommes ensuite rentrées, nous sommes lavées et avons joué à la switch avec le père d'Emma. Je l'aime bien, son père, il est franchement sympa. Il travaille dans un restaurant, même si nous savons tous que son rêve serait de devenir chanteur. Il dit qu'il en a assez des cuisiniers jamais présents qui servent des repas froids.

A l'heure qu'il est, je suis sur mon matelas, dans la chambre d'Emma. Elle me raconte sa dernière dispute avec Samir, son grand-frère de vingt ans. J'avoue que je ne l'écoute pas vraiment. Enfin, disons que j'avais écouté les dix premières fois où elle me racontait son histoire. Lorsqu'elle eut enfin fini, j'ai fait la remarque qu'il était minuit passé et nous nous sommes endormies profondément.

C'est l'odeur qui m'a réveillée. Une odeur de cramé. Puis un boum. Retentissant. Effrayant.
Croyant qu'il provenait d'Emma, je jetais un œil vers elle pour voir ce qu'elle fabriquait à une heure pareille. Mais elle dormait. Croyant que le bruit provenait de mon imagination, je me recouchai.

Nouveau boum. Il venait de dehors. Je pris peur. Je me suis levée rapidement, réveillant Emma qui me suivit en grommelant. Ses parents arrivèrent  alors en tout hâte, et nous demandèrent si tout allait bien, car ils pensaient que le bruit venait de la chambre. C'est alors que les premiers cris ont retentit.
Nous ouvrîmes rapidement la fenêtre. C'est là que nous les avons vues. Rouges,bouillonnantes, resplendissantes. Des flammes. Sous la pluie. L'appartement d'en face brûlait. 

Esprits de la nature, Tome 1 : Les Flammes noires ( EN PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant