Train 5453 (infernal)

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<< Fume avant que la vie te fume >>

<< Tu verras Alice ça va te détendre>>

Mais bien sûr.

Mes poumons expirent tout juste la nicotine et pourtant le stress que je ressens est le même.

Merci Maxence pour tes judicieux conseils...

Assise sur un banc, clope à la main et valise à mes côtés j'observe le quai bondé.

D'autres étudiants comme moi qui discutent, des couples, et des aïeuls accompagnés d'un ou plusieurs petits enfants.

J'en avais presque oublié que c'était le début des vacances scolaires de la zone B.
Comprenant Nantes et Marseille.

Je pensais à mon meilleur ami, qui m'avait amené jusqu'à la gare en voiture.

Il m'avait accompagné jusqu'au quai mais vu que le train avait 15min de retard, il était reparti au taff et m'avait passé son paquet de Marlboro.

Le ciel est bleu et découvert, bien trop d'ailleurs pour faire une journée entière de train.

La mélodie de la SNCF résonne et la voix charmeuse de la boîte vocale annonce alors après ma dernière bouffée de fumée :

- Le train numéro 5453 à direction de Lyon Perrache va arriver en gare voie 2. Éloignez-vous de la bordure du quai.

Fabuleux.

Moi qui espérait loupé le TGV, c'est raté.

J'entortille nerveusement une mèche de mes cheveux blonds autour de mon index puis remonte mon haut beige sur mon épaule.

En plus j'ai mis le seul t-shirt trop grand pour moi...

Le boulet quoi.

Lorsque j'aperçois la tête du train 5453, je me lève et revérifier une dernière fois que je n'ai rien oublié :

Épaule -> couverte
°Lacets des bottes noires -> faits
•Braguette du pantalon noir -> zippée
°Valise -> à la main
•Sac -> à dos

Tout était prêt et là, maintenant il ne me restait plus qu'à monter.

Je m'avance vers la porte du train où une foule de gens s'est déjà amoncelé.

Des personnes descendent, certains tristes de rentrer, d'autres heureux d'être sortis de cette enfer qu'est le train.

Je comprends déjà la deuxième partie et je les envie.

Vous l'aurez compris je hais le train.

Je m'appelle Alice, j'ai 19 ans. Je suis en pleine étude de psychologie dans Nantes et j'ai horreur du train.

Tout le monde a ses peurs.

Moi c'est les longs trajets dans les transports en commun.

Être assise pendant 6h à côté d'un inconnu généralement envahissant ou ronflant :
Très peu pour moi.

Mais aujourd'hui je n'avais pas le choix, vu où je devais me rendre le TGV était ma seule alternative.

Nantes-Lyon

Puis changement et Lyon-Aix.

J'entends une vieille mégère rouspéter derrière moi, et m'engouffre alors dans la bête métallique infernale.

***

-Place 216... 216, je marmonne tout en cherchant ma place à l'étage.

Heureusement que j'avais trouvé un endroit où ranger ma valise à l'entrée de la voiture, car il n'y a plus aucune place ailleurs.
Après 5 petites minutes de recherche, je m'assois place 216.

Côté couloir bien-sûr.

La boîte vocale automatique de la SNCF annonce le départ de notre TGV, et en réponse ce dernier démarre. Je sens mon corps reculer et vois le paysage défiler.

Et dans le sens inverse de la marche.

Génial.

Une vieille dame est assise à côté de moi et lis.
Elle fait de gros yeux apparemment surprise de ce qu'elle découvre au fur et à mesure de sa lecture. Comme si elle découvrait peu à peu les personnages et se retrouvait ainsi totalement immergée.
Je me penche pour voir l'ouvrage et souris quand je m'aperçois qu'il s'agit des Misérables de Victor Hugo.

Un classique. Je suis limite déçu qu'elle ne l'ai pas lu avant.

Je soupire et sors mon portable ainsi que mes écouteurs, la musique et la lecture étant mes seuls alliés dans cet enfer.
Je lance ma playlist en mode aléatoire et j'ai un rictus amusé dès que je lis le titre du morceau ;

Paradise Circus -Massive Attack

Que d'ironie.

La grand-mère à mes côtés pousse une seconde exclamation de surprise, le train quitte la ville, mes yeux se ferment et je me dis intérieurement que le trajet va être très long...

Une histoire de voyage Où les histoires vivent. Découvrez maintenant