La Seconde Option: Les Ombres de l'Empire

Chapitre quatrième: La foi

On disait de la côte herse qu'elle était l'une des plus inhospitalières au monde. La vie y était difficile. Et cela, on ne le devait pas à des températures extrêmes ou des créatures sanguinaires, mais à d'importantes variations de niveau.  L'Homme n'avait jamais réellement réussi à s'y établir sur le long terme. Il n'y avait pas la place pour cultiver quoique ce soit, et trop peu d'animaux pour chasser. D'un côté, il y avait de l'eau à perte de vue, et de l'autre, une falaise gigantesque. Ce relief hasardeux rendait les accès en bord de mer quasiment impraticables, rendant la pêche difficile. Cette géographie chaotique s'établissait tout particulièrement à l'Est, au bord du grand Golfe Hersique. Cette côte formait un véritable couloir qui s'étendait sur plusieurs centaines de kilomètres...

  C'était en ce lieu vide de faune et plein de flore qu'on abandonnait souvent les hommes faibles et les criminels. Pour survivre dans cet enfer formé de roc et d'eau, plusieurs clans se formaient, s'entraidaient puis s'entretuaient. Là-bas, personne ne pouvait se vanter d'avoir le luxe d'une amitié solide, car tout ce qui s'en rapprochait finissait en tuerie générale. Tout le monde était l'ennemi de tout le monde. Cela fut le cas des siècles durant...

  Pourtant, un jour, une lueur apparut et réconcilia ces âmes en proie à la douleur et la haine. C'était une intervention divine que nul ne pouvait expliquer autrement. Ensemble, ils devinrent un seul et puissant clan que nul n'osait défier. Une véritable forteresse fut bâtie. Une forteresse qui devint assez attractive pour se transformer en une grandiose cité bien des siècles plus tard. On bâtit alors en son sein un gigantesque Temple, en l'honneur du dieu qui avait uni ces hommes : Thyseos. On raconte qu'ensuite, il intervenait dans chacune des guerres auxquelles ils étaient mêlés pour façonner une paix éternelle entre les Hommes.

  On disait que quiconque avait déjà vu la cité de Mynos par le passé n'en n'était jamais revenu. Cela, on ne le devait pas à la cruauté des Hommes la peuplant mais à la beauté exceptionnelle de ses lieux. L'eau du port était bleue claire. On en voyait la profondeur en tout lieu. Cette propriété ne s'étendait malheureusement pas partout dans le Golfe Hersique, dont personne n'aurait su en estimer la profondeur. Personne n'osait, à vrai dire.

  La cité en elle-même était ornée de nombreux temples circulaires de toute taille, tant qu'elle était inférieure à celle de l'énorme Temple de Thyseos, qu'on retrouvait contre l'immense falaise qui se dressait face à la ville, et qui semblait jadis l'oppresser.

  Aujourd'hui, ce n'était plus la falaise qui oppressait Mynos, mais Mynos qui oppressait la falaise. Le Temple creusait dans la falaise, à plusieurs mètres de profondeur. Il paraissait plus grand encore que la cité à l'intérieur.

  De nombreuses maisons fonctionnaient sur le même principe : creusées dans la roche, étirant leurs ouvertures variablement, sur toutes les hauteurs ; elles constituaient un véritable réseau qui permettait de remonter la falaise. Falaise sur laquelle trônait une immense statue de Thyseos, un peu plus au Nord, de manière à ce que quiconque puisse la voir depuis tout endroit de la cité.

  Cette statue avait été érigée là où était née la légende de Thyseos, le dieu unificateur. Sur un champ de bataille atroce, qui attentat à la vie de près de 100 000 hommes, 400 ans plus tôt.

  C'était ce lieu aux mille charmes qui avait jadis conquis le cœur d'un jeune aristocrate ferdanais : Jules de Clairon. Parti en quête d'une vie meilleure, c'est dans ce petit bijou de l'Empire Hersheth que la sienne avait réellement commencé. Il racontait toujours que lorsqu'il avait vu l'immense statue de Thyseos pour la première fois, depuis un petit bateau sur le Golfe, il avait immédiatement réalisé que son rôle était à Mynos, aux côtés de l'Unificateur. Sa vie précédant sa rencontre avec ces terres n'avait aucune valeur. Il s'était dépossédé de toutes ses richesses pour vivre comme son idole. Désormais, il n'aspirait plus qu'à une chose : répandre la paix de Thyseos dans le monde entier.