18 - Voyage en speed-O

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Le speed-o-matic, surnommé speed-o, est l'un des rares véhicules individuels autorisés à se déplacer dans les espaces publics d'Hélios. Peu de personnes sont habilitées à conduire ces bolides à propulsion ionique ; encore moins peuvent se vanter d'en avoir la totale maîtrise. La loi élaborée par l'Union, l'Ordre et la Vérité est formelle au sujet de la délivrance des permis de conduire. Seules les forces armées d'Hélios et les unités civiles d'urgence peuvent prétendre à son obtention, après passage d'un examen médical strict et d'une épreuve pratique exigeante.

« Speed-o, l'indétrônable glisseur », holorevue Turbine, juin 1050 H.

Le duo quitta le médicentre et s'aventura dans la zone sinistrée dans l'optique de retrouver la mère de Killian White, dans son appartement, ou au temple des paladins. Hannah n'avait jamais eu l'occasion de rentrer dans un temple, ces lieux fermés où s'entraînaient les soldats les plus redoutables d'Hélios dans le secret le plus total. Cette escapade, évidemment, ne convenait pas à la doctoresse. Elle aurait préféré fuir ces lieux déserts plutôt que de s'y enfoncer toujours plus profondément.

Ils traversèrent une série de corridors glacials et sombres, de sas grands ouverts, empruntèrent passerelles, rampes et escaliers, pour finalement atteindre sans encombre l'aile Q1-P25. Cette partie de l'édifice, isolée du reste de la station par un rempart de cinq mètres d'épaisseur, affichait un décor tout à fait singulier. On y accédait par l'intermédiaire d'un tunnel de béton brut dépourvu d'éclairage et protégé par une lourde porte blindée.

Killian dut se soumettre au scanner biométrique pour ouvrir le passage vers l'enceinte sécurisée. L'autorisation accordée, il pénétra dans la morne allée d'un pas pressé. Hannah le suivit à contrecœur en traînant la patte, regardant sans cesse par-dessus son épaule dans l'espoir de déceler une présence amicale qui jamais ne se manifestait. Traverser ce réduit obscur et insonorisé derrière cet homme qu'elle ne connaissait que depuis quelques heures la terrorisait.

Le tunnel débouchait sur un couloir interminable aux dalles luisantes et aux murs nervurés, à travers lesquels circulait un fluide phosphorescent à la fonction indéterminée. Des portes hexagonales surmontées d'un numéro à quatre chiffres se faisaient face tous les dix à vingt mètres. Il émanait de ce lieu une atmosphère presque mystique. Des bouches d'air conditionné sortait un souffle léger, contrastant avec le tumulte habituel de la ventilation. Des ordinateurs encastrés çà et là émettaient des sons d'origines diverses ; une machine aux allures primitives crachait une bande imprimée pour la réabsorber un peu plus bas, produisant des cliquetis saccadés au rythme de l'impression. Un autre instrument étrange composé de tubes électroniques, de diodes et de composants aux formes insolites avait entamé un monologue de bips et de sifflements sur trois octaves.

Une console à l'écran inclinable attira l'attention du policier à la mine impassible, lequel s'y précipita pour tester son fonctionnement. À son approche, un petit moteur orienta l'écran à quarante-cinq degrés, signe que le terminal sortait de sa veille. Hannah reconnut immédiatement l'interface rudimentaire caractéristique du réseau Orb, avec son fond noir et ses caractères verts pétants. Le programme présentait cependant quelques différences avec son homologue civil, comme l'implémentation d'une roulette mécanique pour faire défiler les commandes, ou la présence d'un scanner biométrique. Dernière particularité et non des moindres, le sigle « Accès restreint OrbNet » remplaçait l'habituel « Délivré par OrbNet » situé au bas de l'afficheur.

Killian composa les numéros « 1822 » sur le terminal. Le nom « Patricia Mayer » s'afficha. Il valida et l'écran reprit sa position initiale.

— Le speed-o-matic ne devrait pas tarder. Asseyez-vous sur ce banc en attendant, indiqua-t-il sèchement.

Après un moment d'hésitation, elle décida de rompre le silence :

Le cycle d'Hélios : I. Routine Epsilon [Autoédité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant