« Moins il demeurera de l'un ou de l'autre, plus il restera de nous.» - Marc Lévy.
Après un an de relation, Elana et moi emménagions ensemble dans un modeste appartement au cœur du 14e arrondissement. Le deux pièces se situait au-dessus du Gaumont et des quelques restaurants de la grande place.
Bien qu'en stage, mon accréditation au centre de recherche de son père me permettait de subvenir à une grande partie de nos charges. Pour le reste, les parents d'Elana donnaient à leur fille tout ce dont elle avait besoin. Comme toujours.
Une fois seuls dans ces grandes pièces vides, le silence de nos cœurs résonnait. On ne réalisait pas. Nous nous regardions incrédules, le sourire aux lèvres. On possédait enfin un chez nous ! Notre vie d'adulte pouvait commencer. On espérait passer plus de temps ensemble et que nos disputes s'arrêtent.
Nous ne disposions pas de grand chose. Une gazinière, un matelas et un petit frigo, mais c'était déjà assez. Car nous étions ensemble. Et puis il y avait Maurice... Notre rat. Elana était parvenue, après maintes négociations avec son paternel, à l'adopter. Elle obtenait tout ce qu'elle voulait de lui de toutes manières. A chaque fois.
— Fais-moi danser, m'avait alors demandé Elana, pleine d'enthousiasme.
Elle semblait heureuse. Trop heureuse. Son bonheur dépendait de moi, de nous, mais elle s'oubliait.
Elana s'était empressée d'allumer son enceinte pour jouer cette fameuse chanson sur laquelle nous nous étions rencontrés.
Hundred Miles.
Maladroitement, je l'avais faite tourner. Elle manquait de trébucher, mais je la rattrapais de justesse pour la faire basculer en arrière en mimant un danseur de tango. Comme à chaque fois que mes yeux rencontraient les siens, le temps s'arrêtait. Mon regard se portait sur ses lèvres humides et ses yeux qui me dévoraient.
Je ne pouvais y résister bien longtemps, appelé par son énergie de fusionner avec la mienne pour devenir complet. Unis.
Nos corps ruisselaient de bonheur et nos âmes exaltaient comme à chaque fois que nous faisions l'amour. En fusion. Plus qu'un corps.
Dans ces moments, je pouvais croire à tout ce qu'elle me racontait sur les âmes sœurs, jumelles, les enfants indigos et les vies antérieures.
TOUT. Tant notre lien était puissant.
Puis, une fois que le plaisir jaillissait de nos pores, nous nous laissions retomber, épuisés, haletants sans se lâcher du regard, main dans la main.
Je me rappelle l'avoir contemplée ce jour-là, tandis qu'elle s'endormait dans mes bras et que sa respiration ralentissait. La lumière de la fin de journée s'accrochait à nos carreaux pour les transpercer et verser des rayons jaunes qui sublimaient sa peau et ses cheveux à la perfection.
L'heure dorée.
J'ai pris une photographie mentale de ce moment en me disant que je voudrais figer le temps, le mettre sur pause pour avoir une trêve dans notre prose. Je n'aurais jamais ma dose de cette fille, de sa beauté, sa candeur. Sa poésie d'être elle-même. C'était un amour complet, total, anormal.
— On se rejoint dans nos rêves... Tu ne m'abandonnes plus maintenant qu'on habite ensemble, hein, mon Du chat ? soupira-t-elle avant de rejoindre le monde de morphée.
— Je ne t'ai jamais abandonnée, et je ne le ferai jamais, murmurai-je en l'embrassant, tout en songeant que je devrais la porter vers le matelas pour éviter de dormir à même le sol.
Ce même sol où elle a laissé son dernier soupir un soir d'hiver.
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Essence Indigo - Sarah JOAN ©
Mystery / ThrillerEt si l'amour et la vérité valaient la peine d'être sauvés, jusqu'où iriez-vous ? Nathaniel part voyager en Nouvelle-Zélande suite à la mort d'Elana, son ex-petite amie, dont il a été accusé. Bien qu'à l'autre bout du monde, les eaux troubles du pa...