Arrivés à la caserne, sans surprise, Samirna confirme mes craintes : je n'ai plus accès aux bains. Merde. Le temps de la traversée du palais, on a reçu la réponse de Shumu, il dîne avec nous ce soir. Ça promet d'être animé. Je ne me sens pas à mon avantage, du tout. Si seulement je pouvais me rincer, enlever la poussière, me rafraîchir un peu... En allant à ma chambre pour me changer, je passe devant la fontaine... Au grand maux, les grands moyens. J'ai besoin de me laver.
– Muba, ferme les accès à la cour s'il te plaît.
Il obéit, sans poser de questions, c'est le côté vraiment cool de mon bodyguard. Bon il n'en est pas moins ahuri quand je commence à me déshabiller, et à m'immerger dans la fontaine. Je me délecte de la fraîcheur de l'eau. Après cette longue marche pour rentrer ça me fait un bien fou.
Un grognement perturbe mes ablutions :
– Hummm...
Je lui réponds avec un sourire espiègle, j'ai l'impression de revivre.
– Quoi ? Ça ne se fait pas ? Pas le bon usage d'une fontaine ? Tant pis...
– Surprenante, il n'a pas tort.
Je me redresse, soudain très intéressée.
– Qui ? Nabuchodonosor ? Il a dit quoi d'autre ?
Il prend le temps de la réflexion, tapotant son menton avant de me répondre :
– Que la journée avait été vraiment chaude pour la saison, que malgré tout on avait été productif. Et de rajouter avec un petit sourire sardonique. Ah, et qu'il serait content de se rendre aux thermes ;
Arg, je l'étranglerais volontiers, ce n'est pas ses bijoux de famille qu'il fallait lui couper mais sa langue ! Je me plonge la tête dans la fontaine pour ne plus l'entendre. Je ne lui donnerais pas la satisfaction de quémander des infos supplémentaires.
Rafraîchie, rhabillée, fin prête, je pars à la recherche de mon père. Je ne l'ai vu aujourd'hui, ça me manque. Privée de sa présence depuis si longtemps, pas moyen que je laisse passer une journée sans profiter de sa compagnie.
Je le retrouve en grande discussion avec d'autres gardes. Dès qu'il me voit, il comprend, s'excuse auprès d'eux et vient me rejoindre dans la cour.
Seuls, les mots sortent naturellement de ma bouche :
– Oh, je suis tellement gênée pour hier soir... Cette civilisation est tellement différente de la nôtre, je ne me reconnais pas.
– Il n'y a pas de quoi. Je te croyais la plus ouverte de mes filles ?
Je pique un fard, il ne peut pas comprendre tous les sens que j'entends au mot ouverte.
– Je ne te juges pas, comme moi tu découvres, tu t'adaptes et fait ce qui doit être fait.
J'ai envie de m'auto-flageller :
– Mais quand même... J'avoue, je fais un peu petite fille boudeuse. Me laisser faire par un alors que je dois en épouser un autre c'est pas dans mes habitudes.
– Ah bon ? Plus jeune ta mère t'appelait cœur d'artichaut. Moi je préférais te voir comme un papillon.
Oh ! Je suis outrée, comment ose t-il ?
– Quinze ans d'absolue fidélité tu oses appeler ça du papillonnage ?
– Si tu fais abstraction de lui. Avant ?
Je refais défiler mon adolescence jusqu'au début de notre histoire, en accéléré. Il marque le point. Mais depuis, même s'il m'arrive de regarder le menu je n'ai jamais eu envie de passer à table.
VOUS LISEZ
La marque d'Ishtar
RomanceUne histoire de voyage temporel dans la mythique cité de Babylone. Suivez les déboires d'une héroïne entre choc des cultures, trahison et triangle amoureux.