Prologue

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Nigéria, Eleko

La saison pluvieuse débuta en ce jour par une forte journée de pluie. Le vent glacial de la soirée n'épargnait personne. La dame et sa fille qui sillonnaient les ruelles d'Eleko en étaient des victimes.

Le froid contractait leurs muscles et rendait la marche difficile. Pourtant elles ne s'étaient pas arrêtées une seule fois depuis trente minutes. La dame était absorbée par son objectif principal : arriver à destination.

Les lampadaires devenaient de moins en moins fréquents tout comme les passants. La jeune dame ne se sentait pas en sécurité. Néanmoins, elle apercevait déjà les bords de l'océan Atlantique.

Pour aller plus vite, elle agrippa le corps frêle de son enfant à son dos, garda fermement son sac sous son bras et pressa les pas. Lorsqu'elles atteignirent enfin la plage une poussée d'espoir raviva la dame.

Près de l'océan, la brise était encore plus enragée. Elle fut parcourue d'un frisson et sa fille trembla légèrement. Quand elle voulue saisir un pagne dans son sac elle vit un homme lui faire un signe de main.

«_Madame ! Madame ! C'est moi Ebu. Dès qu'elle entendit la voix familière de l'homme qui accourait dans sa direction elle soupira de soulagement.

_Êtes-vous prêtes ? Il demanda plus proche

_Bien-sûr. Quant est-ce qu'on prend le départ ?

_Dans quinze minutes environ. Venez, je vous accompagne. » La dame suivit l'homme dénommé Ebu qu'elle avait rencontré il y a un mois maintenant.

En réalité, cet homme avait été le seul qui lui ait tendu la main depuis trois années de souffrance. Il lui avait permis de trouver une clé de sortit de sa prison : son foyer.

Mariée à un homme d'affaire depuis dix ans qui a sombré dans l'alcool, elle et son enfant se faisaient battre sauvagement pour un rien.

Désespérée, elle s'empara de la seule solution qui lui avait été offerte : l'immigration clandestine. Ebu lui avait expliqué que là-bas, au pays de la liberté, la vie était plus aisée.

En plus le coût de son déplacement n'atteignait même pas le quart de ce qu'elle aurait à payer en prenant un avion.

Vu aussi qu'elle n'avait ni le temps d'attendre deux visas qui lui auraient été probablement refusés ni les moyens de s'octroyer deux billets d'avions, elle préféra la solution la plus rapide.

Il faisait sombre, mais la dame distinguait le bateau qui les embarquerait. Elle le trouvait assez étroit pour le nombre de personnes présentes.

Elle pensait à la manière dont ils allaient évoluer avec tant de poids et à comment se trouver une petite place dans l'arche qui leur permettrait de s'échapper.

Plus d'une vingtaine de minutes passèrent, le pilot s'annonça et tout le monde se faufila dans le bateau qui démarra ensuite.

La dame s'était réfugiée à l'arrière, elle avait trouvé une grande caisse vide en bois assez solide qui avait la forme d'un cube où elle put s'assoir.

L'embarcation à moteur naviguait à une vitesse modérée mais le malaise la gagnait peu à peu. Sa petite fille s'était endormie dans ses bras.

En l'observant tendrement, elle avait du mal à comprendre d'où venait tout le courage qu'une fillette comme elle avait de ne pas faiblir face à son frappeur de père.

Milles fois elle l'avait maudit de s'en prendre à un tel ange sans défense et maintes fois elle s'en était voulu de ne pas être présente à chaque fois qu'il la tabassait après quatre verres. Un vrai sadique.

Heureusement, elle s'était assurée de bien se débarrasser de lui. Il ne serait bientôt plus qu'un passé douloureux.

Quelques jours défilèrent tandis que le bateau continuait d'avancer. À l'horizon, il n'y avait pas l'ombre d'une terre, que de l'eau.

La jeune dame et son enfant avaient survécu grâces à ses réserves de nourritures qu'elle avait à contre cœur partager avec certains passagers qui mouraient littéralement de faim.

La peur que la jeune dame avait réprimée n'était restée que minime, mais depuis qu'elle avait remarqué des passagers morts se faisant jeter par-dessus le bord, cette peur s'était décuplée.

Le pilote avait affirmé qu'il ne restait pratiquement qu'une demi-journée avant d'atteindre les côtes américaines.

La fraicheur enveloppait sa fille qui grelotait régulièrement les nuits, elle l'avait même entendu toussée. Lorsqu'elle lui demandait si quelque chose n'allait pas elle répondait toujours négativement, à croire qu'elle ne voulait aucunement l'inquiéter.

La jeune maman s'arrangeait quand même pour la couvrir chaudement, une grippe serait dangereuse.

La nuit était tombée depuis un moment et une rafale dégainait toute sa fureur sans pitié. Le gri camouflait les étoiles.

Tout le monde craignait la pluie qui semblait proche. Et il y avait de quoi, car le toit de l'embarcation était non seulement troué mais dans un piteux état.

Il n'y avait pas de murs en bois. Seule la pièce du pilote avait une séparation et une porte en bois, tout le reste n'avait qu'une balustrade.

Par contre le ciel n'avait que faire des désirs de pauvres passagers clandestins. Très vite le tonnerre s'était mis à gronder, les éclairs illuminèrent le ciel et firent trembler les immigrants, un orage les menaçaient.

L'océan s'agitait majestueusement avec fougue et véhémence faisant tanguer le bateau dans tous les sens. On aurait cru qu'il avait une rancœur refoulée qu'il déversait sur eux.

Ces agitations mirent en panique les voyageurs qui s'affolèrent. La jeune maman tentait futilement de calmer son enfant en larme ainsi que des voyageurs terrifiés.

«_Ma chérie, écoute-moi... Murmura-t-elle à son enfant qu'elle serrait dans ses bras.

_Maman, j'ai peur. Elle lâcha affaiblit.

_De quoi ? Je suis là, on va s'en sortir comme toujours. Ce n'est qu'une petite pluie, une petite pluie. Elle le disait comme pour s'en convaincre elle-même. Les doigts de sa fille se cramponnaient à ses vêtements avec forces.

_Chérie, reprit-elle, lorsqu'on sera arrivés rappelles-toi de ce que je t'ai demandé, tu ne dois jamais l'oublier. Tu me le promet ?

_Oui, maman. »

Le pilote de son coté, avait aussi beaucoup de mal à maintenir son arche. Il avait pressentit depuis une heure que le moteur allait s'éreinter.

Ils avaient passé plus de temps qu'il n'en fallait sur l'eau, ils devaient avoir rencontré la terre ferme depuis une journée au moins.

La dernière fois qu'il avait fait le chemin jusqu'en Amérique le moteur était jeune et efficient. À présent le bateau semblait avoir pris un coup de vieux.

De toute façon l'orage continuait de faire vaciller violemment le vieux bateau et cela le consternait plus que tout.

Mais promptement, un éclair aveuglant fit gronder le ciel entier, le conducteur pensait qu'il prendrait bientôt le dessus sur les vagues mais ces dernières lui jouèrent un sale tour, il perdit totalement le contrôle.

L'immensité des flots envahirent la barque. L'eau l'engloutit et les cris des immigrants se firent déchirant. La petite fille fit brusquement séparer des bras de sa mère.

Elle fit glacialement emprisonnée par l'eau de l'océan. Ce fut sa mère qu'elle entendit au dernier moment avant de sombrer : « OLABISI ! ».

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Salut ! Je vous remercie d'avoir pris le temps de lire ce premier chapitre de mon roman. C'est la première fois que je publie de façon officiel l'un de mes écris je vous prie donc d'être indulgent et de me notifier la moindre faute ou incohérence. MERCI :)  

ÂCREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant