Midnight Rain

Chapitre 5

On m'a toujours dit qu'une relation toxique allait dans les deux sens. Ce que j'en pense : bien souvent, une personne est toxique pour le couple fait apparaitre le pire chez l'autre. Eugène a été le dealer de notre couple et moi la droguée. La première déception est la pire. On pense ne jamais pouvoir s'en remettre. On se croit faible alors que nous sommes plus forte. Physiquement et mentalement, nous sommes plus forte que les hommes. On encaisse la douleur sans jamais le montrer au détriment de notre santé mentale.

On encaisse encore et encore.

Et, le jour où ça explose ce n'est pas beau à voir.

Après moi, il y en a eu une autre, puis une autre, bref vous aurez compris. C'était un joueur et nous étions des pions.

J'ai beaucoup pleuré. Ma famille et mes amis ne me reconnaissaient plus. J'ai bousillé ma vie sociale pour un garçon alors que je m'étais promis de ne jamais le faire.

Il jouait et il s'y prenait bien. Pourtant sa réputation était faite mais toujours plus de mouches tombaient dans ses filets.

Il a été le premier, Mattia, cet italien en Erasmus a été le second et a fait passer Eugène pour un joueur de seconde zone. Cette deuxième fois j'ai laissé une partie de moi mais cette histoire est pour plus tard.

C'est en quittant Eugène et en me morfondant dans le noir que j'ai découvert Taylor Swift car sa chanson Blank Space correspondait bien à son comportement.

Le soir même j'étais dans un bar où les néons roses donnaient le ton de l'ambiance. Le mur floral dans mon dos apportait une touche de verdure dans ce lieu trop urbanisé et peuplé. Les gens hurlaient et riaient à gorge déployé. J'avais quitté la vie étudiante depuis un moment maintenant et ce genre de comportement commençait à m'insupporter alors que cela faisait à peine un quart d'heure que j'étais là à patienter tranquillement et à vérifier toutes les minutes les notifications de mon téléphone.

Après le départ d'Hugo j'avais répondu à sa story. Je n'ai même pas attendu sa réponse puisqu'elle est venue instantanément. Je lui proposais de se revoir autour d'un verre et il m'a indiqué l'adresse où je me trouve en ce moment.

La température du bar était humide et j'avais remonté mes cheveux en un chignon lâche pour pouvoir exposer ma nuque à la fraîcheur. La sueur coulait le long de mon dos. Je vais être obligée de reprendre une douche. Ma franche collait mon front et commençait à légèrement friser.

- Avec la couleur unique de tes cheveux tu es repérable de partout, c'est plutôt bien pour te chercher.

Je lève la tête et remarque Eugène en face de moi. Il s'est changé et porte désormais un simple tee-shirt et un jean. Il se fonds plus facilement dans la masse étudiante que moi. Je suis trop stricte dans mon tailleur noir.

- Tu veux boire quoi ?

- Un diabolo menthe, s'il te plait.

Même dans mon choix de boisson je me différencie des étudiants qui sont posés à la table d'à côté. Je regarde leur verre et finalement me rétracte.

- En fait, non. Je vais prendre comme eux, je fais en point du menton nos voisins.

- Un mojito ?

- Parfait, je m'exclame alors que je n'aime pas ça.

Il va passer commande auprès du barman et revient pour s'assoir sur la banquette face à moi. Il pose son téléphone sur le côté et me regarde comme s'il attendait quelque chose de moi. Il est clair que je suis désormais mal à l'aise. Je n'ose pas prendre la parole alors que je rencontre des étrangers à longueur de journée. Je le connais, on a été intime mais bizarrement, après tant d'années de déception, je ne sais pas par où commencer.