Cela faisait maintenant plus d'une semaine qu'on ne l'avait pas revue, sans même savoir si elle était toujours vivante, l'ambiance était froide et suffocante, on ne se regardait presque plus, son prénom n'était plus employé sous peine de provoquer une crise de panique ou quelques larmes.
Le grésillement et la voix qui annonçaient les horaires avaient été remplacés par un « DRIIIIIINNNNGGG » tout autant insupportable, il prouvait juste que nous nous étions habitués au système, de bon petits cobayes bien tranquilles, même pas besoin de leur dire quoi faire, un petit bruit et ils réagissent au doigt et à l'œil.
Cette alarme annonçait l'heure du repas du soir, et sans même avoir à y penser on s'est tous levés comme un seul homme. Ça fait vraiment pitié, je me fais pitié... Mes beaux discours n'ont servi à rien, je ne peux pas me dire leader si je suis un mouton comme les autres : nous nous levâmes et nous dirigeâmes vers la porte sans un regard les uns pour les autres, quelques discussions discrètes formaient un bourdonnement en fond, ça et le cliquetis des néons, c'est tout ce qu'on entendait.
Nous avions pris l'habitude de manger tous ensemble pour mieux nous connaitre et discuter de nos vies d'avant, histoire de garder une part d'humanité, mais l'absence d'information quant à l'état de Victorine avait jeté un froid et ce soir plus que tous les autres, les clans s'étaient reformés, la grande table que nous avions créé avec toutes les tables du réfectoire serait bientôt défaite. Le repas fut pris dans un silence presque religieux, tellement silencieux que j'entendais ma conscience hurler et le sang battre dans mes oreilles.
Quand tout le monde eut fini, chacun rentra dans sa chambre dans la même ambiance morose : c'était la première fois qu'un hybride était potentiellement mort après son réveil dans la salle bleue. Je fermais la marche, et je repensais à comment on en était arrivés là quand des cris et des pleures retentirent de derrière notre porte à moitié entrouverte. J'accélérai le pas : elle était là, toujours endormie, elle avait quelques pansements sur les mains, ses joues étaient plus creusées et son teint plus pâle, mais elle était là, Victorine avait survécu.
Elle dormi toute la soirée, Ava, Amaluna et Noëlla se relayait à son chevet, attendant désespérément son réveil. Bien que nous y fussions habitués, la dernière sonnerie de la journée nous fis sursauter : comme d'habitude, la porte se déverrouilla, un plateau avait été laissé derrière avec des tubes attitrées contenant au moins un comprimé sensé nous aider à mieux tolérer les changements dans notre corps et pallier le manque de vitamine causé par nos régimes particulier, on devait prendre tous les comprimés bien en vu devant la caméra, c'étaient les consignes et personne n'avait tenté de les transgresser... Une fois cette routine finie le niveau de luminosité de la chambre baissait progressivement jusqu'à nous laisser dans le noir complet, je n'arrivais pas vraiment à dormir alors je restai là à me tourner et me retourner dans mon lit, attendant que le sommeil arrive en écoutant les respirations régulières et les bruissements de tissus qui emplissaient la pièce. Mais tout à coup une respiration s'accéléra progressivement et se rapprocha de moi, je me redressai et je sentis une main m'agripper l'épaule puis une autre chercher la prise la plus adéquate sur ma gorge : une fois satisfaite, je sentis comme de petits morceaux de métal s'enfoncer toujours plus profondément dans ma chair. Sa prise se resserrait de plus en plus et je sentis des petits filets de sang descendre le long de mon cou.
- Arrêtez, s'il vous plait implorais-je d'une voix soufflée en tentant de faire lâcher prise à mon agresseur.
Son emprise se fit plus ferme, je fus poussé violemment en arrière et sentis son corps s'asseoir sur ma cage thoracique. Tentant le tout pour le tout, je bloquai ma respiration et je laissai retomber mes bras sur le matelas. L'objectif de mon agresseur visiblement atteint, sa prise se fit moins puissante puis je fus libre de respirer à nouveau. Sa main s'appuya à droite de mon visage et son souffle vint caresser ma joue, ses mèches de cheveux retombèrent sur mon épaules, il - ou elle - semblait vouloir vérifier que j'étais bien mort. D'un coup je glissai sur le côté et tira son poignet d'un coup sec, inversant ainsi nos positions :
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Expérience réussie
Science Fiction"Réussite 100%" Peut-on vraiment se réjouir d'avoir été réussie quand on ne sait même pas pourquoi nous avons été créée ? Victorine, adolescente du XXIe siècle adepte de robe froufrouteuses malgré une enfance de dur à cuir se retrouve du jour au le...