Chapitre 2

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Rim se rinça le visage au lavabo. Il toisa son reflet dans le miroir.

Alors ... ainsi la guerre était finie ... qu'avait-elle laissé derrière elle ? La mort ! La mort, omniprésente, du plus profond de ses prunelles noires, jusqu'aux pointes de ses mèches charbonneuses ... la mort, ce visage ovale, qu'il peinait à reconnaitre, la mort, ce visage décharné aux aspect de cadavres, qui était le sien, la mort y avait marqué son empreinte au fer rouge.

Rim rasa laconiquement sa barbe naissante. Son bras gauche, emplâtré, n'aidait pas à la tâche. Une fois terminé, il saisit sa canne, et se traina sur le pont numéro deux comme un vieillard. Des tremblements secouaient son échine. Le panorama du vide spatial constellé d'étoiles, filtré par la teinte floue de la baie vitrée, lui rappela les yeux de Roxa. Au loin, scintillait une petite boule lumineuse entre les astres endormis. Xalradia ne lui manquait pas, plus il s'en tiendrait loin, mieux il se sentirait.

La flotte s'immobilisa à un interstice de l'autoroute spatiale. L'Astéroïde était le point de rendez-vous. Une minuscule corvette diplomatique faisait face à la grande armada. Elle attendait, pour négocier les termes de l'armistice confédéré, l'arrivée du Tempestor, redoutable cuirassé et bâtiment personnel du dictateur Don Pedro, le Duc Rouge. Ce dernier ne fit pas plus patienter ses interlocuteurs, et révéla sa présence au détour d'une petite lune voisine, escorté par deux frégates à missiles, dont la taille semblaient ridicule en comparaison.

Rim observait la scène depuis le pont numéro deux, les radios diffusaient en temps réel le contenu des pourparlers. L'enceinte grésilla :

-          Mes plus sincères salutations Don Pedro grand-duc rouge, ici le colonel Rocollin, durant cette séance je m'exprimerai au nom de mon gouvernement, lequel désirerait établir les conditions de sa capitulation.

Le Tempestor fit vrombir ses propulseurs, on crut entendre le tonnerre. La voix du colonel s'en retrouva étouffé. Le bâtiment sortit de l'ombre, révélant l'étendue de son gigantisme. Avec ses dix-huit kilomètres de longueurs, il surclassait tous les autres éléments de la marine républicaine. Rim colla son visage à la baie vitrée. Vu d'en dessous, le Tempestor ressemblait à une cathédrale géante, dont les immenses bouches dépassants des sabords, étaient des cavernes cracheuses de feu. Les mortiers à particules avaient par le passé maintes fois prouvé leur efficacité, à en croire son regard maléfique, Don Pedro voulait en refaire la démonstration.

On pouvait lire le sourire démoniaque de l'aristocrate à travers les vitraux pourpres du poste de commandement. A son signal, les canons du Tempestor crachèrent des geysers incandescents vers la corvette diplomatique. La matière se tordit au rythme de la danse des électrons, les fibres de la coque se retordirent selon le tempo, le bal d'une poignée de molécules, l'ultime collision de deux ions réduisit le navire à une boulette de métal maché. De dernières flammes batifolaient à sa surface ... elles s'éteignirent à mesure que la bille sombrait dans le vide intersidéral.

-          Quelle horreur ! scanda un sergent sur le pont numéro deux.

-          Ces chiens le méritaient ! contesta un adjudant

-          Ils étaient en mission diplomatique ! la guerre se fait dans le cadre de traités à ne pas enfreindre !

-          Quels traités ont-ils respectés en abattant mon frère à coup de balles chimiques ?! gronda un caporal au visage à moitié brulé.

Le capitaine Deto fit revenir le calme. Rim, toujours scotché à la baie vitrée, confronta le regard ivre de joie de Don Pedro. Le spectacle ne s'arrêtait pas là. Les deux frégates lances missiles se déportèrent pour encadrer l'énorme astéroïde. Elles s'amarrèrent à lui via de mégas aimants, puis le continrent à une trajectoire, qui, sans surprise, visait Xalradia. Une fois la vitesse de pointe atteinte, on désactiva les aimants et les frégates se détachèrent. Le point brillant disparut à l'horizon, Xalradia n'était plus ...

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