la princesse et le peintre

133 11 24
                                    

Un soupir peiné remonte dans sa gorge, s'étale sur ses cordes vocales comme pour l'empêcher de prononcer le moindre mot

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

Un soupir peiné remonte dans sa gorge, s'étale sur ses cordes vocales comme pour l'empêcher de prononcer le moindre mot. Elle sait que derrière la porte en chêne, il y a celui dont elle attendait l'arrivée. Quelqu'un pour calmer son esprit perturbé, quelqu'un qui effacerait, sans même s'en rendre compte, les traces brillantes qui auraient glissé sur ses joues.

Quelqu'un dont la présence même aurait fait mourir les nuages de ses peurs.

Reprenant contenance, elle ouvre la porte, tout sourire. C'est celui de Meguru qui lui répond, dans sa salopette bleu clair. Ses yeux reflètent un peu le soleil, pas trop quand même, ou il jalouserait les couleurs sucrées qui se mélangent dans les pupilles du garçon.

Meguru est un joli ciel déblayé, qu'Avyi laisse entrer dans sa maison avec un rire désuet. Son âme se guérit alors qu'elle avance derrière son invité, qui tend la tête de tous les côtés, furetant le moindre détail, la moindre chose qui soit à retenir.

Mains derrière le dos, doigts croisés parce qu'il n'a personne pour les partager, Meguru s'appuie à la chambranle de la porte. Son bras la quitte rapidement alors qu'il s'avance, époustouflé, dans la bibliothèque de la maison. Il balaie l'endroit du regard, se perd dans le paysage qu'offre la baie vitrée. Son émerveillement ne s'arrête pas, il s'instruit de tout ce qui traverse son champ de vision. Avyi, derrière, s'amuse des tours de Meguru. Il ne s'arrête plus, regarde la coupole, les étagères, et son attention se fixe alors sur le chat à côté de son amie. Ses yeux et son visage s'illumine d'un sourire hypnotique alors qu'il revient vers la jeune fille, plus lumineux que jamais.

— C'est drôlement joli, ici.

— T'as vu ça ? Et encore, le jardin est incroyable aussi. C'est dommage, il pleut.

Meguru incline la tête, son profil se submerge sous la lumière, et le cœur d'Avyi flanche encore ; il bascule, tombe à la renverse. A peine remis sur pied, elle sait qu'il avance désormais comme un funambule.

Elle décroise les bras, clôt les lèvres qu'elle avait ouvertes sous la stupeur et secoue son esprit qui déraille. Tout chez lui la fascine : ses yeux d'amoureux, eux qui aiment voir le monde, le changer, le travestir en horloge sans aiguilles. Elle contemple avec admiration son énergie rigoureusement vivante, ses cheveux qui s'envolent comme son rire sur les collines désertes. Elle observe et elle aime, Ô, elle aime s'imaginer ledit rire se coincer contre ses lèvres.

Une éclaircie perce les nuages, s'épend sur le sol, sur la salopette mouillée de Meguru, sur ses mains tachées de gouttes colorées. Avyi les voit : elle voit tout sur la carapace de son ami, alors, doucement, elle attrape ses doigts peints en violet et en orange passé.

— Tu peins ?

— Un peu, des fois. Je te montrerai un jour !

— Avec plaisir.

Avyi ne lâche pas sa main. Elle la garde comme un objet précieux, ses phalanges en coffre-fort pour protéger l'âme d'artiste qui brûle dans les arcanes de Meguru. Il a une galaxie collé sur le visage, une constellation à lui tout seul s'étale sur son cou, sur ses oreilles qui rougissent. Au lieu de prêter attention à la poigne ferme de son amie, il rouvre les yeux, devient plus doux, moins solaire.

𝙍𝙚𝙞𝙣𝙚 - 𝙈.𝘽𝙖𝙘𝙝𝙞𝙧𝙖Où les histoires vivent. Découvrez maintenant