Chapitre 7

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Le mois s'égraina bien plus vite qu'Adara l'aurait espéré. Mais il fut riche en bons moments. Kyoko était une vraie casse-cou, qui aimait expérimenter de nouvelles choses et elle entraînait ses amis dans de folles aventures. Tant qu'ils respectaient les règles, rien ne les empêchait d'essayer des rituels, des charmes, des sortilèges. Cela était même vivement encouragé. Ainsi, Adara apprit à nouer des sachets de généreuses fortunes, à apercevoir le monde des fées sans ouvrir de porte, à communiquer par la pensée, à protéger quelqu'un et à se protéger, du moins sommairement.

De ses petits doigts, elle traçait des sigils, mémorisait l'art compliqué de l'incantation, qui exigeait de faire des rimes sans préparation, tout en restant concentré sur son objectif. La magie se manifestait aisément lorsqu'elle l'appelait, parfois agissant comme une entité propre. Il lui arrivait souvent de faire trembler les étagères lors des exercices, de faire disparaître des objets sans le vouloir, pour les faire réapparaître à des endroits inopinés.

Clarence la traitait de trou noir ambulant. Elle se contentait de l'ignorer et de l'observer fanfaronner avec les enfants les plus âgés. Elle n'avait pas besoin de lui, Nazran et Kyoko occupaient très bien ses journées.

Lors de la dernière semaine, tout l'orphelinat était en effervescence. Le personnel s'activait pour organiser l'arrivée des dix familles sélectionnées. Durant les cours, l'accent fut donné sur l'introduction des différents clans qui allaient se présenter pour l'adoption. Clarence était surexcité, rêvant de se faire choisir par le clan le plus prestigieux. Tout le monde était réuni dans une grande salle, aux bureaux anciens en acajou et remplis de bibliothèques.

— Moi, je rêve d'être désigné par la famille Laine, c'est la famille de l'Annulaire ! s'écria-t-il.

Adara roula des yeux. Elle était désormais plus aguerrie aux connaissances du monde des spirites. L'inquisition contrôlait et instaurait les règles au sein de leur société. Elle se composait de cinq familles illustres et antédiluviennes, nommées « La Main spirite ». Chaque membre représentait un doigt de la main, ainsi que sa symbolique en chiromancie. Nazran se pencha vers Adara, qui était assise au bureau à côté du sien.

— La famille Laine est connue pour être douce et artistique, pas sûre que ça lui convienne...

Nazran esquissa un sourire de canaille, mais Adara haussa les épaules. Elle jeta un regard sur Clarence, avant de porter attention aux explications d'Amelin. Clarence posa ses prunelles sur elle, puis soupira longuement. Amelin tapota doucement de sa baguette sur le tableau noir.

— Un peu de concentration, les enfants. Effectivement, nous aurons l'honneur d'avoir une des familles de la Main spirite vendredi, je vous demanderais à tous de rester courtois avec eux. Je vous rassure, l'Annulaire est réputé pour être les plus doux et compréhensif ! Je reviens cependant sur les tendances qui existent dans notre monde. Je préfère vous prévenir à nouveau sur ce point.

Amelin chercha ses mots durant quelques secondes. Elle se mordit la lèvre avant de reprendre contenance.

— Voilà, certaines familles font partie du mouvement de pensée traditionaliste. Ils ont plus vocation à voir les enfants adoptés comme des héritiers et des élèves. L'ambiance sera plus... studieuse ? Les gardiens sont également vus comme des serviteurs.

Merry, qui était présente dans la vaste salle illuminée par des baies vitrées, esquissa une grimace. Adara pencha la tête, peu rassurée subitement. Elle voulait des parents aimants, certainement pas des professeurs.

— Ensuite, il y a les modernes. Ils placent l'affecte en premier plan, c'est-à-dire qu'ils privilégieront l'éducation et le lien affectif qu'ils vous donneront plutôt que le prestige, si j'ose dire. Et leur rapport à leurs gardiens est différent également. Chaque famille à son point de vue et son fonctionnement, dans tous les cas.

Princess SpiriteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant