Dehors (Terminé)

chapitre 2

Maman rentre et en l'entendant je dévale les escaliers pour la saluer. Elle me prend dans ses bras et me serre fort contre elle. J'arrive à sentir son excitation.

– Ma petite puce, on a réussi !

Papa monte les escaliers en courant, ce qui fait trembler les murs.

– On dirait un éléphant.

Ma remarque passe inaperçue car en arrivant à notre hauteur, il nous prend dans ses bras et embrasse le front de Maman.

– Ils ont approuvé la thèse ?

– Oui !

Mon œil avait considérablement dégonflé depuis la veille et présentait désormais seulement de petites taches bleues. La sélection ne commençait qu'à dix heures, je décidai alors d'aller m'échauffer dehors. Je chérissais ces matinées où la ville encore endormie s'éveillait au rythme de mes pas. J'en profitais pour admirer le ciel à travers le dôme et observer les oiseaux voler dans le vent. J'aurais aimé le sentir sur mes joues si seulement il n'était pas irrespirable pour l'homme. Il y a de nombreuses années, l'humanité frôla de peu une annihilation totale, car une toxine émanant des plantes transforma lentement l'atmosphère en un poison mortel. Ceux qui inhalaient cette toxine succombaient ou se métamorphosaient en êtres sauvages et sanguinaires. Si l'armée n'était pas intervenue, notre cité n'existerait pas.

Par réflexe, je jetai un coup d'œil à ma montre. Il était neuf heures cinquante-trois. Le retour à la caserne se fit au pas de course et j'arrivai juste à temps pour entendre l'annonce d'ouverture de la sélection.

– La salle de sélection pour Externa est maintenant ouverte. Les participants sont priés de se rendre à la cafeteria.

J'arrivai exactement au moment où les portes commençaient à se refermer. Dès que mon pied dépassa l'encadrement des portes, je restai bouche bée. La salle était métamorphosée. À l'aube c'était encore une cafétéria mais à cet instant c'était une salle d'entraînement spécialement aménagée pour la simulation. Des fausses plantes étaient dispersées dans la pièce, il faisait sombre, le sol était transformé. Il y avait du relief. Des collines artificielles étaient recouvertes d'une couche verte imitant l'herbe et de fausses branches étaient éparpillées de part et d'autre de la pièce. Un grand arbre était dressé au milieu de la salle. Ses feuilles étaient d'un vert luxuriant et en regardant plus attentivement ces dernières et leurs bords dentelés, je reconnus l'espèce de l'arbre. C'était un chêne. Je m'approchai d'une amie, Elena, qui n'arrivait décidément pas à dissimuler son excitation. En me voyant, la petite brune me prit une épaule et la secoua gentiment.

– Nous y sommes !

Son excitation déteignit sur moi, ma main agrippait la sienne. Le Lieutenant entra dans la salle, plus un mot ne résonnait dans la pièce.

– Aujourd'hui marque un jour d'importance cruciale, car en cet instant, vous êtes appelés à prouver votre valeur. Vingt individus parmi les cent deux présents seront soigneusement sélectionnés pour participer aux missions Externa. Les élus partiront dans cinq jours. Préparez-vous à pénétrer dans un monde hostile, celui de l'Ancien Monde. Préparez-vous à affronter ces créatures sauvages qui errent dans les forêts. Leur apparence humanoïde n'est qu'une façade de ce qu'elles étaient jadis, n'accordez aucune pitié.

Son discours terminé, nos voix s'élevèrent à l'unisson, la tension était palpable. Mon corps se préparait à combattre. Des hurlements sauvages résonnèrent de l'autre côté de la salle. Je suivis le regard de mon amie, attirée par les créatures qui pénétraient dans la salle, des Wendigos. Leurs yeux étaient rouges, leur teint pâle et leurs têtes étaient recouvertes de crânes d'animaux. Ils avançaient rapidement, se faufilant à travers le décor. Leur maigreur était telle que leur peau ne formait qu'un avec leurs os. Ils correspondaient parfaitement à ce que nous avions appris : des êtres autrefois humains qui étaient devenus des monstres.

Nos groupes se formèrent à la hâte, puis nous nous lancions à la traque aux Wendigos. C'était si simple. Je me sentais à ma place sur ce terrain, entourée de mes amis, de ma famille. À chaque cible abattue, nous entendions derrière les portes de la salle les cris de joie des spectateurs devant leur écran, qui suivaient la compétition avec enthousiasme.

Quelques heures plus tard les résultats furent annoncés. Notre groupe était arrivé deuxième du classement, ayant tué sept Wendigos sur un total de vingt. Tous les participants patientaient devant un petit bureau. Dès que quelqu'un sortait de la pièce, nous devinions le résultat rien qu'en observant son visage. Les places dans cette brigade étaient restreintes. Petit à petit le nombre de place se restreignait et mon corps bouillonnait en même temps que mon cœur s'emballait. L'ironie du sort fut que mon nom de famille était Yanaki et qu'ils faisaient les appels en suivant l'ordre alphabétique. Quarante minutes s'écoulèrent avant que ce ne soit à mon tour. En entrant dans le bureau l'odeur de transpiration agressa mes narines. Une atmosphère pesante régnait dans la pièce. Seth me salua et m'invita à prendre place sur la seule chaise de la pièce. Je m'y assis. Le Lieutenant du régiment Externa se contenta d'un hochement de tête. Ils m'annoncèrent le résultat.