chapitre 7

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Je m'assis sur le lit quand Thalès entra.

– Le médecin m'a dit que tu avais reçu une trop grande dose d'oxygène d'un coup. Une hyperoxie.

– Est-ce que les autres sont venus me voir ?

Il ne répondit pas à ma question et nous restâmes silencieux durant de longues minutes.

– Merci de ne pas m'avoir abandonnée.

– Jamais Lana.

– Tu sais, dehors ce n'est plus dangereux, l'air est respirable ! Tu m'as bien vu non ? Et ces gens, mes amis, ils ne sont pas des monstres, ils sont des êtres humains, comme nous Thalès.

À mesure que j'avançais dans mon discours, un pincement dans ma gorge s'intensifiait. Il s'assit sur le lit et posa ma tête sur son épaule.

– Ils n'étaient pas des monstres... Adam m'a sauvée...

Ma voix craqua, sa tête s'appuya tendrement sur la mienne. Je ne le supportais plus, ce massacre devait cesser. La question que je m'étais posée pendant le trajet jusqu'à Adora sortie enfin de ma bouche.

– Sais-tu pourquoi Jacob voulait m'abattre ?

Il me regarda incrédule mais au moment de prendre la parole, Seth entra dans la pièce. Thalès se leva du lit, gardant néanmoins une proximité entre nous. Les traits d'abord crispés du Général laissèrent place à un sourire aussitôt que nos regards se croisèrent. Il me pressa la main.

– Content de t'avoir de nouveau parmi nous Lana.

Je lui donnai une accolade en guise de réponse mais son corps se crispa sous mon étreinte. Il mit rapidement fin à ces retrouvailles en se dirigeant vers la porte.

– Viens donc dans mon bureau quand tu seras rétablie, nous pourrons discuter de ce qu'il s'est passé et Thalès, laisse Lana se reposer !

Il sortit de la pièce suivit de près par Thalès, l'air inquiet. 

Le soir venu, j'entrai dans le bureau du Général. Il m'invita à m'asseoir et me pria de lui raconter mes semaines de captivité chez les Wendigos. 

Pendant que je partageais mon récit avec lui, sa mâchoire se crispait de manière répétée et une nervosité croissante se lisait sur son visage à mesure que les informations s'accumulaient. Les plis de son front devenaient plus prononcés et ses mains, initialement posées sur la table avec assurance, commençaient à s'agiter.

– Je suis maintenant certaine que mes parents étaient au courant. Quel était le sujet de leur thèse ? En avaient-ils parlé ?

– Non.

Sa réponse fut brève, mais je doutai de son honnêteté.

– Seth ? insistai-je, désireuse de connaître la vérité.

Il se renfrogna et ne répondit pas à ma question.

– Dis-moi la vérité !

– Tu n'as pas pu t'empêcher de suivre la trace de tes parents, déclara-t-il, ses yeux noirs plongés dans les miens.

Mes jambes se figèrent sous l'effet de la surprise et je me tus.

– Comment as-tu fait pour survivre à deux tentatives ?

Mes muscles se raidirent.

– D'abord, la voiture, puis Jacob.

Sa voix était assurée, sans trace de doute ni de mensonge. Je sentis le sol se dérober sous mes pieds.

– Mes parents ? balbutiai-je, incapable de croire ce que j'entendais.

Il resta silencieux quelques instants, ses mains tremblaient légèrement.

– Ce sont les ordres, soit toi, soit ma famille.

Je le regardais, horrifiée. Tout l'amour et la reconnaissance que j'avais pu éprouver pour cet homme s'évaporaient lentement, douloureusement. Il n'avait pas empêché l'assassinat de ses propres amis. Il ne m'avait pas défendue. Thalès était-il au courant lui aussi ?
– Tu sais ce qu'est la clé du pouvoir, Lana ? continua-t-il.

– Le savoir.

– La peur. Nous pouvons dire ce que nous voulons, les gens nous croient et nous croiront toujours. Ils ont peur de l'extérieur. Pourquoi ? Nous les confortons dans cette peur, nous leur offrons la sécurité et le bonheur à l'intérieur de ces murs. Leurs besoins sont satisfaits. Nous contrôlons la société.

C'était injuste pour les Noliens, pour Adora, pour ma famille et pour moi.

– Dans quelques instants, des soldats traverseront cette porte, puis, dans deux jours, tu seras déclarée morte. Je dirais à Thalès que tu es morte dans la nuit, que finalement, la maladie est encore présente, que ton état devenait incontrôlable et que tu es morte d'une crise cardiaque. Les autres ne te prêtent plus vraiment attention de toute manière.

Je ne pouvais plus le supporter. D'un geste brusque, je me levai de ma chaise, sautai de l'autre côté du bureau et mon coude atterrit dans sa mâchoire. Un craquement sinistre se fit entendre, suivi d'un hurlement de douleur. Je savais que cette action alerterait les soldats de l'autre côté de la porte, mais savoir que cet homme avait participé au meurtre de mes parents qui le considéraient comme leur ami, leur confident, était insupportable. Je le plaquai au sol.

– Pour moi, tu étais quelqu'un de ma famille. Je t'aimais, je t'admirais. Mais moi, je n'ai jamais rien été pour toi. Je n'étais rien de plus qu'une chose qu'il fallait surveiller.

Des bras puissants me soulevèrent du sol et je me débattais sans succès, mes membres secoués de rage.

– Tu as causé la mort d'enfants, d'innocents ! hurlai-je.

Une main se plaqua sur ma bouche, me privant de ma respiration.

Dehors  (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant