La Voleuse aux Mains d'Or - Tome 1 [TERMINÉ]

Chapitre 19

Date de rédaction : 10/02/2023

Je palpitais d'impatience.

Notre camionnette positionnée à l'orée du bois, le soleil venait de se coucher.

Tout était prêt.

Derrière moi, le sergent Wiles ajustait les sangles de son sac à dos, cette nuit, il se chargerait de me suivre et de trimballer mon matériel. Je devais avoir les mains libres et rien ne devait entraver mes mouvements, enfin c'est l'excuse que j'avais fournie à mes deux complices. Et d'une certaine manière, ça m'amusait d'entendre Calixte se plaindre de ma conduite visant à les mener par le bout du nez.

Hana resterait en retrait, là où elle se montrait la plus utile, à gérer la communication et à surveiller les alentours. Elle sera surtout prête à intervenir au moindre pépin. Mais j'avais tout étudié, alors s'il me manquait les plans du manoir pour m'orienter. Je savais que ce soir, Marilena et Guiseppe Alemanno sortiraient au restaurant, leurs enfants en pension dans de prestigieuses écoles, j'avais donc le champ libre pour trouver cette invitation.

Je serrais mes cheveux dans un épais chignon et rentrais mon sous-pull noir sous mon treillis. Je frétillais à l'idée d'introduire dans cette résidence luxueuse. Ça puait le fric et j'adorais ça.

— Parés ? demanda Hana en s'installant dans son siège.

J'opinais en ouvrant la portière. La brise transportait l'iode de la mer toute proche, mais avant d'atteindre les vignobles et le manoir, il nous faudrait avant tout marcher et donc ne pas trainer.

— Je vous suis à la trace, s'il y a le moindre souci j'interviens, faites attention.

Sa voix résonna autant dans le véhicule que dans mon oreille droite. J'esquissais tout de même un sourire, car quel souci pourrions-nous avoir ? J'étais là, alors nous n'aurons aucun problème. Calixte sauta à son tour, il jeta une œillade à sa collègue, paraissant moins contrarié que les autres fois. Peut-être qu'il reconnaissait enfin mon indéniable talent ainsi que mon utilité et que de ce fait ma présence leur était des plus essentielles.

— C'est ta première fois ? narguais-je en longeant la route aux côtés de mon partenaire.

— Et la dernière.

— On dit toujours ça au début. Puis ça devient comme une drogue, on n'arrive plus à résister, alors on cède et on continue.

À l'époque, j'avais vraiment essayé de me convaincre du tort que cela causait. À chaque vol, chaque objet que je glissais dans ma poche, je me jurais de ne plus recommencer. Mais Louiza continuait, elle ramenait toujours plus gros et finalement, je préférais suivre son exemple.

— Jusqu'à ce que tu te fasses choper, ajouta Calixte avec sarcasme.

— Je m'en suis plutôt bien sortie, tu trouves pas ? souris-je en lui donnant un léger coup de coude complice qu'il ne releva même pas.

— Pour l'instant.

Je pris naturellement les devants, chacun de mes pas s'étouffait dans une discrétion à toute épreuve. En revanche, je pouvais entendre ceux de Calixte, lourds, bruyants et envahissants. Pour l'heure, je m'abstenais de tout commentaire, j'attendais de voir comment il s'y prendrait une fois la première enceinte dépassée. Le ressac des vagues contre la falaise non loin ajoutait de la sérénité au lieu. Le vignoble s'étalait tout au long de la pente et le clair de lune me permettait d'entrevoir les grappes noires qui arriveraient bientôt à maturité. Le terrain des Alemmano s'étendait sur plusieurs hectares, et le manoir entouré d'arbres que l'on apercevait au loin me rappelait un brin celui de Charles Aldo Visconti, mon premier vrai gros cambriolage. Surement le seul que je regrettais d'avoir commis. Et rien qu'à me remémorer les images de cette nuit d'horreur, je frémissais en fermant les yeux pour penser à des détails plus agréables, comme le sourire de ma sœur ou bien les étoiles qui brillaient dans ses prunelles vertes lorsqu'elle paradait dans les bijoux qu'elle dérobait. Un pincement au cœur me rappela les terribles conditions dans lesquelles nous nous étions quittés, et depuis elle n'existait qu'au travers de souvenirs évasifs, tout ceci remontait à une éternité...