Chapitre 2

23 2 4
                                    


Au centre de la pièce était effectivement allongé le cadavre d'une jeune femme dans la trentaine, vêtue d'un long manteau rose flashy. Gabbie remarqua immédiatement le mot tracé de la main gauche de la victime : "rache". Elle savait que cela signifiait "vengeance" en allemand, mais cette femme n'était pas allemande et le mot n'était pas écrit comme s'il était terminé.

Le cadavre était entouré de deux hommes que Gabbie ne connaissait pas. Un grand au regard intelligent et au long manteau noir et un homme plus petit, un peu plus âgé, en combinaison de protection, et qui semblait revenir tout droit d'une guerre. Afghanistan ou Irak. 

Les deux eurent un regard vers Gabrielle et Lestrade en les entendant entrer, et si le grand se contenta de ce coup d'œil, l'autre se leva et se dirigea vers les nouveaux venus.

- Inspecteur, qui est-ce ? dit-il à voix basse, en jetant un regard étonné sur la tasse de thé vide que Gabbie tenait toujours.

Celle ci répondit tout en serrant la main de l'homme :

- Gabrielle Midwinter, enchantée. Je suis criminologue et inspectrice de Scotland Yard.

- John Watson. Je suis médecin, et je n'ai rien à faire ici.

Gabbie souffla du nez à cette réponse, puis lâcha la main du docteur pour s'approcher du corps. Les deux autres restèrent derrière, et elle s'immobilisa à côté de l'inconnu au long manteau. Celui-ci lui jeta une œillade de haut en bas, et elle le regarda en coin. Puis, elle s'accroupit pour observer la dépouille de plus près, sous l'œil attentif des trois hommes présents dans la pièce. Elle toucha, observa, analysa, déduit, puis se releva.

Son voisin se retourna alors et s'apprêta visiblement à dire quelque chose à la petite assemblée, quand une interruption inattendue et détestable se fit :

- Elle est allemande, fit la voix nasillarde d'Anderson, nonchalamment appuyé contre le cadre de la porte. "Rache" signifie "vengeance" en allemand, elle voulait surement nous prév...

Avant de lui laissait le temps d'en dire plus, Gabbie se précipita vers lui, suivie par l'autre homme, et lança avec un sourire forcé en lui donnant sa tasse vide :

- Anderson, si vous voulez vraiment vous rendre utile, tenez-moi ça, voulez-vous ?

- Et merci pour cette contribution très utile, dit l'autre en lui claquant la porte au nez sans même le regarder, occupé à vérifier la météo des villes environnant Londres. Un bruit de porcelaine brisée se fit entendre de l'autre côté de la porte, et Gabrielle dit :

- Vous me devez une tasse.

L'autre la regarda fixement dans les yeux cette fois-ci, et ils furent interrompus par la voix de Lestrade :

- Donc, elle est allemande ?

- Absolument pas, répondit le grand. Et j'ai maintenant la certitude que cette femme est venue à Londres pour y passer une nuit et qu'elle devait retourner à Cardiff le lendemain. Vous en êtes arrivée à la même conclusion, n'est ce pas ? dit-il en regardant de nouveau Gabbie.

- Plus ou moins, je n'ai pas vérifié la météo. Mais je suppose que vous avez raison.

- Et c'est là que vous intervenez, Gabrielle, dit alors Lestrade en s'avançant vers l'intéressée.

- En effet, c'est là que ça devient intéressant, murmura-t-elle en croisant les bras. Elle sentait tous les regards désormais posés sur elle, ferma les yeux et réfléchit.

Au fur et à mesure que les hypothèses lui venaient, et elle se glissait dans la peau du tueur, comme elle en avait l'habitude.

Quatre victimes. Même poison. Tous dans un lieu abandonné. Toutes les victimes devaient se déplacer au moment de leur mort. Aucune ne semblait avoir de raison de se suicider.

Elle rassembla tous les éléments et les indices qu'elle détenait, puis prit une décision, et rouvrit les yeux.

- Je crois que j'ai une petite idée ; mais je n'ai aucune preuve.

- C'est votre métier, de supposer, répondit Lestrade. On vous écoute.

- Je ne pense pas que le tueur forçait ses victimes à ingérer du poison, ou du moins pas par le moyen auquel nous penserions tous, à savoir sous la menace d'une arme. À mon avis, il s'agissait plutôt d'une sorte de jeu. Il forçait ses victimes à ingérer du poison, mais en leur faisant croire qu'elles avaient une chance de s'en sortir. Ou alors, peut-être qu'il leur parlait simplement, et que ses mots faisaient prendre conscience de certaines choses, des erreurs peut-être, ou des regrets qui conduiraient les victimes au suicide volontaire. Mais aucune de ces personnes n'avait de raison de vouloir se donner la mort. Un homme marié et heureux, un adolescent qui récupère simplement un parapluie... Non. Je pense que le tueur forçait ses victimes à jouer avec lui, à un jeu de hasard auquel il aurait eu beaucoup de chance. Peut-être deux fioles contenant chacune une pilule, l'une empoisonnée et l'autre non. Il obligeait ses victimes à choisir l'une des fioles en leur garantissant que l'une d'elle était inoffensive, et assurait ingérer la pilule restante en même temps que la victime. Ce qui m'étonne, c'est que ce jeu n'est que du pur hasard, il aurait donc mis sa vie sur le compte de la chance ?... Il ne doit pas beaucoup y tenir. Une maladie, peut-être ? La garantie d'une mort imminente ? Possible. Quant à sa couverture... Honnêtement je ne peux pas dire grand-chose dessus pour le moment, il y en a trop de possibles.

Elle se tut, et fronça les sourcils. Quelque chose la froissait. Elle n'arrivait pas à déterminer la raison que le tueur aurait à faire tout ça. Un simple amusement ? C'était possible. Était-il payé ? Possible aussi. Elle secoua la tête, et se tourna vers les trois hommes.

Lestrade la regardait avec un léger sourire en hochant la tête. On aurait dit que par le biais de Gabbie, il voulait prouver que Scotland Yard avait encore son utilité.

Watson avait l'air sidéré, et murmurait : "Impressionnant...".

Quant à l'autre, il se contentait de fixer la jeune femme avec un regard perçant, sans laisser paraitre la moindre émotion.

Gabrielle les regarda chacun tour à tour, pinça les lèvres et enfonça ses mains dans ses poches, avant de commencer à se balancer d'un pied sur l'autre.

- Vous... avez des questions, peut-être ?

Watson s'apprêtait à ouvrir la bouche pour dire quelque chose, mais il fut devancé par son acolyte qui lança :

- Une. Que faites-vous à Scotland Yard ? Ce n'est pas pour vous vexer, Lestrade, mais ce service est un ramassis de crétins. Vous comptiez me cacher longtemps la présence d'une telle intelligence dans vos bureaux ?

- Eh bien, cela fait bientôt cinq ans que Mlle Midwinter travaille à Scotland Yard... répondit Lestrade. Elle a d'ailleurs fourni un travail impressionnant depuis son entrée au service.

L'intéressée lui envoya un petit clin d'oeil pour le remercier, puis se tourna vers Watson :

- Vous vouliez dire quelque chose, il me semble ?

- Oui, enfin, une chose : brillant. Vous vous êtes trouvé un rival de taille, Sherlock, dit le docteur en se tournant vers ledit Sherlock.

- Sherlock ? Vous êtes Sherlock Holmes ? répéta Gabrielle avec un sourire.

- Aux dernières nouvelles, oui. Continuons cette discussion dehors, voulez-vous ? dit l'intéressé en redressant le col de son manteau et en sortant de la pièce.

- Je compte sur vous pour faire un rapport, Lestrade, dit Gabbie en emboitant le pas du détective. Elle n'attendit pas sa réponse et sortit, suivie par le Dr. Watson.

Sherlocked (Sherlock x OC) (BBC)Where stories live. Discover now