Chapitre 6

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Gabbie le regarda en penchant la tête et cligna plusieurs fois des yeux. Elle retint un rire sonore, puis poussa Anderson dans la cuisine et ferma la porte, avant de retourner vers Sherlock et Lestrade, là où se tenait une conversation d'un niveau de Q.I nettement supérieur à celui d'Anderson.

- Rachel est morte. Il y a quatorze ans, expliqua Lestrade à Sherlock.

- Quand ? Où ? Il y a forcément un lien avec sa mère, dit le détective, le regard dans le vague, réfléchissant.

- À la naissance. C'était un nourrisson mort-né...

Le cœur de Gabbie s'accélère dans sa poitrine. Sherlock se demandait pourquoi Jennifer avait écrit le nom de sa fille, mais elle le savait. Sa propre petite sœur était née déjà froide, et elle n'avait jamais oublié son nom et la vie qu'elles auraient pu avoir si sa sœur était en vie. Sa mère n'avait plus jamais été pareille.

- Ça n'a rien d'anormal de penser à sa fille juste avant sa mort, sauf peut-être pour un sociopathe comme toi, siffla Anderson qui s'était libéré de la cuisine, et Gabbie pensa que, pour une fois, ses paroles renfermaient une vérité.

- Gabbie, vous avez dit qu'il était possible que le tueur se contente de pousser ses victimes au suicide simplement en leur parlant et en leur rappelant des regrets ou des erreurs, dit alors John qui était jusque là resté en retrait. Serait-il possible que le tueur ait utilisé la mort de Rachel pour pousser sa mère à se suicider ?

Elle allait répondre, mais Sherlock fondit sur le médecin qui eut un mouvement de recul avant qu'elle n'ait eut le temps de prononcer le moindre mot :

- Mais ça fait des lustres qu'elle est morte ! Ça n'a aucun sens !

- Sherlock à raison, John. Et puis, je vous l'ai dit, je doute que le meurtrier ne tue ses victimes de cette façon, confirma Gabbie d'une voix douce.

Elle se tourna alors vers la porte, et vit Miss Hudson apparaître dans l'encadrement. Elle se dirigea vers elle et la vieille dame lui adressa un sourire aimable.

- Voulez-vous une tasse de thé ? proposa-t-elle alors.

- Je ne suis pas censée être en service, alors ce serait avec plaisir, répondit Gabbie en lui rendant son sourire.

Elle sentit le regard de Sherlock tourner vers elle, et il l'arrêta avant qu'elle n'ait eu le temps de sortir.

- Vous nous abandonnez, Gabbie ? dit-il alors en posant une main sur son épaule.

Elle se retourna, le regarda et répondit en souriant légèrement :

- Je vous l'ai dit, Sherlock, cette partie d'une enquête ne m'intéresse pas, et je n'interviens normalement qu'après l'arrestation du coupable.

- Je ne vous comprends pas. Comment tout cela ne peut-il pas vous stimuler le cerveau ? C'est tellement intéressant, tellement amusant ! s'écria-t-il en la prenant par les deux épaules en la secouant presque. La jeune femme lui prit tranquillement les bras, et les ôta de ses épaules tout en continuant de sourire, et enchaina :

- Je serai ravie de vous faire une démonstration de ce talent une fois que vous aurez trouvé pourquoi Jennifer a écrit "Rachel" juste avant de mourir. Mais pour l'instant, je suis en pause, et je souhaiterai prendre un thé avec Miss Hudson pour faire plus ample connaissance. Appelez-moi si vous avez du nouveau.

Sherlock ferma les yeux et inspira profondément. Puis il se mit à faire les cents pas au milieu des collègues de Gabbie et sous l'oeil méfiant de Lestrade et celui attentif de John.

Gabbie passa alors devant Miss Hudson et descendit les escaliers tandis que celle-ci adressait quelques mots au détective.

Celui-ci dut la congédier sans ménagement car elle rejoint Gabbie trois secondes plus tard en grommelant quelque chose à propos de "je devrais avoir quelques mots avec votre mère ces prochains jours", puis son visage s'illumina de nouveau lorsqu'elle vit la jeune femme qui l'attendait en bas des escaliers. La voix tonitruante de Sherlock résonna alors d'en haut tandis qu'il criait :

- La ferme, tout le monde, la ferme !! Ne bougez plus ! ne respirez plus ! ANDERSON, TOURNE-TOI VERS LE MUR ! Tu me déconcentres !!

Elle entendit la voix étouffée du pauvre bougre qui protestait, et Miss Hudson lui prit le bras pour l'emmener vers la cuisine.

- J'aime beaucoup le petit Sherlock, dit-elle en mettant de l'eau à chauffer, mais il faut avouer qu'il a un sale caractère !

- Si vous le dites, répondit vaguement Gabbie en observant la coquette cuisine de grand-mère qui s'étendait autour d'elle. Qui...?

- Mais et vous, qui êtes-vous donc vraiment ? C'est la première fois que je vois Sherlock ramener une jeune femme à la maison, ou vivante, tout du moins, la coupa Miss Hudson en apportant la théière fumante et deux tasses.

Gabbie comprit ce à quoi elle pensait, et s'empressa de rétablir la vérité :

- Je suis désolée de vous dire que vous vous méprenez, Madame. Nous nous sommes rencontrés pour la première fois aujourd'hui. Comment ça, une femme vivante "tout du moins" ?

- L'un n'empêche pas l'autre, chérie, répondit la vieille femme en hochant la tête et en versant du thé dans les deux tasses. Un fumet de feuilles séchées emplit aussitôt l'air ambiant, et Miss Hudson poussa l'une des tasses vers son interlocutrice.

- Vous dites qu'il n'a jamais ramené personne ici ? demanda Gabbie, curieuse d'en savoir plus sur le détective.

- Non, John était le premier. J'ai d'abord cru qu'ils étaient ensemble, et je dois vous avouer que j'ai été déçue quand j'ai appris que ce n'était pas le cas. Ce pauvre petit à besoin de quelqu'un qui prend soin de lui, voyez-vous, se désola Miss Hudson avant de souffler sur son thé et d'en prendre une gorgée, et Gabbie sut qu'elle parlait de Sherlock.

- Je suis sûre que John saura prendre soin de lui comme il le faut, la rassura-t-elle en souriant gentiment.

- Bien sûr, bien sûr, mais ils ne seront jamais plus que des amis. Et Sherlock a besoin de plus que cela, vous savez, insista-t-elle en envoyant un clin d'œil à Gabbie pour appuyer ses propos. Celle-ci changea de position sur sa chaise, croisa les jambes et prit sa tasse. Elle regarda l'eau parfumée qui scintillait dans la porcelaine, mal à l'aise. Elle venait de vivre une rupture amoureuse le matin même, et même si elle n'était pas vraiment amoureuse, elle en restait tout de même marquée. Miss Hudson dut sentir son malaise, car elle changea de sujet :

- Mais assez parlé de cet énergumène ! Parlez-moi de vous. D'où venez-vous, et que faites-vous dans la vie à part travailler pour Scotland Yard ?

C'est ainsi que Gabbie passa à l'interrogatoire jusqu'à ce que des pas se firent entendre dans l'escalier et qu'elle aperçut dans l'ouverture de la porte la grande silhouette filiforme de Sherlock qui sortait dans la rue d'un pas précipité.

- Sherlock ? appela-t-elle, mais il ne l'entendit pas, et la porte claqua derrière lui. 

Sherlocked (Sherlock x OC) (BBC)Where stories live. Discover now