Mia, moi

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Pour résumer ma courte vie, je m'appelle Mia, Mia Maria Juliette Georgette Jeanne Leanne Ursha. De mon nom complet. Mes parents s'étaient bien amusés à me donner des noms qui rimes, mais moi, je n'aime pas leur humour.

Sachant qu'à cause d'Eux je vais devoir passer ces trois dernières semaines à vivre sous leur ordres... et au bout du temps imparti, je mourrais. Pour le « peuple ». Ne me faites pas rire. La pire justification possible.

Mon justement « peuple » à d'ailleurs surnommé ma famille comme étant les « trois Ours ». Et moi dans tout ça ? Moi aussi je fais partie de cette famille ? *ton ironique* Ohhh... c'est parce que je n'existe pas ? Mais... mais pourtant je suis là ? Serais-je... une... une anomalie ? Une... chose ? *reprend un air sérieux* Nooooon... c'est juste que je n'ai jamais existé aux yeux de ma famille, je ne suis pas un tyran. Pas comme Eux.

Ma vie va être brisée d'ici trois semaines, alors, j'espère en profiter le plus possible. D'habitude, quand un être humain n'a plus que trois semaines à vivre, il entreprend ses derniers jours à faire ce qu'il a toujours rêver de faire. Mais, moi, je n'ai même pas le droit à de dernières volontés. Peut-être parce que je ne suis pas un être humain ? Peut-être parce que je suis une erreur qui n'aurait jamais dû voir le jours ? J'irai interroger la Grande Ours, quand j'en aurais fini avec ma vie. J'irai la voir et je lui demanderais des comptes. Pourquoi m'avoir envoyé sur Urshae ? Pour sauver le peuple qui y vit ? J'étais vraiment la seule solution ? Suis-je seulement une solution à vos yeux ?

Je ne comprends pas. Je ne suis pas allée à l'école, je n'ai pas fréquenté d'humains. Je suis restée cloîtrée chez moi, pendant que ma famille faisait semblant de ma non-existence. Au fond, ils sont bien stupides, s'ils savaient déjà que je devrais tuer l'un d'eux, pourquoi ils n'auraient pas essayé d'être plus gentil ? Ma « mère » n'avait-elle pas des quelconques fibres maternelle ? Non ? Pourtant, je la voyais bien jouer avec joie aux jeux stupides que la aussi stupide « sœur » .

Mais je ne suis pas là pour parler d'Eux. Pas encore. Je vais parler de Moi. De ma souffrance, de mon incompréhension, et peut-être qu'en retranscrivant mes doutes et mes peines sur du papier, j'arriverai à les effacer ? À ne plus ressentir de la tristesse ? Peut-être, qui ne tente rien n'a rien, comme on dit. Il y a aussi une phrase, qui me motive à chaque fois de braver l'interdit.

« Si l'Homme ne croit pas en Dieux, mais qu'Il existe, alors il sera puni.

Si l'Homme croit en Dieux alors qu'Il n'existe pas, il ne lui arrivera rien

Mais si l'Homme croit en Dieux et qu'Il existe, il sera récompensé »

Ça marche pour tout, et c'est bien ce qu'a dû se dire La Grande Ourse quand elle m'a envoyé ici. Elle a dû se dire que si son plan ne marchait pas, au moins, elle aura essayé et qu'elle n'aura pas de regrets, mais, a t-elle pensé à Moi ? Non, bien sûr que non, personne ne me demande mon avis. Personne.

Si je réussi à vivre ces trois semaines, je suis sûr que je ne saurais décider qui tuer. Tout les trois sont les pires des pires, et tout les trois je veux les voir mourir de mes mains. Non, ce n'est pas cruel, si vous aviez vécu avec Eux pendant 17 ans, vous sauriez le volcan qui bouillonne en moi. Mais vous ne savez pas. Et d'ailleurs, vous ne pouvez même pas dire que c'est « inhumain », parce que je ne suis même pas humaine. Moi-même je n'ai aucune idée de ce que je suis, alors comment vous êtes sensés savoir ? Êtes-vous omniscients ? Non ? C'est bien ce que je croyais. Loin de moi l'idée de vous offenser. Non... c'est juste que personne ne peut-être omniscient.

Enfin, une seule personne, mais sûrement pas vous.

Moi, j'aurais tous pu les tuer. En une nuit, en trois coups. Mais ce n'était pas la nature de la mission, et Eux aussi doivent vivre avec moi. Ils auraient pût essayer de me tuer. En une nuit, en un coup, mais ils avaient signé le contrat. Malgré Eux. Moi, je suis forte en négociation, mais j'avais signé ce contrat de ma simple existence. « Simple » ? Non, plutôt complex, mais d'après le regard qu'Ils portent sur moi, je suis une chose simple, sans pensées, sans émotions, sans rêves. Et selon moi, Ils ne sont sans pensées, sans émotions, sans rêves. Nous ne sommes pas si différent en fond non ? Moi, je ne trouve pas.

Et Eux non plus d'ailleurs.

C'est sympa de dire « moi » alors que je ne sais même pas ce que je suis. Mais au moins, je sais à quoi je ressemble. C'es simple, c'est court, c'est moi.

Petite

Rousse

Pâle

Fine

Et de beaux yeux bleus. Tout ce que je disait. C'est court.

Intelligente

Curieuse

Déterminée

Et ayant la rage de vivre. C'est court. C'est moi.

Mais le mot « court » ne veut absolument pas dire « simple ». Je suis aussi complex que le labyrinthe du Minotaur. Aussi complex Que la plus belle des peintures. Mais moi, je ne suis pas une œuvre, un objet, non. Moi, je suis une chose. Et retenez bien. Je serai la chose qui survivra même après avoir pactisé avec une constellation. La pire de toute. Le diable sous forme d'étoiles.

Je doit être née sous une mauvaise étoile. C'était la seule explication possible. Mais en sachant que toutes les étoiles sont mauvaises, comment savoir laquelle est MA mauvaise étoile ? Comment savoir comment je vais faire pour survivre trois semaines ? Comment faire...

Même en sachant que si je refuse, je disparaîtrai à jamais, est-ce que ça en vaut le coup ? Quelle idée, bien sûr que ça en vaut le coup. Je préfère encore vivre trois semaine en entraînant un membre de ma famille dans ma mort plutôt que de disparaître à tout jamais. À la fin, j'aurais au moins le droit de devenir une étoile. Plus précisément, la fameuse « Petite Ourse », mais seulement si je mène à bien ma mission. Et qu'elle mission !

Je regarde par la fenêtre, dans l'obscurité de la nuit, j'aperçois la Grande Ourse. Elle veille sur moi, au plutôt, elle me surveille.

Mia UrshaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant