Expliquez moi ce bazar

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C'est ainsi que débute mon étrange journée, qui ne risquait pas d'être la dernière. Mais à force, j'étais habituée, c'était presque mon quotidien. Qui aurai pu deviner que je passerai de fille inutile à la fille au centre de l'attention, qui plus est dans un drôle d'endroit situé dans le sous-sol d'un bâtiment étrange. C'est drôle. 

Enfin bon. Mes pensées dérivent soudainement vers ma famille. J'ai envi de rire, pour de vrai. Mes yeux sourient et ma boudé amorce le mouvement d'un rire. Malheureusement je m'arrête dans mon geste, considérant qu'il était trop tôt pour commencer à rire. Alors je choisis simplement d'afficher un rictus amusé, qui déconcerte tout ces hommes d'âge mûr. A mon avis ils ne sont pas très à l'aise, mais ce n'est que l'avis d'une fille un peu tarée qui sort de chez elle pour la première fois. C'est dommage, car par la vitre de la voiture j'ai pu admirer le bel extérieur , il ne pleuvait pas ce jour là. La chance était de mon côté ? Un toussotement léger me fait revenir a l'instant présent . Tous me regardent avec un air interrogateur et je regarde Damien qui semblait m'avoir posé une question. J'hausse les épaules et le regarde avec une moue profondément ennuyée.

— Oui ? Excusez moi je n'ai pas l'habitude de me faire réveiller si tôt.

J'insiste sur l'utilisation de la voix passive pour appuyez sur le fait que j'aime dormir. Autant me comparer à un vieil ours en hibernation et ça reviens au même. Alors Damien fait quelque chose que je n'aurais jamais pu imaginer : il éclate de rire. Mais au bout d'un moment son rire se métamorphose en un regard dur et froid.

— Écoute petite, je n'ai pas le temps pour tes petits caprices d'enfant gâtée d'accord ? Alors tu va bien gentiment répondre à ma question.

La surprise qui se lisait sur mon visage laisse place à une impassibilité la plus déconcertante. Je me retient de lui hurler que, non, je ne suis pas une petite fille gâtée, et que doublement non, je ne vais pas obéir bien gentiment comme un vulgaire mouton idiot. J'étais loin d'être idiote. Mais je suis capable de faire des sacrifices. De laisser couler et obéir. Pour une fois. L'hypocrisie qui allais m'aider à survivre pendant deux semaines devait devenir ma meilleure amie. Alors autant commencer maintenant. Mais doucement, sinon cela risque d'être un changement trop violent à supporter. C'est donc pour cette raison que je lui affiche mon plus beau sourire et que je reste debout au lieu de m'assoir sur la chaise qu'il me désigne du menton. La chaise qui est dos à la porte. Je prend une inspiration et le regarde avec des yeux faussement  innocents. Et il en est conscient.

— Non monsieur, loin de moi l'idée d'être insolente à gore grandiose autorité, j'étais simplement perdue dans mes humbles pensées. Poursuivez je vous en prie, qu'elle était votre question ?

Damien reste immobile pendant une douzaine de secondes avant d'afficher un rictus ironique. Il se redresse sur sa chaise et me répond avec calme, ce que j'apprécie car je risquais exploser à tout moment. Il articule avec lenteur ce qui me frustre au plus haut point.

— Te sens-tu prête à affronter les semaines à venir ? As-tu des questions ? 

Je l'écoute d'une oreille distraite mais lui répond tout de même. Ce serait si impoli de ma part de ne pas lui répondre...

— Écoutez, je pense que j'ai toutes les aptitudes nécessaires pour que tout ce passe bien.

Je leur lance à tous un regard mi-amusé, mi-moqueur.

— Je suis maligne, intelligente et je sais me dépêtrer de situations compromettantes.

Voyant Jean septique, je continue tout en l'ignorant.

— Et si j'ai des questions ? Évidemment. Premièrement que vas t-il se passer pendant ces deux jours d'attentes avant le « jour-J » ? Et deuxièmement... 

Je désigne la fenêtre du doigt comme le ferait un enfant devant son cadeau de Noël. 

— Comment la lumière du jour pénètre jusqu'ici ?

Toute trace de mépris quitte mon visage et des étincelles d'excitation brillent dans mes yeux. Du coin de l'œil je vois Jean réprimer un rictus alors je tente d'effacer toute joie dans mon regard. Ce que j'avais appris au cours de mes 17 années avec ces monstre c'était de ne jamais dévoiler mes émotions. Patrick prend la parole avec l'accord de celui que je considérai comme le chef de cette étrange secte. Il s'adresse à moi comme s'il expliquait un théorème à une élève un peu retardée. Je lui pardonne.

— Tout d'abord, tu a à ta disposition toute sorte de matériel pour te préparer.

Il agita la main d'un air ennuyé.

— Paul te fournira un plan.

D'un mouvement discret il désigna un homme tout au bout de la table. Il semblait tout aussi impassible que moi, mais il avait moins de charisme. Il était... sombre. J'hoche la tête pour que Patrick reprenne ses explications. 

— Ensuite, le fait que le soleil puisse transmettre sa brillance jusqu'ici est un procédé plutôt complexe de réflection et d'un ensemble de miroirs savamment positionnés.

Il semblait vouloir m'expliquer au mieux, ce que j'approuvais, mais il s'y prenais d'une manière si particulière que je préférai encore hocher bêtement la tête tout en regardant discrètement l'horloge murale ; ça faisait longtemps que j'étais debout. De son côté, Patrick débitait toujours ses explications sans goûts ni saveurs. Je m'en voulais presque de lui avoir posé la question. A la fin d'interminables minutes, il se tut enfin et le silence se dit. Personne ne prenait la parole alors je leur fit l'honneur de parler. 

— Je pense que... 

Je désignais la porte par laquelle j'étais entrée avec insistance, en espérant qu'ils captent le message : je veux juste m'enfermer dans ma chambre avec un bon livre, et peut-être même étudier la carte que ce Paul est sensé me confier. Je les regarde tous avec un sourire de plus en plus crispé. S'il vous plaît.... Alors Pierre m'expliqua, l'air un peu gêné.

— Hm... tu doit partager le premier repas du matin en notre compagnie.

Je pousse un long soupir. Soit, j'allais petit déjeuner avec eux. Alors je m'assois en bougonnant sur la chaise qui m'était réservée. Je n'allais absolument pas faire un effort pour paraître agréable. Et vu leur air crispé ils semblaient le savoir. Tant mieux, ils commençaient à me connaître.


Mia UrshaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant