V.

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Lorsque Turin revient, Irina prend soin de fermer son sac.

_J'ai pris des cartons, leur dit le directeur. Nous allons pouvoir commencer le tri.

Toutes les photos de Petra prisent dans la maison de retraite restent pour lui créer un petit mémorial, mais les autres, plus personnelles, les jumeaux les emportent. Soit pour les garder, soit pour s'en débarrasser. Les bibelots sont tous jetés. La plupart affreux. Cependant Irina décide de garder les bijoux de valeurs et Marko s'approprie le vieux médaillon de leur père. Le seul souvenir de lui. En le passant, il tente de se rappeler son visage. C'est compliqué de mémoire. Petit à petit, la chambre se vide et retrouve un aspect neutre.

_Le plaid ? demande Turin.

_J'aimerais le prendre, répond Marko. Enfin sauf si ça te dérange ? 

Sa sœur fait non de la tête en serrant encore plus son sac à main contre elle. Son contenu l'effraie mais elle ne veut rien montrer devant ce belliqueux de directeur. Tout ce qui est usé, inutile est envoyé à la poubelle. Le tri leur prend un peu plus d'une heure.

_Bon je crois que c'est fini, déclare Turin, le visage rouge par l'effort minime.

Les jumeaux acquiescent et se regardent.

_On se reverra demain, alors, reprend le directeur en les raccompagnant à la porte de l'établissement.

Les au revoir sont précipités par un nouveau problème. Turin les abandonne alors sur le trottoir. Maintenant qu'ils sont seuls, une gêne s'installent entre les jumeaux. Sans le directeur, il ne semble plus avoir aucun lien.

_J'ai le numéro des taxis, marmonne Marko. On en partage un ? Ton hôtel est où ?

_Le B&B près de la gare, lui répond Irina.

_Le même que le mien. Cette nouvelle ne les réjouit pas. Pourtant, ils se décident quand même à partager un taxi. Ironie du sort, ils se retrouvent avec des chambres voisines. Avant d'entrer dans la sienne, Marko demande :

_Tu vas regarder ce qu'on a piqué ce soir ?

_Je ne pense pas, répond la jeune femme. Je veux le faire avec toi, mais c'est encore trop...

_Tôt, termine Marko. Je comprend. En fait je vais aller au resto ce soir.

_J'ai un sandwich.

Rouge, Irina rentre dans sa chambre en adressant un dernier sourire hésitant à son frère. Une fois seule, elle se laisse tomber sur le lit moelleux. C'est la première fois qu'elle le revoit en quoi ? Dix ans peut-être. Elle était invité à son mariage avec l'autre-là. Charlotte-Aristo. Bien évidemment, elle n'y est pas allé. Enfin du moins, elle ne s'est pas montré. De loin, elle avait secrètement admiré son frère, si beau et élégant dans son smoking. Quant à la mariée on en parle pas. Une véritable déesse dans sa robe si impeccablement coupé. Irina ne pouvait être que jalouse. Elle n'a pas ça, elle. Juste un vaste appartement et des chaussures de luxe. Est-ce que Marko a des enfants ? L'aristo aurait-elle accepté de donner des enfants à un crève-la-faim ukrainien ? Jamais, elle n'oserait lui demander. Après quinze minutes de repos et de questions, la jeune femme se dirige dans la salle de bain. Elle a besoin d'une bonne douche, à défaut d'avoir une baignoire. Une fois nue, elle se glisse dans la petite cabine et reçoit l'eau brûlante sur son corps comme de l'eau bénite. Irina reste comme ça quelques instants avant de saisir le gel douche et de se savonner corps et cheveux. Une fois, qu'elle se sent propre, elle sort et s'enveloppe dans une serviette blanche fournie par l'établissement. En retournant dans la chambre, elle manque de trébucher sur son sac. « Merde ! ». Reprenant son équilibre, elle le fixe intensément. Non elle doit attendre Marko ! Pourtant la curiosité l'emporte et elle l'ouvre sauvagement pour ne pas se dégonfler. Une vieille lettre à moitié effacée tombe. Pourquoi ne pas commencer par la lire ? Juste celle-là. Promis, après elle remis tout en place. Au fur et à mesure de sa lecture, les yeux d'Irina s'écarquillent.


Dans une brasserie proche de la gare, Marko commande un énorme hamburger avec une montagne de frites. Il a très faim, la journée l'a épuisé. Revoir Irina, il n'était pas préparé... Mais ils sont parvenus à communiquer voire même à s'associer. Pour combien de temps. Il connaît sa sœur. Dès que ça deviendra trop compliqué, elle disparaîtra à nouveau. Enfin maintenant, il n'est plus seul. Il a une femme et un enfant, bientôt deux. Et elle, Irina, est-elle seule ? A-t-elle un copain, un mari ? Des enfants ? Si, elle continue son « métier » pour lequel elle les a quitté, sûrement que non. A moins que ...avec ce type-là qui la traînait toujours dans des plans foireux... Francis ? Oui c'est Francis ! Son plat arrive. Il est monstrueux ! Depuis qu'il connaît Charlotte, Marko est habitué à une certaine qualité de nourriture. Pourtant ce hamburger est délicieux et les frites croustillantes. Un régal ! Dans la brasserie, il n'y a que lui qui est seul. Mais il a toujours était seul à Dunkerque. Quand a-t-il emménagé ici déjà ? Il devait avoir treize ou quatorze ans. Avant, ils vivaient, Irina, Petra et lui dans la banlieue misérable de Paris. Mais comme, sa jumelle filait un mauvais coton, leur mère préféra allait dans le Nord. Cependant, Irina a rapidement fugué pour retourner sur la capitale. Petra ne s'est pas battue pour retrouver sa fille. « Elle nous a envoyé un message disant qu'elle allait bien » se défendait-elle quand Marko lui reprochait de ne rien faire. En effet, Irina leur avait envoyé un petit mot les rassurant mais aussi leur disant de lui fichtre la paix. Après plus rien, jusqu'au nouvel an. Encore un petit mot. Et un autre ensuite l'année d'après. Grâce à ses bons résultats, Marko a pu contracter une bourse pour aller faire ses études à Paris. Lors de son année de terminale, il avait mis les bouchées doubles pour combler sa médiocre scolarité et partir pour la capitale dans l'espoir de retrouver sa sœur. Il l'a trouvait, mais celle-ci ne voulait plus entendre parler de lui, ni de leur mère. Après des échanges houleux, ils se sont quittés sur un quai de métro, sans un regard en arrière. Sa nourriture a refroidi, Marko ne se force pas et demande l'adition.

_Ça ne vous a pas plus ? demande une jeune serveuse, nerveuse.

_Si, si, la rassure-t-il. Mais trop de problèmes dans la tête.

La jeune fille acquiesce et revient avec l'addition. Marko règle et décide de retourner à l'hôtel. Mais son chemin croise celui d'un bar. Sans hésiter, il rentre et commande une bière. Pour changer du vin. Dans le bar bruyant, il ne prête attention qu'à son médaillon. Une vieille chaîne en cuivre et un gros pendentif en cuivre aussi. A l'intérieur, se trouve sûrement une photo. De sa mère peut-être. Il hésite à l'ouvrir. Il a l'impression qu'il va violer un mort. A supposer que leur père soit mort. Autour de lui, les hommes attablés au bar l'observent du coin de l'œil mais n'osent pas s'approcher. Quelque chose dans ses traits durs les en empêchent. Cet homme n'est pas d'ici. Marko finit sa bière et en commande une autre. Il doit ouvrir ce médaillon. Maintenant !

_Quoi ? Qu'est-ce...Non...


ère Petra

sommes jamais parlé. Je pense avoir des informations de la plus haute importance sur le meurtre acha. Peut-être pourrions-nous nous rencontrez ? Vous ne devez pas avoir confiance, je sais...ne pense que ce soit un hasard si aujourd'hui vous êtes à Dunkerque. N'est-ce pas ? Vous avez    coup traverser et je suppose que vous voulez trouver la paix. Mais vous savez très bien que vous           aurez jamais. Alors s'il vous plaît venez à ma rencontre le 20 janvier 2014 au café Des Indépendants, vers 16 heures. Vous ne serez pas dessus. De plus au fond de vous, vous voulez       cir  cette histoire. Réfléchissez à ma proposition.

Je vous salue

J.M


La première question qui traverse l'esprit d'Irina : qui est ce J.M ? Un meurtre ? Mais de qui ? Les lettres sont effacées. Irina respire profondément. Cette lettre date de l'année dernière, soit à peu près le moment où Petra a changé de comportement à la maison de retraite. Est-ce la première ? Irina soupire, elle n'aurait jamais du fouillé sans son frère. Elle remet tout en place et met son sac sous le lit. Pourtant dans son lit, la lettre ne l'a quitte pas. Le meurtre de qui ? Pour décompresser, elle prend son portable et ses écouteurs. Another day in paradise de Phil Collins la berce comme lorsqu'elle était plus jeune. Demain, dès l'aurore, elle irait voir Marko !

Ce dernier est encore dans le bar à fixé la photo. C'est une jeune fille dedans d'à peine treize ans. Mais ce n'est ni sa mère, ni sa sœur. Il s'agit de Natacha... Leur grande sœur décédé dans d'étranges circonstances, il y a presque vingt ans.

Qu'est-ce que ça veut dire ?  

Un vent d'EstOù les histoires vivent. Découvrez maintenant