Première discussion

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« Euh... ouais. Je... j'enfile quelques fringues et j'reviens... »

Tous mes gestes confus pointant vers les escaliers, je ne tarde pas avant de me sortir de cette situation gênante et, sûrement observé, je pique donc un petit sprint jusque dans ma chambre. J'espère qu'elle n'y est pas entrée...

Non, rien n'inspire une fouine précédente ici, Simon, intervient directement mon subconscient. Ouais, il a raison. Tout est parfaitement à sa place et tous mes fringues sont encore par terre. Idéal ; je n'ai plus qu'à ramasser mon complet de survêt bleu et descendre juste après l'avoir enfilé pour affronter ce déjeuner qui promet d'être le plus bizarre de ma vie - ce que je fais rapidement, anxieusement. Heureusement que j'ai commandé deux burgers....

« Tu veux le king ou le cheese ? l'entends-je demander une fois en bas. »

J'ai commandé deux king... Putain de livreur macho ! Cela dit, mes pas précipités ne sont pas plus freinés par ce mauvais service que par le fait de voir Claire debout devant ma place habituelle. Pas grave - je n'ai qu'à prendre celle de ma mère, juste en face d'elle.

« Le king. Faut que j'fasse gaffe aux lipides, expliqué-je. »

Elle sourit, me regarde prendre place après m'être lavé la main. À tour de rôle, elle divise délicatement les burgers, chacun sur un plat et accompagné d'un supplément de frittes à la confiture. En s'asseyant, elle avance un plat vers moi et me souhaite souriamment bonne appétit. J'essaie de forcer également un sourire pour la remercier, mais je n'y arrive toujours pas...

On dévore avidement nos burgers au même moment, nos regards fixes. Ma force du regard, elle au moins, je ne l'ai pas perdue.

« J'adore ton survêt, me sourit-elle, puis se remet sournoisement à mâcher. »

Comme certain de la blague derrière son compliment, je me retrouve à me fouiller du regard pour essayer de savoir de quoi elle se moque. Mais non, elle n'est pas la première à admirer cette tenue, me rappelle mon subconscient, alors je ramène directement mes yeux sur mon plat. Je crois même que je l'ai un peu mise pour ça. Il flatte très bien mon teint, fais ressortir mes yeux bleus...

Mais Claire ne semble pas vexée de remarquer de mon calme que, son compliment, je l'ai déjà entendu quelque part, et des millions de fois. Non. Elle ne fait que jeter un coup d'œil sur la pendule, à gauche derrière moi, puis reviens sur moi.

« On dirait qu'elle ne va finalement pas se pointer, madame... Desi ? tâtonne-t-elle, et je me dépêche d'avaler rapidement pour rectifier :

- Denise. Juste Denise. Son aîné a trente piges mais, crois-moi, tu l'appelles une dame, et elle te déteste silencieusement pendant des semaines... »

Et elle sourit. Encore. Elle est vraiment très souriante, Claire. Ça m'agacerais presque si je n'avais pas besoin de cette bonne énergie autour de moi en ce moment. Ça me change franchement des visages tristes de mes parents, de Denise...

Claire me fixe ensuite avec un air amusé, comme Sherlock Holmes qui vient de découvrir le mobile du crime dans l' « enquête en rose », chose qui m'interpelle. Son burger empêchant de voir clairement son sourire, elle l'arrête juste devant sa bouche avant de croquer dedans et murmure :

« J'me demande combien t'en as, toi... »

Mon âge ? Je n'en ai jamais eu honte. Avec mon corps qui fait - ou faisait - flipper des dames à vue d'œil, ouais, mes dix-sept ans, j'en ai toujours été fier. Très fier.

« Tu m'en donnes combien ? repliqué-je mystérieusement en fixant mes frites.

- Moi ?

- Ouais, essaie de deviner... »

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