Ave Somnium [MxM story]

Prologue

 - AVE SOMNIUM !

Alignés le long du mur, des hommes, des femmes, attendaient que leur prêtre sacré les honore de sa présence. Ils étaient tous vêtus d'un long manteau blanc immaculé, avec une capuche rabattue sur leur visage. Des anonymes, dont le prêtre connaissait tous les noms.

Du haut de ses un mètre soixante, le fameux prêtre foula de ses pieds nus la pierre froide du sol de la cave. Sa propre cape flottait légèrement derrière lui, effleurant à peine la personne qui le suivait. La capuche sur sa tête ne couvrait en revanche pas son visage à l'air juvénile, dont l'anonymat n'était préservé que par un loup blanc orné de perles et de plumes qui recouvrait la moitié de son visage.

Tous s'inclinèrent légèrement quand il passa devant eux, et se redressèrent quand l'homme qui fermait la marche les dépassait. Ils suivirent le duo dans l'étroit couloir de pierre, uniquement éclairé par des torches enflammées accrochées au mur, pour arriver dans une salle souterraine et circulaire haute de plafond.

Un lustre était accroché au point culminant du plafond en coupole et éclairait de sa lumière l'ensemble de la salle circulaire. Tous les adeptes formèrent un cercle en suivant la forme des murs tandis que le prêtre et l'homme qui le suivait se placèrent au centre. A leurs pieds, un ensemble de chaînes reliées un collier de fer noir et des menottes étaient accrochées à un crocher incrusté dans le sol.

D'une voix claire et puissante, l'homme grand et un peu bourru qui se trouvait à la droite du prêtre depuis le début de la cérémonie, ordonna :

- Que le Krisi apporte le sacrifice.

Les adeptes s'écartèrent pour créer une ouverture dans le cercle, et le fameux Krisi avança vers le centre. Il ressemblait à tous les autres, avec sa longe cape blanche et sa capuche qui recouvrait une partie de son visage, à l'exception de l'œil noir en grand dans le dos. Les adeptes refermèrent le cercle derrière lui de façon minutieuse, chacun reprenant sa place initiale. Le Krisi tirait derrière lui un jeune homme avec un sac sur la tête qui se débattait avec ardeur en poussant des cris étouffés, comme si sa vie en dépendait.

Après tout, c'était peut-être le cas.

Le Krisi força le jeune homme à s'agenouiller, et accrocha le lourd collier de métal autour de son cou. La victime ne pouvait ainsi plus se lever, contraint de rester à genoux devant le prêtre pendant que le Krisi serrait les menottes en cuir froid autour de ses poignets. Et même si le jeune homme se débattait encore et toujours, l'adepte était rodé dans sa tâche, et ne se laissa pas intimider. C'est une fois sûr que le jeune était incapable de s'enfuir, ou de faire du mal à leur prêtre qu'il recula pour se ranger à sa place dans le cercle.

Ce dernier s'avança d'un pas léger vers la victime qui n'avait pas encore remarqué sa présence. Il posa une main frêle et délicate sur le nœud qui maintenait en place le sac en toile qui recouvrait la tête du jeune homme en face de lui pour le défaire, puis enlever le sac. Le prêtre détailla le jeune homme face à lui : il semblait plus jeune que lui, une quinzaine d'année, peut-être un peu plus. Des cheveux bruns en bataille à cause du sac en toile qui l'avait recouvert, des yeux noisettes écarquillés de terreur qui regardaient autour de lui avec appréhension, quelques boutons d'acnés sur le nez et sur les joues mais rien d'excessif. Sa bouche avait disparu, effacée par un morceau de scotch gris.

Rien qui ne sortait de l'ordinaire. Tout ceux qui s'étaient agenouillés devant lui se ressemblaient, ils en avaient vu des dizaines de garçons comme lui.

- Aujourd'hui, commença le prêtre d'une voix cristalline, remercions notre dieu Oneira de sa bénédiction, et envoyons-lui un sujet à protéger, dans toute sa bonté et sa bienveillance.

- Pour Oneira, scanda la foule d'une seule voix.

Sur cette oraison, les adeptes entamèrent le chant rituel. Le jeune homme lié au sol devint encore plus paniqué, et fixa avec horreur le visage du prêtre qui se pencha vers lui. Il parla d'une voix douce :

- Ne t'en fais pas puer meus, le monde onirique est un monde meilleur. Oneira te protégera comme l'un de ses enfants.

Mais ces mots n'eurent pas vraiment l'effet escompté pour le jeune homme, dont l'affolement grimpa en flèche à la vue de la personne qui se tenait debout, droit derrière le prêtre, avec ce qui lui parut pendant un instant un sourire carnassier sur les lèvres.

Le prêtre posa ses mains froides sur les joues du jeune homme, et le força à plonger son regard dans le sien. Le prêtre ferma les yeux, s'approcha, et marmonna dans son souffle :

Puis il déposa un baiser sur son front. Les yeux du jeune homme se révulsèrent alors qu'il poussa un long cri étouffé. Son corps fut secoué de soubresaut, et après quelques secondes, il tomba en avant, comme endormi. Sa respiration avait drastiquement ralenti au point où elle semblait presque inexistante. Mais sa poitrine se levait, et retombait lentement.

Le prêtre s'était décalé, laissant le jeune homme s'écrouler sur le sol, et avec ça, les voix autour d'eux s'arrêtèrent progressivement. Le silence flotta entre eux pendant plusieurs secondes, où l'on entendait que la respiration synchronisée des adeptes qui avaient tous baissés leur tête. Puis, au bout d'une minute sans que personne ne bouge, l'homme à la droite du prêtre annonça :

- A la semaine prochaine.