Chapitre 33

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Cela fait des jours que j'ignore les messages et les appels incessant de Soélie. Je repousse le moment des confessions car à partir de cet instant tout sera fini. Là tant que cette discussion n'a pas eu lieu, nous sommes toujours ensemble. Nous ne sommes pas séparés et cette pensée me rassure. Je peux encore consulter des photos de nous sur mon téléphone. Je peux encore écouter nos musiques favorites. Je peux encore regarder les films que nous chérissons. Je peux encore penser à elle quand bon me semble. Pour le moment, j'ai le droit de faire cela.

Quand nous serons plus ensemble, je ne pourrais plus le faire car cela sera trop douloureux et cela m'empêchera d'avancer. Dans le déni, je préfère profiter des quelques bons moments que je peux m'octroyer avant que la tempête n'arrive et bouscule tout sur son passage. J'ai longtemps réfléchi à qui j'étais et à la personne que je voulais devenir. Même si j'ai envie de devenir une meilleure version de moi-même, rien ne prédit ce destin pour moi. Rien ne me dit que je ne vais pas succomber à cette colère et que je vais devenir une enflure. Rien ne me dit que je vais réussir à vaincre mon mal-être intérieur. Rien ne me dit qu'un jour je serai libéré de cette douleur qui brûle mon âme. Rien ne me dit que je vais arrêter de souffrir comme un chien lorsque je parle d'Akhan. Rien ne me dit que je vais réussir à faire mon deuil. Rien ne me dit que je vais devenir quelqu'un de bien.

Le futur est incertain et la moindre décision impacte ma vie en bon ou en mauvais. Même si je fais tout pour que cet part d'ombre en moi reste à sa place et ne s'exprime jamais, je ne suis pas à l'abri qu'un jour je la libère. Je l'ai déjà fait par le passé, pourquoi ne serais-je pas capable de recommencer ? C'est trop aléatoire pour que je laisse le hasard en décidé. Même si j'ai une chance sur deux pour que cela arrive, le risque est trop grand pour que je l'encoure. Soélie est trop précieuse pour que je la détruise car je ne suis pas capable de me contrôler. Elle a connu son lot de drames dans la vie, pas besoin de lui en rajouter. Ses événements l'ont rendu forte, moi mes combats m'ont affaibli. Les épreuves que j'ai dû endurer m'ont rendu faible. Je suis devenu fragile et je déteste être comme cela.

La moindre évocation d'Akhan a le pouvoir de me mettre dans tous mes états. Quand je pense à lui et à ce qu'il aurait pu devenir, je ressens une tristesse infini dans mon cœur meurtrit. Mon frère est mort, il n'a pas eu droit au cœur qu'il devait obtenir. C'est Soélie qui s'en est servi et cela l'a maintenu en vie. Je me souviens de la rage qui émanait en moi quand j'ai découvert l'identité de la personne qui avait accaparé le cœur qui aurait permis à Akhan d'être ici avec moi. Je me rappelle que je voulais voir cette personne souffrir jusqu'à ce la moelle. J'éprouvais une haine immense envers elle. Soélie représentait pour moi le mal incarné. Elle était mon ennemi juré. Elle était ma proie, et j'étais prêt à tout pour la traquer et la mettre en cage. Je voulais lui enlever tout ce qu'elle chérissait. Les a priori que j'avais avant de la connaître sont à l'opposé de la jeune femme pour qui je suis tombé amoureux. L'homme que j'étais avant que je ne perde la mémoire était cruel et sans cœur.

Il était persuadé que Soélie était responsable de la mort d'Akhan mais c'est faux. Oui s'il avait obtenu sa greffe à temps, il aurait plus de chances de survie mais rien n'était joué d'avance. Oui si on ne l'avait pas mis dans un coma artificielle et qu'on l'avait opéré tout de suite, il y aurait moins de chance que son corps rejette la greffe. Mon frère jumeau était gravement atteint par sa maladie. Les patients atteints de cardiopathie congénitale sont favorables aux rechutes. C'est une période compliquée et incertaine pour eux. Il n'y a aucune garantie qu'ils rétablissent et qu'ils retrouvent leur vie d'avant. C'est tragique mais c'est la vérité. Et c'est ce qui est arrivé à Akhan. Son cœur a eu un moment de faiblesse et cela lui a coûté la vie. Le seul responsable de sa mort c'est l'hôpital. Le manque de ressource de l'établissement hospitalier lui a été fatal.

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