Chapitre 17

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ELLE ME MANQUE...
— ♠ —
**Maxence**
— Elle est belle, hein ?
Tyler tourne lentement la tête vers moi, un sourcil levé, l'air de quelqu'un qui vient d'entendre une absurdité mais qui est trop poli pour le dire tout haut.
— Qui ? demande-t-il d'un ton neutre.
Je fixe distraitement la fenêtre, bien que la simple mention d'elle suffise à illuminer ma journée.
— Lysiane. Surtout quand elle est énervée. C'est... hyper sexy.
Il laisse échapper un rire bref, presque imperceptible, comme s'il hésitait entre être amusé et consterné. Nous venons de la croiser dans l'escalier, et même furieuse, elle captait l'attention sans le vouloir. Il y avait quelque chose d'hypnotique dans sa colère, une sorte d'intensité brute qui la rendait encore plus... unique.
Nous nous installons près de la fenêtre. Tyler s'appuie contre le mur, bras croisés, son visage impassible contrastant avec l'intérêt évident qu'il porte à la conversation.
— Je me demande ce qui l'a énervée, dit-il sans me regarder.
— Lysie est un mystère, dis-je en haussant les épaules. J'en sais quelque chose, j'suis sorti avec elle. Elle est...
Je laisse ma phrase en suspens avant de soupirer :
— Unique.
Un silence s'installe alors que je repense à elle. Lysiane n'a jamais été facile à comprendre, et c'était précisément ce qui me rendait accro. Chaque jour avec elle était une énigme, un défi. Et aujourd'hui encore, elle refuse de quitter mon esprit.
Tyler observe ma réaction du coin de l'œil, puis lâche, l'air détaché :
— Si t'es encore obsédé par elle, pourquoi t'as rompu ?
Je tourne la tête vers lui, surpris.
— Tu ne sais pas ?
— J'ai l'air de savoir ? réplique-t-il avec son calme habituel.
Je me racle la gorge, mal à l'aise. Ce n'est pas le genre d'histoire qu'on aime raconter.
— Elle m'a quitté, dis-je finalement, comme si ces mots avaient un goût amer. Ça s'est terminé quand son oncle a découvert qu'elle vendait de la drogue.
Tyler arque un sourcil, et c'est peut-être la première fois que je le vois réellement surpris.
— Lysiane ? Vendre de la drogue ?
— Ouais. À l'époque, on était dans un groupe. Des petits dealers.
Tyler ne dit rien, mais son regard se durcit légèrement.
— On a arrêté quand la police a commencé à nous surveiller de trop près. Mais Lysie...
Un sourire fugace m'échappe.
— Elle était redoutable. Les gars venaient autant pour elle que pour la marchandise. Et ça... ça me rendait dingue.
Tyler garde le silence, mais je capte le léger rictus qui se dessine sur son visage.
— Pourquoi tu souris comme ça ? demandai-je, suspicieux.
— Rien... dit-il en marquant une pause, puis me regarde droit dans les yeux. Pourquoi vous ne vous êtes jamais remis ensemble ?
Je fronce les sourcils. Pourquoi il s'intéresse autant à ça, au juste ? Il sort avec Luna, la sœur de Lysiane. Peut-être qu'il essaie de comprendre ce qu'il ne voit pas encore chez elle.
— J'ai essayé, dis-je d'une voix plus amère que je ne l'aurais voulu. Mais elle, elle avait vraiment tourné la page. Elle ne m'a jamais donné d'explication. J'ai pas insisté.
Un rire sans joie m'échappe.
— Les gens disent que je suis brutal, insensible... et ils ont raison, commençai-je en marquant une pause. Mais Lysiane... elle m'a changé. Et c'est ça qui m'a détruit. Elle m'a rendu vulnérable. J'ai plongé à fond dans cet amour, et elle... elle m'a laissé tomber.
Tyler m'observe un instant, avant d'arquer un sourcil, l'air pensif.
— Si seulement Emily savait que tu sors avec elle juste pour oublier Lysiane, murmure-t-il.
Je tourne lentement la tête vers lui, un sourire ironique se dessine sur mes lèvres.
— Si seulement ta copine savait...
Je laisse ma phrase en suspens, savourant le moment où son expression change imperceptiblement.
— Tu veux que je continue ou que je m'arrête là ? demandai-je, faussement innocent.
— Pas besoin, coupe-t-il sèchement.
Un silence pesant s'installe entre nous. Puis, je souris et ajoute, d'un ton léger :
— T'inquiète, elle ne saura jamais.
Tyler me fixe, méfiant. Il sait que je joue avec lui. Il sait aussi que je pourrais aller plus loin.
— T'es un putain de démon dans un corps d'ange, lâche-t-il finalement.
Je lui adresse un clin d'œil.
— Je sais, mon ami. Je sais.
Nous avançons tranquillement dans le couloir, les mains enfouies dans les poches de nos joggings, Tyler à ma droite. Comme j'aime si bien le dire : Soyons en mode jogging. Oui, c'est une philosophie de vie. Une façon de dire qu'il faut prendre les choses à la cool. Et vu le nombre de conneries qui se passent dans ce lycée, mieux vaut adopter cette mentalité pour survivre.
Les murs sont recouverts d'affiches multicolores annonçant des événements scolaires, mais honnêtement, qui s'en soucie ? Entre la « Semaine de la bienveillance » et le « Tournoi interclasses de poésie engagée », il n'y a pas grand-chose de palpitant à voir.
Je décide donc de briser le silence avec un sujet bien plus intéressant.
— T'as vu le classement des couples au rez-de-chaussée ? demandai-je, un sourire en coin.
Tyler tourne la tête vers moi, l'air blasé avant même que j'aie fini ma phrase.
— C'est quoi encore cette connerie ?
Je lâche un rire. Les élèves de ce lycée ont des idées complètement absurdes, surtout les filles. Il suffit qu'une d'entre elles se lève un matin avec une lubie pour que ça devienne la tendance du mois.
— Tu ne connais pas le classement ? dis-je avec un air faussement choqué. Luna et toi, vous êtes premiers, mec !
Il hausse les épaules, totalement indifférent.
— Et toi et Emily ? réplique-t-il, toujours aussi calme.
Ah. Emily. La seule fille qui pense être ma copine alors que, techniquement, je suis juste là parce que... enfin bref.
— J'en sais rien. J'ai pas fait gaffe, dis-je en haussant les épaules.
Puis, avant qu'il n'ait le temps d'ajouter quoi que ce soit, je change de sujet.
— En quoi tu t'es inscrit pour le concours de talents ?
Tyler esquisse un sourire en coin.
— Rien. Je suis bon en tout.
J'explose de rire. Ce mec est un phénomène.
— Modestie niveau divin, j'adore.
— On m'a proposé plein de trucs, mais j'ai tout refusé, ajoute-t-il.
Je hoche la tête, faussement impressionné. Tyler, c'est ce genre de gars qui réussit sans lever le petit doigt. Beau, charismatique, doué dans tout ce qu'il touche. C'est agaçant. Vraiment. Mais bon, soyons honnêtes : je reste plus beau que lui.
Nous atteignons le dernier étage, là où les surveillants n'ose pas mettre les pieds. Dans les salles de ce niveau, là-haut, le ciel est couvert, l'air plus frais. Parfait pour un moment de calme.
Nous entrons dans une salle. Tyler sort une boîte de cigarettes et me la tend sans un mot. J'en prends une, il fait de même. On s'installe près de la balustrade, la fumée montant lentement dans l'air.
Le silence est agréable. Du moins, jusqu'à ce que je décide de le briser.
— Lysiane me manque, lâchai-je dans un souffle, un sourire en coin.
Je sens Tyler tourner légèrement la tête vers moi, mais il ne dit rien. Il est fort pour ça, l'indifférence bien calculée.
— Tu sors avec Emily pour l'oublier, non ?
Je ris doucement, amusé.
— Ouais, mais ça change rien. Elle est toujours là, dans ma tête. Je l'aime, cette fille. Ma Lysiane.
Ma voix se teinte d'une pointe de mélancolie malgré moi. Et merde. Ce n'est pas mon genre, ce genre d'aveux. Mais Lysiane... elle n'est pas juste une fille. Elle est elle. Une force. Un orage. Un putain de chef-d'œuvre ambulant.
Je tire une longue bouffée de ma cigarette et fixe le ciel, presque suppliant.
— S'il te plaît, Lysiane, reviens-moi.
Tyler reste silencieux, mais je sens son regard sur moi. Peut-être qu'il comprend. Peut-être qu'il trouve ça pathétique. Mais à cet instant précis, je m'en fiche.
Tout ce que je veux, c'est elle.
— Dis-moi, tu réagirais comment si, en plein... action de baise et de plaisir, la fille s'arrête net et me regarde comme si je venais de lui dire que j'étais son frère perdu ?
Je m'arrête net, surpris, avant d'exploser de rire. Sérieusement, qui ferait un truc pareil ? J'ai eu ma dose d'expériences, mais là, c'est un chef-d'œuvre d'absurdité.
— Attends... dis-je entre deux éclats de rire, peinant à retrouver mon souffle. Elle n'a vraiment pas dû aimer du tout, hein ?
Je continue de rire, incapable de m'arrêter, tandis que Tyler me fixe avec son éternel visage impassible. Mais cette fois, il y a une ombre de lassitude. Peut-être même d'agacement. Intéressant. Ça ne peut pas être sa copine qui lui a fait ça... alors il l'a trompée ?
Voilà qui devient vraiment intéressant.
— Et t'as fait quoi après ? demandai-je.
Il détourne les yeux avant de répondre, d'un ton plat :
— Je l'ai étranglée.
Mon rire redouble. J'en ai mal aux côtes.
— Attends... De manière sensuelle ou...
— Maxence !
Je me marre encore plus. Je ne fais que le taquiner, mais je vois bien qu'il commence à bouillir. Puis, il baisse légèrement les yeux, presque gêné.
— J'aurais dû faire quoi à ton avis ? souffle-t-il, le ton légèrement plus tendu. Tout allait bien. Je lui ai même demandé si elle voulait que je continue, et elle m'a dit oui. Mais d'un coup, elle m'a repoussé comme si j'étais un putain de criminel.
Je voulais rire, vraiment, mais quelque chose me retient. Tyler n'est pas un mec doux. Ça, je l'ai su. Mais ce qui est plus inquiétant, c'est que lui-même ne semble pas s'en rendre compte.
— J'sais pas, dis-je en tirant une latte. Aucune fille avec qui je l'ai fait n'a jamais réagi comme ça. Tu peux te faire pardonner ou non, tout dépend de toi.
Je laisse mon regard errer un instant vers la cour en contrebas, avant de me tourner de nouveau vers lui, un sourire en coin.
— Sérieusement, c'était qui, cette nana ?
Il tourne lentement la tête vers moi, un sourire énigmatique flottant sur ses lèvres.
— Et si je te disais que c'était Lysiane ?
Mon rire s'étrangle dans ma gorge. Mon corps entier se fige.
Mon regard se durcit instantanément.
— T'es sérieux ? demandai-je, la voix froide, tendue, prête à exploser.
Il ne me regarde même pas. Il tire sur son joint avec nonchalance, soufflant la fumée dans l'air avec un calme exaspérant.
— Je voulais juste voir ta réaction, dit-il d'un ton neutre.
Je ne bouge pas. Je le fixe, analysant chaque centimètre de son expression. Plus j'y pense, plus ça m'interpelle. Depuis qu'on se connaît, il pose toujours beaucoup trop de questions sur elle. Il va souvent chez elle. Il a accepté de sortir avec sa sœur sans broncher. Et puis, je l'ai déjà surpris à la regarder... un peu trop.
Tyler finit par me faire face de nouveau, une lueur amusée dans les yeux en voyant que ma colère ne faiblit pas.
— Hé, tu m'as vraiment pris au sérieux ?
— À ton avis ?
Il souffle lentement, un sourire narquois flottant sur ses lèvres.
— Détends-toi, Maxence. Ne te fais pas de films. Je ne l'aime pas, t'inquiète.
Je force un sourire sur mes lèvres, un sourire froid, sans chaleur.
— Oui, t'inquiète.
Tyler reporte son attention ailleurs, continuant de fumer tranquillement, comme si cette conversation n'avait jamais eu lieu. Mais moi, je reste figé.
Je le regarde, sans détourner les yeux.
Tyler... Et si tu voulais quelque chose chez Lysiane ? Quelque chose qu'elle seule pouvait te donner ?
Cette pensée s'infiltre dans mon esprit, insidieuse. Je ne suis pas paranoïaque. Je suis amoureux. Mais lui... Lui, il est un mystère. Il m'a déjà confié, un jour, qu'il avait aimé une fille avant. Une fille qui avait disparu de sa vie.
Alors quoi ?
Qui Lysiane pourrait-elle être pour lui ?
Mes doigts se crispent dans mes poches.
Il n'est facile à percer. Mais je vais comprendre. Je vais tout comprendre.
Et si ce que je découvre ne me plaît pas...
Alors, Tyler, mon cher ami...
Je te tuerai.
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