Chapitre 14

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Alexeï


Au bout du compte, il ne m'a pas été très difficile de retrouver Athalia.

C'est la seule qui est assise confortablement sur un banc au milieu de l'une des principales allées touristiques de l'arrondissement dont m'a parlé Jenny.

Elle porte un chapeau qu'elle a tant enfoncé sur sa tête, qu'il lui mange presque la moitié du visage, et de grosses lunettes de soleil qui font tâche avec le temps grisâtre qui plane au-dessus de sa tête.

— Sérieusement...

Je marmonne pour moi-même depuis l'intérieur de ma voiture en la voyant déguster son Bortsch avec appétit, et décide de rouler sur quelques mètres de plus pour aller me garer non loin de là.

J'attrape ensuite l'écharpe et le bonnet que j'ai retirés le temps de faire la route, et les enfile de nouveau avant de sortir à l'extérieur en fourrant mes mains dans les poches de mon manteau en laine.

Je vérifie bien que ma voiture soit fermée à clef, puis m'avance vers Athalia d'un pas tranquille en souriant face à son visage dont les traits se retrouvent brouillés de temps à autre par la fumée qui se dégage de son plat.

— J'espère qu'il en valait la peine au moins, je déclare lorsque j'arrive à son niveau, me laissant tomber à ses côtés d'un air paresseux.

Athalia lâche lentement son plat du regard pour se tourner vers moi dès que ma voix lui parvient, et ses yeux s'écarquillent à peine de surprise quand elle m'aperçoit.

— La peine de quoi ? me questionne-t-elle en fronçant les sourcils, pas plus perturbée que ça par mon arrivée soudaine.

Elle jette un coup d'œil méfiant aux alentours, avant de se rapprocher de moi pour parler d'un ton plus bas.

Mes yeux tombent lentement sur ses lèvres, puisque c'est la seule chose que je peux apercevoir à travers son camouflage, devenues d'un rose plus prononcé grâce à la chaleur et à la couleur du repas qu'elle mange.

— La peine que tu nous mettes tous en retard, je souffle en détournant mes iris de sa bouche pour les reporter sur l'une des boutiques qui se trouve plus loin face à nous, de l'autre côté de l'allée.

Ça a l'air d'être une boutique de mode, au vu des habits exposés dans la vitrine. Les couleurs sont pâles, mais ressortent de manière assez fade à cause du mur gris devant lequel elles ont été installées.

Mais essayer de me focaliser là-dessus ne m'aide en rien à ne plus penser à la couleur carmin des lèvres brillantes d'Athalia. Au contraire. Si je devais choisir une couleur préférée parmi toutes celles qui me sont proposées, mon choix est vite fait.

— De quoi ? me dit-elle, confuse. J'ai demandé à l'un des coiffeurs où ils en étaient justement, et si j'avais le temps de sortir trois minutes.

— Athalia, ça fait trente minutes que tu es partie, je rétorque en lui lançant un faux regard accusateur.

— Bon ok, mais y a juste un zéro en plus. C'est pas bien grave, prononce-t-elle d'un ton léger, en levant les yeux au ciel.

Elle sourit un bref instant, avant de me montrer son plat à moitié mangé d'un geste du menton.

— Mais oui, ça en valait la peine ! Ma mère m'en faisait souvent quand je vivais encore chez mes parents, m'explique-t-elle en posant son assiette creuse sur ses genoux. J'adore ça, je trouve que c'est super réconfortant.

𝑵𝒆́𝒎𝒆́𝒔𝒊𝒔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant