Chapitre 2

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Damon

Je referme la porte du bureau de mon grand-père en étouffant un rire. Quelle femme ! Je n'ai jamais vu ça !

— Damon, mon petit, vient faire un câlin à ton vieux grand-père.

Je contourne le grand bureau de bois pour prendre mon grand-père dans mes bras. Ça fait longtemps que je ne l'ai pas vu, et je regrette un peu en le sentant si frêle et fragile dans mes bras. Je sais que sa santé est défaillante, ça fait longtemps qu'il aurait dû arrêter de travailler.

— Comment vas-tu, Darryl ?

J'ai arrêté d'appeler mon grand-père, « grand-père » depuis l'internat où je suis allé, à treize ans, il n'est désormais plus que Darryl, mais il n'a jamais protesté.

— Oh bah tu sais, je me fais vieux, et toi, mon grand ?

Je souris à cette réponse classique de mon grand-père, je sais bien que sa fatigue empire de jour en jour. J'aurais dû venir le voir plus tôt, mais par pur égoïsme, j'ai repoussé au maximum l'échéance. Depuis la mort de mes parents, ça fera vingt ans la semaine prochaine, Darryl n'a plus d'héritier, mon père étant son seul enfant. C'est lui qui aurait dû reprendre la société Specter & Co depuis des années, s'il avait encore été là. Mais je ne m'attarde pas sur ce vieux souvenir, pour me concentrer sur un autre, bien plus amusant.

— Je viens de rencontrer ta charmante secrétaire, tu ne m'avais pas dit que c'était un dragon.

Darryl éclate de rire, mais je reste scotché du culot de la femme, jusqu'au bout elle était restée sur ses positions. Une secrétaire n'était pas censé être tout sourire et accueil ? J'ai bien cru que celle-là allait me bouffer, dans le mauvais sens du terme.

— Aubrey est exceptionnel hein ? Elle est la meilleure secrétaire que j'ai eue de toute ma carrière.

— Elle est surtout effrayante.

— Elle est la seule chose qui me permet encore de travailler.

J'esquisse une grimace. À cause de moi, Darryl travaille encore. Parce que je ne suis pas prêt. Je crois que je ne le serais jamais, mais je ne lui dis pas.

— Tu sais ce que j'en pense.

Darryl soupire et se lève. Malgré son âge et sa santé fragile, son corps supporte encore bien le choc, c'est un beau vieil homme, avec des cheveux blancs parfaitement coiffés et des costards toujours impeccables. Je me demande souvent si je vieillirais comme lui. Cela dit, Darryl n'a fait que peu d'excès dans sa vie, pas d'alcool, pas de cigarette, juste des cigares de temps en temps, contrairement à moi, alors il y a assez peu de chance que j'atteigne le vénérable âge de quatre-vingts ans.

— Et si on allait prendre un déjeuner ? Je pense qu'il faut qu'on parle.

Je sais de quoi il veut me parler, mais je fais mine de ne pas savoir, il prend des documents sur son bureau. Il a l'air sûr de lui, alors je le suis hors du bureau. Aubrey est toujours derrière son ordinateur, elle se lève en nous voyant paraître et je m'autorise à la regarder plus attentivement. Elle est... tirée à quatre épingles. C'est exactement l'expression qui me vient en la regardant. Elle a des cheveux blonds coiffés dans un chignon absolument parfait duquel par le moindre cheveu ne semble oser s'enfuit. Elle porte un chemisier cintré, boutonné jusqu'au col et un pantalon noir en tissus souple parfaitement repassé. Elle est sobrement maquillée derrière ses grandes lunettes carrées à bord noir, ce qui ne cache pas l'éclat de son teint, et ses lèvres joliment ourlées. Comme la première fois que je l'ai vu, j'ai terriblement envie de tendre la main pour la décoiffer ou pour froisser son chemisier. Un tel niveau de perfection me donne envie de remettre un peu de désordre. Enfant, je ne supportai pas que les immenses pièces du manoir de Darryl soient toutes si parfaitement rangées, alors je faisais toujours en sorte de laisser traîner quelque chose. Ça rendait la maîtresse de maison, ma grand-mère, folle.

Strictement Professionnel - Merci de ne pas flirter avec la SecrétaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant