Chapitre XLII

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La peur m'envahit rapidement et je n'arrivai pas à détourner mes yeux de l'homme qui avançait vers nous, d'une démarche sûre et autoritaire. Joshua me scruta un instant puis compris qu'il se passait quelque chose. Lorsqu'il tourna la tête, une expression indescriptible passa en un éclair sur son visage, puis il devint soudain complètement impassible.

-Que fais-tu là ? Demanda alors le PDG des entreprises LPE et, accessoirement, père de mon petit-ami.

Son accent français me rappela vaguement celui de Charlotte et cela me réconforta un bref instant.

-Tu me suis maintenant ?!

Joshua se leva, vraisemblablement énervé et fixa son père, une lueur de défi dans les yeux.

-Je t'ai demandé ce que tu faisais là, fils ! Je suis bien obligé de te suivre, puisque tu me mens !

Il semblait complètement froid et serein, mais ses poings serrés et la colère que l'on pouvait lire dans ses yeux bleus prouvait le contraire. Je le dévisageai un moment, profitant de ce duel de regards entre père et fils et remarquai alors l'extraordinaire ressemblance entre eux deux. C'était un homme avec beaucoup de prestance, grand et svelte, ses cheveux un peu longs, savamment plaqués en arrière, donnaient du style à son allure et il portait une paire de lunettes de vue d'une marque de luxe, ce qui lui allait plutôt bien et n'enlevait rien à son élégance naturelle. Lorsqu'il était plus jeune, monsieur Legrand, devait être aussi beau que son unique héritier et malgré son âge, il restait néanmoins séduisant et classe. Sans que je m'en aperçoive, il m'observait à son tour, attendant sûrement que Josh fasse enfin les présentations.

-Tu ne me présentes pas à ton amie ? Lâcha-t'il alors, appuyant bien sur le dernier mot.

Je compris aussitôt qu'il savait que j'étais bien plus qu'une amie et, au vu de son sourire, il semblait connaître mon existence depuis bien longtemps.

-Je...voici Kate ! Ma...ma...

Je le coupai immédiatement et me levai tout en tendant une main qui se voulait ferme à l'égard de son père.

-Une amie ! Continuai-je, tout en plantant mes pupilles dans les siennes.

Il eu l'air déboussolé, un court instant, puis me prit délicatement le bout des doigts et les porta à ses lèvres, me faisant un baise-main qui me parut très déplacé.

-Tu as de très bons goûts Joshua, ton amie est superbe ! Susurra-t'il, tout en analysant ma réaction, qui ne se fit pas attendre.

Je rougis rapidement, baissant la tête pour ne plus voir ses yeux qui semblaient vouloir sonder mon âme.
Mon petit-ami comprit tout à coup ma gêne et lui demanda ce qu'il voulait exactement.

-Te ramener chez nous ! Tu as pas mal de dossiers à regarder concernant l'entreprise et je n'aime pas trop que tu perdes ton temps à ne rien faire, même en si charmante compagnie !

Je n'osai toujours pas lever mon regard vers lui, sentant le sien explorer chaque parcelle de mon corps, ce qui me mît extrêmement mal à l'aise.
Le père de mon copain était-il réellement en train de me draguer devant son fils ?
Ça n'était pas possible, et pourtant c'était vraiment l'impression que j'avais et Joshua pensait sûrement la même chose vu qu'il s'était clairement mis entre lui et moi, essayant de lui couper la vue, mais aussi de l'empêcher de me parler et d'essayer d'en apprendre davantage me concernant.

-Je suis juste sorti boire un verre ! Il n'y a rien de mal là-dedans ! Expliqua-t'il, de plus en plus agacé.

-Je pense avoir été clair ! Avec ta mère, nous t'avons interdit de sortir ! À part au lycée, nous ne voulons te voir nulle part ailleurs qu'à la maison ! Me suis-je bien fait comprendre ?

Joshua resta immobile un long moment, puis il hocha la tête, complètement résigné.

-Mais rien ne t'empêche d'inviter de charmantes demoiselles à la maison ! N'est-ce pas, Kate ? Continua-t'il, tout en arborant un large sourire aux lèvres.

Je regardai brièvement dans leur direction et sourit timidement. Je n'aimais pas sa façon de prononcer mon prénom, ni même sa voix mielleuse et caressante, qui me donnait des frissons de déplaisir.

Je vis alors mon chéri attraper son sac et sa veste, sans oser lever les yeux vers moi. Je savais que je ne pouvais pas lui demander de rester, son père voulait se servir de moi pour l'atteindre et je n'avais pas l'intention de lui donner plus de cartes en main pour asservir son fils. Je restai là, abasourdie et profondément triste, mais je n'en laissai rien paraître. Joshua posa alors ses beaux yeux océan sur moi et me chuchota qu'il était désolé et qu'il m'aimait, je lui souris discrètement mais ne pus lui répondre, sentant le regard perçant de cet homme que je n'appréciais guère.

-Mlle Milton, vous êtes, bien sûr, la bienvenue chez nous quand vous le désirerez ! Annonça-t'il avec un calme déconcertant.

Ça c'était le comble, il connaissait mon nom de famille. Il avait dû se renseigner sur ma famille et moi. Peut-être savait-il des choses personnelles ? Me faisait-il suivre ?
Je sentis l'air manquer dans mes poumons mais je ne montrai aucune faiblesse. Il était hors de question que ce bourreau ait une quelconque emprise sur moi, je n'étais pas sa chose et je ne le serai jamais.

-Au revoir monsieur Legrand ! Dis-je enfin, essayant de lui montrer qu'il ne m'impressionnait guère, même si c'était complètement faux.

J'étais morte de trouille, je ne voulais pas qu'il renvoie Joshua en France ou n'importe où, loin de moi. Je ne pouvais vivre sans lui à mes côtés et ça, il s'en fichait éperdument, seule son entreprise et sa réputation comptaient. Je me rappelai tout à coup, cette impression de prétention et d'arrogance que j'avais perçu, à tort, chez Josh à son arrivée au lycée. Cela ne venait pas de lui, mais bien de l'homme qui l'avait élevé à son image, lui inculquant des valeurs qui n'étaient que superficielles. L'amour, l'amitié, l'empathie étaient des concepts désuets de sens et inutiles pour ce businessman sans cœur, seul le pouvoir, la puissance et l'acharnement payaient dans la vie.

-À plus tard ! Murmura mon copain, en proie à une terrible tristesse quasiment palpable.

-Bonsoir Kate et à bientôt, je l'espère sincèrement et...appelez-moi Philippe !

Son regard me transperça littéralement et je m'immobilisai, de peur de sentir ses mains et sa bouche sur mon corps. Cette pensée me terrifia et je n'avais qu'une envie, rentrer chez moi, prendre une douche et me coucher.

Monsieur Legrand passa alors devant le bar et jeta une importante liasse de billets, sûrement pour payer nos consommations, qui ne valaient que quelques dollars, puis ils montèrent tous les deux dans une superbe limousine garée sur le trottoir d'en face. Je vis Joshua tourner la tête vers moi et m'envoyer un doux baiser avec sa main.
Puis je les regardai partir, regrettant déjà cette malencontreuse rencontre et pensant aussitôt aux conséquences que cela aurait sur nos vies.

Une Rencontre Inoubliable !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant