Chapitre 4 : A la nuit tombée

46 9 31
                                    


"Jésus répondit : N'y a-t-il pas douze heures au jour ? Si quelqu'un marche pendant le jour, il ne bronche point, parce qu'il voit la lumière de ce monde ; mais, si quelqu'un marche pendant la nuit, il bronche, parce que la lumière n'est pas en lui." 

- Jean 11 :9-10

La fête battait à son plein. Les Semia venaient de descendre de scène sous les acclamations du public et commençaient à ranger leurs instruments, ce qui donnait du répit aux danseurs sur la piste. Tout le monde transpirait. Moi-même, j'avais dû me rafraîchir plusieurs fois, alors que je n'avais pas dansé longtemps.  Louis était venu me chercher de force puisqu'il s'était fait recaler par Dylan qui lui avait donné une raclée verbale. Vanessa l'avait délaissé un moment pour rejoindre Chloé qui était arrivée un peu plus tard. Dan aussi nous avait chassé de sa soirée dès qu'il fut invité par un étudiant pour boire un verre. 

Je lavais une énième fois mes mains et mon visage tout en observant mon téléphone sur le rebord de l'évier. Le stress était toujours présent. Mon absence avait dû être remarquée et un autre coureur avait dû me remplacer au nom de Garen. Je ne me sentais toujours pas prêt à le déverrouiller. Son clignotement incessant en disait suffisamment long, sur ce que j'allais découvrir. 

Derrière moi, un homme titubant sortit d'une cabine. Je le reconnus assez rapidement, il s'agissait de l'homme qui avait importuné Gaëlle en début de soirée. Le regard vide, il observait son reflet. On n'y voyait qu'un corps gorgé de sueur où les poils de torse s'y baignaient. Il empestait.

Un travail qu'il devait haïr, des projets inaboutis, aucune vie intime ou personnelle, un échec social.  

Louis lui aurait probablement dit de prendre une douche et de "baiser" un coup car selon lui, ça arrangeait tous les problèmes. 

J'essuyais mes mains rapidement pour ne pas m'éterniser ici et glissais mon téléphone dans ma poche arrière. Un dernier regard vers lui me confirma simplement un peu plus que cet homme était au fond du gouffre.  

A peine sortie des toilettes pour homme, je me retrouvai face à Emina qui sortait des toilettes pour femme. On s'arrêta un instant, surpris de se croiser à un tel endroit, au même moment, prêt à nous entrechoquer. Elle sourit de toutes ses dents et détourna le regard vers la foule qui allait nous aspirer. 

- Tu viens d'arriver ? lui demandais-je sans crier car nous étions un peu à l'écart de la forte musique. 

- Ça fait presque deux heures à vrai dire.

Elle reporta son regard vers moi maintenant que nous avions une conversation qui la détourna de ses pensées. 

- Ah... il y a du monde. Je n'avais pas fait attention. 

- Je comprends t'inquiète pas, je t'ai vu il n'y a pas longtemps non plus, dit-elle d'une voix un peu plus aiguë qu'habituellement. 

Venait-elle de mentir ? Je souris de plus belle, ne voulant pas en tenir rigueur.  Ses yeux orangés tiraient vers le brun dans cette pénombre ce qui la rendait un peu moins surnaturel même si elle était toujours aussi maquillée voir plus qu'habituellement et les cheveux à demi colorés.  Mais je pus apprécier un peu plus sa transparence ce soir. Peut-être qu'elle avait déjà bu quelques verres qui la rendait plus accessible. 

- Tu n'es pas avec Louis et Dylan ? reprit-elle pour ne pas laisser de silence entre nous et ne pas partir chacun de nos côtés. 

- Ils sont volatiles. Par contre Aaron est un véritable pot de colle bien plus depuis qu'il a atteint son troisième verre. Alors je traîne un peu dans ce coin de la pièce pour me poser les oreilles.

La Course vers le RoyaumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant