J'observe mon silence habituel, me contentant de passer en revue chaque visage attentif. Mikhaïl sait très bien que si nous pouvons causer des dégâts importants dans les rangs de l'ennemi, nous n'en expédierons en enfer qu'une partie qui se reformera comme une hydre. C'est surtout Salmanov qu'il espère coincer.
— Anton, ordonne-t-il, tu prends le quai de chargement, côté Willamette, Pavel le quai de déchargement. Ils ne sont distants que de vingt mètres environ. Alexeï, tu entres par le sas du personnel côté nord. Nikolaï et moi prendrons le local d'entretien côté sud. C'est peut-être là qu'ils l'ont enfermée pour pouvoir la dégager rapidement. Inutile de vous préciser que ce serait l'idéal.
Il fait un tour d'horizon des têtes penchées sur leur écran.
— Quand nous sortons d'ici, chaque groupe se positionne en attente à cent mètres de son point d'entrée. On y va tous au même signal. Si vous avez le moindre problème, n'attendez pas de l'avoir réglé pour en informer les autres. Ils ne nous attendent pas, moins d'une heure après l'enlèvement de leur otage. C'est notre point fort. Il ne doit pas vous faire oublier qu'ils peuvent très vite s'organiser. La façon dont ils ont mené leur action prouve qu'ils peuvent être rapides et efficaces. Nous le sommes plus qu'eux et nous sommes mieux entraînés.
Il se répète, mais les hommes ont besoin de l'entendre et d'y croire. À deux doigts d'y laisser leur vie, la confiance qu'ils portent à leur chef est primordiale. Je me dégage du groupe et m'approche de la porte. D'après le plan, cette partie de la réserve donne sur une ruelle. J'observe la serrure avant de sortir mon cran d'arrêt de ma poche. Il m'a tiré de situations bien plus complexes que celle-ci. La voix de Z grésille dans mon oreillette au moment où j'entre la lame dans la fente de la serrure.
— Si un groupe doit sortir, c'est maintenant. C'est dégagé pour toi côté local d'entretien, Mikhaïl.
Deux ou trois manipulations et un léger claquement m'indiquent que le barillet coopère. J'entrouvre la porte pour vérifier avant de me retourner. Les lumières des écrans se sont éteintes et les portables ont rejoint les poches. Les M16 reprennent leur place sous les manteaux.
— Z, à partir de maintenant, tu es le seul à avoir une vue d'ensemble, rappelle Mikhaïl. Tu guides les groupes.
— Oui, Mikhaïl.
Il se tourne vers le groupe, balaie les trois équipes du regard. Je sors mon Glock, vérifie le chargeur et engage une balle dans la chambre. Bien qu'il soit armé de la même manière, Mikhaïl contrôle l'accès fluide à ses poignards. Il pense à sa femme, je le perçois au soin qu'il apporte à ses gestes. Il n'est plus seul. Ce détail le mine et nous rappelle à quel point la solitude est notre meilleure alliée. Se laisser parasiter par ce qu'on abandonne derrière soi n'est pas la condition idéale d'une opération réussie.
— Rendez-vous ici dans une demi-heure, se ressaisit-il. Personne n'attend personne. Vous dégagez dès que vous le pouvez. Compris ?
La rumeur habituelle lui répond, il n'en attend pas davantage, pas plus qu'il ne leur souhaitera bonne chance, il en a assez dit. La seconde d'après, nous sommes tous les deux dans la ruelle. Ça gueule près de la fontaine. Un rapide coup d'œil me montre une bagarre entre deux poivrots et le troisième qui s'en prend autant en essayant de les séparer.
— On en profite, me lance Mikhaïl en disparaissant sur Akeny Street dans l'ombre du Centre humanitaire.
Je cours derrière lui en longeant le bâtiment. La ligne d'arbres sur l'avenue nous cache de l'agitation autour de la fontaine. Je tourne au coin du bâtiment dans les pas de Mikhaïl et m'accroupis contre le mur à ses côtés.
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Le Survivant - la bratva Volkov - tome 2 [terminé]
RomanceLes 10 premiers chapitres sont disponibles - profites-en. ---------- Ce tome 2 reprend un élément non résolu du tome 1, sur les points de vue de Nikolaï Vassiliev, le bras droit de Mikhaïl Volkov, et de Leslie Johnson, la secrétaire de direction de...