parix-roubaix - enfer du nord
victoire finale
un pavéL'eau fraiche tombe sur le corps de Selina Van Bogaert alors qu'elle a rejoint l'espace prévu à cet effet après être restée pendant une dizaine de minutes hagarde au milieu de l'aire d'arrivée. Les mots de réconfort de son entraineur étaient alors bien faibles en comparaison avec la douleur, la tristesse et la détresse qui la transperçait. Un mélange de terre, sang et larmes glisse sur son corps alors que le liquide nettoie sa peau salie après la course la plus éprouvante de sa vie. Elle frotte faiblement à l'aide de ses bras et mains meurtris son corps sombre tant il est recouvert de crasse. La boue séchée a la couleur grise des pavés et celle humid,e celle marron de la terre mouillée.
Les gouttes sont froides mais cela ne l'embête pas. Elles restent bien plus chaudes que les flaques dans lesquelles elle est passée et qui éclaboussaient ses jambes, que le vent gelé se prenant dans sa veste, que la boue projetée sur ses mollets et l'intégralité de son corps et visage, ou que l'eau imbibant ses vêtements après que son corps se soit écrasé contre les pavés faisant vibrer l'intégralité de ses os.
Désormais sommairement nettoyée, elle peut prendre conscience de la taille de la plaie recouvrant son coude la lançant bien trop fort. Elle s'écroule par terre alors que ses jambes tétanisées par l'effort produit pendant de trop nombreuses heures à pédaler et se faire secouer sur les pires routes qui lui aient été données de parcourir lâchent sous son poids une nouvelle fois alors qu'elle n'a plus envie de le porter. Les larmes ruissellent sur ses joues alors que l'amer goût d'échec revient en bouche et que la douleur anesthésiée par l'effort et l'objectif se fraye enfin un chemin jusqu'à son cerveau. Gagner le premier Paris-Roubaix féminin était un rêve, son rêve, son objectif pour cette année et il s'était évanoui à l'entrée de la Trouée d'Arenberg quand un des immenses pavés avait fait éclater sa roue avant la propulsant avec force sur les autres.
Une main se tend devant elle et lui fait relever ses yeux rougis par les gouttes salées de déception, douleur et épuisement. Elle tombe alors sur le visage fatigué mais souriant de Stella Mancini, sa concurrente italienne. Elle se saisit de celle-ci alors qu'on l'aide à se relever. Dans la sienne, elle lui parait non abimée, comme si la meilleure cycliste de peloton n'avait pas vécu la même course qu'elle. Comme si les secousses des pavés sur ses mains tenant le guidon n'avaient pas échauffé la peau des paumes comme la sienne, désormais recouverte de larges cloques mettant sa chair à vif.
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REGENBOGENFARBEN ✓
Short Storyalors qu'elles se battaient pour des maillots colorés tout au long de l'année, stella & selina avaient un unique but, régner sur le monde entier, car alors rien ni personne ne pourrait leur retirer une partie de leur identité. j u i n 2 0 2 4 - s e...