La fin de l'histoire?

9 1 0
                                    

Ainsi, l'histoire d'Alice était terminée.
Apolline, les yeux posés sur l'ultime point, ne parvenait pourtant pas à refermer le livre. Et comment l'aurait-elle pu alors que le récit semblait à ce point incomplet ?

Debout, dans le vestibule de la maison désormais vide, Apolline laissa échapper un soupir.
Les déménageurs avaient quitté les lieux, juste pour un moment. Ils reviendraient ; bientôt. Alors, ils s'attaqueraient au grenier.

Alice avait vécu simplement, refusant toujours de s'encombrer de ce qu'elle considérait comme étant inutile. De ce fait, elle avait traversé son existence sans regrets ni remords et sa maison avait toujours été le reflet de cet état d'esprit, meublée uniquement de l'essentiel. Et pourtant, sous les combles, il y avait une pièce que les déménageurs avaient qualifié de grenier.

Intriguée, Apolline avait gravi l'étroit escalier. Curieusement, les marches ne semblaient plus si haute et l'ascension n'était pas aussi rude que dans ses souvenirs. La sensation rugueuse du papier peint sous la pulpe de ses doigts était la même, cependant. En haut des marches, un malaise la saisit. Ses yeux butaient sur le mur vide, à la recherche d'un tableau qui n'était, évidemment plus là. Elle finit néanmoins de pénétrer sous les combles, dans une lumière trop vive qui dégringolait des vasistas désormais dépourvus de rideaux.

Apolline entra dans la pièce qui avait, longtemps, servi de chambre d'appoint et ne put s'empêcher d'inspirer profondément. L'odeur de la poussière récemment soulevée s'imposa aussitôt, en même temps que le doux parfum de lavande évadé d'un bouquet fantôme. Apolline laissa à la vague de nostalgie la liberté de venir déposer quelques souvenirs à ses pieds avant de refluer doucement. Un doux sourire aux lèvres, elle acheva de traverser la pièce, se dirigeant résolument vers un pan de mur qui semblait s'être mis à bailler.

Une ficelle lestée d'une petite bille de bois pendait juste derrière le seuil. Apolline exerça une légère traction et une lumière chaude fit sortir la petite pièce de l'ombre. En termes de taille, on était plus proche du débarras que du grenier. Il ne contenait d'ailleurs qu'une seule et unique valise. Vieille, la valise. Mais visiblement encore en très bon état. Timidement, Apolline s'avança avec, au cœur, une joie nouvelle. L'histoire d'Alice était terminée, oui, mais Apolline, manifestement, n'en avait pas tout à fait terminer la lecture.


La valise d'AliceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant