Chapitre 10 ༄

29 5 0
                                    

J'ai l'immense déception de vous annoncer que je vais ralentir la publication à partir de ce chapitre. Je n'ai pas eu beaucoup le temps d'écrire récemment (ni la motivation je vous avoue), donc ça va être compliqué de boucler les chapitres en temps et en heure pour quelques temps.

Je ferai de mon mieux pour poster le plus vite possible et revenir à mon rythme habituel ! Je vous souhaite une excellente lecture,


2024, Séoul (Z).

J'essuie pour l'énième fois aujourd'hui mes mains moites sur mon short, et reprends mon pinceau entre les doigts. Je trace nerveusement les courbes du dos de San sur la toile, mon pied tapotant contre le parquet. Pourquoi suis-je si nerveux ?

Mes yeux se posent sur le mannequin, et la vision de son corps bien sculpté est comme une brûlure sur ma rétine. Je m'efforce de détourner le regard dès que possible, et tente de me concentrer sur l'œuvre en construction. Malheureusement, la concentration s'avère impossible aujourd'hui. J'ignore pourquoi.

San semble s'apercevoir de mon trouble et ma difficulté à rester focalisé sur ma tâche.

‒ Wooyoung, tu vas bien ? s'enquit-il.

Je hoche la tête fébrilement, les sens distraits par la vue que j'ai sur lui, par l'odeur caractéristique de son shampoing qui flotte jusqu'à moi, par la chaleur qui émane étrangement de mon propre corps lorsque mes yeux se posent sur le sien.

J'essaie de me remettre au travail, mais malgré mes tentatives, mon souffle ne se calme pas, mes jambes ne s'arrêtent pas de trembler et le stress coule toujours dans mes veines à son allure maximale. Ce dernier court le long de ma colonne vertébrale, picote ma nuque et tire sur mes omoplates désagréablement. J'en ai mal au dos.

Mon pinceau parvient à s'échouer là où il ne fallait pas, et je pousse un grognement de frustration.

‒ On devrait arrêter la séance pour aujourd'hui, me fait remarquer San. Tu es trop tendu.

‒ Non ! refusé-je. Ne bouge pas, on continue.

Il ouvre la bouche pour protester, mais la referme aussitôt, résigné. Je continue sur ma lancée et tente de rattraper les erreurs que j'ai faites sur la toile, les poils du pinceau se baladant à gauche et à droite, partout sur la toile. Ça ne ressemble à rien du tout.

Une sourde frustration tend mes muscles, et j'ai la soudaine envie de déchirer la toile et l'envoyer valser contre le mur.

‒ Allez, on arrête, ordonne San.

Je ne proteste pas cette fois, et ne l'empêche pas de se lever. Une de ses mains vient maintenir le drap autour de sa taille, tandis que l'autre fourrage dans ses cheveux. Je déglutis et le suis des yeux, encore davantage nerveux.

Mes doigts jouent nerveusement avec mon crayon de papier. Mes yeux se baissent sur ce dernier, puis remontent vers le brun, effleurant au passage la vue de son ventre et son torse fermes.

D'un coup, ce n'est plus mon crayon qui veut le croquer, mais c'est bien moi.

Un incendie naît dans mon bas-ventre, tandis que San s'approche encore davantage de moi, jusqu'à se pencher sur mon visage, ne laissant que quelques maigres centimètres entre nous. Je dois user de toute ma volonté afin de ne pas céder à la tentation de ses deux bouts de chair roses qui me sourient.

‒ Te surmène pas, murmure-t-il tout bas.

Il passe dans mon dos, tandis que je suis toujours assis sur mon tabouret. Ses mains se posent sur mes épaules, ce qui me fait frissonner. Je peux sentir son souffle cogner contre ma tempe et son torse dénué de tout vêtement se coller dangereusement contre mon dos. Ma respiration bute.

Ses mains bougent lentement sur les muscles de mes épaules, entamant un massage délicieux. Je ferme les yeux et m'abandonne sous ses doigts de fée, sentant toute la tension s'évaporer comme par magie.

Bien qu'une petite voix dans ma tête me crie de le stopper, je ne le fais pas.

405 avant J.C, Corinthe (A).

Ma peau frissonne légèrement alors que je m'expose à la brise nocturne d'un frais apaisant. Mon dos épouse rapidement mon pilier favori, et les muscles de mes jambes se déroulent lentement devant moi, à la manière d'un félin. Je ne peux retenir un bâillement – de toute manière, qui viendrait me le reprocher ? – et m'abandonne à la contemplation de la nuit tachetée au-dessus de moi.

La sensation pesante sur ma poitrine s'allège ; je me sens vivre, une fois la nuit tombée. Plus de foule qui secoue et s'écrie, plus de soleil qui tape et fait transpirer, seuls le calme apaisant et la nocturne clarté de l'astre immaculé au-dessus leur survivant.

Je me sens reposé et agréablement ressourcé par cette tendresse ambiante, par cette douceur qu'a le vent de caresser mes cheveux ébène au rythme de mon souffle. Soudain, je peux sentir un pli dans la brise, un froissement de vêtement, une fragrance qui ne m'est pas inconnue.

San apparaît avec un mince sourire entre la lune et moi, et s'assied face à moi. Nous ne nous saluons pas davantage, nos rencontres devenues comme un rituel tacite entre nous, chaque nuit.

‒ Wooyoung.

Sa voix est comme tapissée d'un quelconque sentiment dissimulé, comme à demi-étouffée. J'attends qu'il parle, mais il ne le fait pas. Seuls ses yeux clairs dans les miens m'offrent une quelconque forme d'échange abstrait.

‒ Oui ? le relancé-je.

Un beau sourire décore ses lèvres, et il incline la tête pour mieux plonger ses pupilles dans les miennes.

‒ Rien, souffle-t-il. J'apprécie juste ton nom, et la manière qu'il a de glisser dans l'air jusqu'à toi.

Une agréable chaleur dévore ma peau à son étrange compliment. Je ne peux l'empêcher d'envahir mon visage entier et la laisse se propager jusque mes joues à présent brûlantes.

‒ Dis-moi, murmure San, est-ce que tu connais ton père ?

‒ Non, réponds-je aussitôt.

Je réfléchis un instant, le regard levé vers l'infinité qui, sûrement, abrite mon père ou son âme.

‒ Je suis né ici, continué-je. Ma mère ne parle pas beaucoup de lui, alors il ne me manque pas. J'ai toujours été au service de Monsieur Nikolas.

Le fils de ce dernier acquiesce pensivement, les yeux ancrés dans les miens.

‒ As-tu grandi dans de dures conditions ? s'intéresse-t-il encore.

‒ Les mêmes qu'aujourd'hui.

Il hoche le menton compréhensivement, et s'approche légèrement de moi, ses genoux en tailleur cognant contre les miens, alors qu'ils adoptent la même position.

‒ Tu n'es pas trop fatigué, à veiller ainsi, chaque soir ? demande-t-il encore. Tu te lèves très tôt chaque matin...

‒ Ça va, réponds-je dans un haussement d'épaules.

‒ Sûr ?

Je laisse pointer l'amusement dans mon regard.

‒ Sûr sûr.

Il sourit largement, et parcourt du regard les alentours. L'endroit est comme transformé, de nuit. Lorsqu'il reporte son attention sur moi, un mince sourire fleurit au bout de ses lèvres. Il ancre ses prunelles brûlantes dans les miennes à nouveau, et reprend de sa douce voix.

‒ Viens dormir avec moi, s'il-te-plait.


Chrysanthème [Woosan]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant