La dégringolade

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"Danser c'est comme parler en Silence, c'est dire plein de choses, sans dire un Mot" Yuri Buenaventura

Une lettre... une vulgaire lettre laissée à mon intention pour me dire qu'il partait en Espagne. Je suis juste blasé qu'il ait agit de cette manière. Rajaar n'a même pas eu le courage de m'affronter. Je suis juste anéanti. Compte-il me laisser un vulgaire mot lorsqu'il sera marié et qu'il partira définitivement? Bordel, j'ai trop mal. Je n'arrive plus à respirer rien que de penser à tout cela.... je m'effondre littéralement alors que je me trouve je ne sais où... j'ai erré dans le complexe afin d'espérer me changer les idées. Heureusement qu'il a eu la présence d'esprit de me laisser un passe-droit. Je me retrouve à genoux et me laisse tomber sur le côté en position fœtale ne sachant plus faire autre chose que rester dans cette posture. Je sens les larmes dévaler sur mes joues et je ne suis plus capable de bouger. La douleur m'empêche tout mouvement. Je préfère encore que l'on m'achève et qu'on en parle plus. Cette souffrance.. elle me tue à petit feu au fur et à mesure que les jours s'écoulent. Je ferme les yeux et reste comme une loque. Les larmes finissent par ne plus être. Je n'en ai plus en stock à force de pleurer et l'énergie a quitté mon corps. Cela fait des jours que je ne mange quasiment plus. Des jours que je peine à dormir ne serait-ce qu'une heure dans la nuit...

Je vais sans doute finir à l'infirmerie, être forcé de me nourrir ou perfusé et on me mettra peut-être une sonde gastrique... qui sait... ou alors on s'achèvera comme un vulgaire animal. Peu importe le scénario... je m'en fous. Je n'ai plus goût à rien, je sombre peu à peu dans les abîmes. Personne ne peut plus rien pour moi. Je suis condamné à souffrir en silence. Condamné à errer dans ce putain de complexe à attendre la mort comme tous les autres. Je n'ai plus de raison d'être. Et je culpabilise aussi. J'ai été beaucoup trop loin, mais j'ai été aveuglé. J'ai été stupide. Si je parviens à tenir le choc en l'absence du Prince... je sais que je ne serais plus le même... je ne le suis déjà plus depuis un moment d'ailleurs. Je voudrais déjà être mort... ça serait plus simple, la mort paraît douce à côté du fait de devoir vivre. Ce n'est pas une vie de rester enfermé à devoir écarter les cuisses. Ce n'est pas une vie de me retrouver séparé de lui. Et je me sens happé par le sommeil que j'ai en retard... manquant d'énergie, je sombre dans le néant et l'accueille à bras ouverts. Mes paupières sont lourdes... extrêmement lourdes. Et je ne sais pas vraiment combien de temps je demeure dans cette posture, recroquevillé sur moi-même, posé à l'ombre d'un arbre, ignorant que mes pas m'ont conduit dans les jardins. Les yeux clos, je dois ressembler à un ange endormi... un truc du genre... Mais, je n'ai rien d'un ange. Je ne suis qu'un idiot, un boulet dont il vaut mieux se débarrasser rapidement. Le Prince ferait mieux de me larguer tout de suite à quelqu'un d'autre afin que je sois plongé dès à présent dans la réalité de la chose. IL ne sera pas là éternellement. Ce constat est horrible et extrêmement douloureux. Cette lettre... demeure dans ma poche, seule preuve que tout ce qui se passe est bien réel. Rajaar n'est pas un fantôme ou une illusion... bien que parfois, je voudrais que ça le soit... ça serait plus facile d'admettre que j'étais fou.. peut-être que je suis même en train de vraiment le devenir.

Je ne sais pas combien de temps je demeure en position foetale perdu dans les bras de Morphée. Je suis tellement épuisé que j'avais sombré dans l'inconscience sans m'en rendre compte. Je ne réagis que lorsque je sens une main dans mes cheveux. Je sursaute totalement alerte avant de réaliser qu'il n'y a aucun danger lorsque j'entends une voix douce me dire: -Tout doux Siobhan, tout va bien, tu ne risques rien. Je croise alors le regard de la jolie espagnole. Il s'agissait de la sulfureuse Elena, une amie et confidente. Mon cœur semble se calmer en voyant la demoiselle. -Oh.. Elena.. Je.. Qu'est-ce que tu fais là? demandais-je, un peu bêtement alors que je reprends peu à peu mes esprits. -Je t'ai trouvé ici, assoupi et je dois dire que ça m'inquiète et je ne voulais pas qu'il t'arrive une bricole donc je me suis dis qu'il valait mieux que je reste auprès de toi en attendant que tu te réveilles. Tu m'as l'air épuisé. Est-ce que tout va bien pour toi? Il s'est passé quelque chose? Tu souhaites en discuter? Tu sais bien que tu peux compter sur moi en cas de besoin. ça fait un petit moment que nous n'avons pas eu l'occasion de se voir. Est-ce en lien avec l'incident dont j'ai entendu des échos? Apparemment tu aurais assommé un garde du complexe. Je me redresse doucement et me mords la lèvre inférieure avant de baisser les yeux mal à l'aise. -Je.. j'ai merdé. Il soupire en se frottant la nuque puis croise le regard de la jeune femme. -Je constate que les rumeurs vont vite au travers du complexe.. Et, ce que tu as entendu, c'est malheureusement vrai. J'ai pas vraiment réfléchi.. Je voulais seulement venir en aide à Madeline. Stupide idée! J'en ai payé le prix fort et Alan m'a marqué pour le reste de mes jours. Je fais encore des cauchemars. Comment vais-je parvenir à me soumettre alors que ça m'empêche après de dormir? -Et non, ce n'est pas à cause de ça.. En fait, j'ai.. Fait le con..avec mon maître. J'ai fait quelque chose que je n'aurais pas dû et je ne sais pas comment je vais pouvoir me rattraper. Je.. Putain.. je suis paumé. J'ajoute -C'est bien aimable de ta part de te préoccuper de moi, mais tu n'as pas à t'en faire. Je veux dire.. Je suis sous la protection d'un Prince.. Enfin sauf s'il ne daigne pas revenir au complexe et mon cœur se serre à cette pensée. Cette pensée m'arrache une grimace.*Non, il ne me ferait pas cela tout de même... quoi que... après tout, je le mérite sans nul doute avec ce que je lui ai fais.* Je camoufle mon visage entre mes bras. J'ai la nausée et c'est fort désagréable. J'ignore quand est-ce que Rajaar va rentrer... va t-il au moins rentrer ? Cette pensée me tue littéralement. Marié, partira-t-il ainsi ? Sans me prévenir, sans un mot de sa part à part un vulgaire bout de papier ? Je sens les larmes monter à cette pensée, j'enfouis mon visage dans mes bras pour ne pas craquer et me dérobe ainsi au regard de la jeune femme. Je ne veux pas être vu dans cet état. Je me sens si faible, si impuissant depuis son absence. Je déteste lorsqu'il n'est pas là. Je suis incapable de me passer de lui. Comment pourrais-je continuer sans lui? Je ne peux pas vivre sans lui, c'est certain.

Siobhan -Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant