Au delà des étoiles

Chapitre 8 : Ruby

Dans la maison, la tension est palpable. Ma mère et moi faisons face, nos regards remplis de colère et de frustration. Les mots acerbes fusent dans l'air, créant une atmosphère étouffante.
Je me tiens là, partagée entre la colère qui bouillonne en moi et la tristesse qui m'envahit face à ma mère schizophrène. C'est un tourbillon d'émotions, une lutte constante entre la frustration et la compassion, entre le désir de liberté et le poids des responsabilités familiales. C'est un chemin difficile à parcourir, mais je reste résolue à trouver mon équilibre dans ce tumulte émotionnel.
Chaque jour, je ressens ce poids écrasant de ne pas pouvoir subvenir aux besoins médicaux de ma mère. La culpabilité m'envahit, me tourmentant sans relâche. C'est une responsabilité non tenue qui assombrit mes journées.

- Maman, j'en peux plus de tes crises constantes ! Ça devient vraiment étouffant et ça affecte notre relation.
- Je ne suis pas paranoïaque, je suis juste inquiète pour toi et je veux te protéger !
- Mais maman, tu vois des dangers partout, même là où il n'y en a pas. Ça rend notre vie impossible !
- J'essaie juste d'être vigilante et de te prévenir des éventuels problèmes. J'ai peur de ce qui pourrait t'arriver.
- Je comprends que tu te soucies de moi, mais tes craintes excessives nous empêchent de vivre normalement. On ne peut pas continuer comme ça.
- Je ne veux pas te faire de mal, je veux juste te garder en sécurité. Tu es tout ce que j'ai de plus précieux.
- Je sais que tu m'aimes, mais tu dois apprendre à faire confiance et à lâcher prise. Sinon, ça va continuer à nuire à notre relation.
- C'est vrai, ma petite étoile. Je vais essayer de faire des efforts pour contrôler mes craintes et te laisser vivre ta vie. Mais promets-moi d'être prudente.
- Je te le promets, maman. Je vais faire attention et je te tiendrai au courant de ce qui se passe dans ma vie.

Finalement, épuisée par cette confrontation, je regarde ma mère, réalisant l'ampleur de la situation. La colère se transforme en tristesse, en regrets. On sait toutes les deux qu'on s'aime profondément, malgré nos différences. Nous nous prenons dans les bras, laissant les larmes couler librement. C'est une dispute douloureuse, mais elle permet de mettre à nu nos véritables sentiments. C'est le début d'un processus de guérison et de compréhension mutuelle.

Je monte les escaliers , et je me dirige vers la salle de bain pour prendre une douche tout en pensant à cet idiot.

Il vient un moment dans la solitude de la douche, où le monde extérieur s'estompe doucement et laisse la place à une scène où mes pensées vagabondent librement. Ici, c'est un sanctuaire personnel, enveloppé dans la vapeur et les échos de l'eau qui court. Tandis que j'endosse mon rôle de spectatrice de la scène complexe de mon mental, un phénomène singulier survient : tout me ramène à lui.

Chaque goutte d'eau forgeant un chemin sur ma peau évoque sa délicate empreinte, et m'entraîne dans un ballet de souvenirs carressants. Tantôt, je les accueille, tantôt, je lutte contre le courant de cette nostalgie inopinée. C'est une chorégraphie que seul mon cœur semblant diriger, m'emmenant danser le long de souvenirs enfouis, sans que je puisse prédire ou contrôler les pas qui suivront.

Les murmures de ces ondes reflètent des instants volatils, passagers, qu'on croirait surgir de l'écume de mes pensées les plus profondes. Sa voix ricoche sur les parois mouillées, et la réalité devient poreuse, s'infiltrant et sortant en rythme avec la brume chaude qui me berce dans un état second.

Je reviens à moi lorsque la thérapie aquatique se termine, mais l'évanescence de sa présence reste tenace, comme un parfum persistant séjournant dans l'air longtemps après que son propriétaire a quitté la pièce. Ses traits, son rire, son essence, semblent impérativement liés à chaque perle aqueuse qui trouve désormais la liberté dans le siphon.
Mais comment classer ces pensées, ces émotions ? Dans quelle boîte de mon cœur les ranger ? À l'heure où certains souvenirs devraient s'étioler, les miens défient obstinément l'épreuve du temps, tel le relief d'une empreinte indélébile laissée sur le rivage humide de mon âme.
Ainsi, désemparée, je partage ce trouble; sachant que trop d'encre a déjà coulé pour que le portrait de cet être cher disparaisse jamais complètement de ma mémoire infiniment persévérante.
Avec la nostalgie comme seule compagne fidèle, je retourne à la vie qui m'attend au-delà de ce voile d'eau, gardant précieusement ces moments d'introspection, jusqu'à ce que la prochaine douche m'offre une nouvelle audience avec un passé qui refuse d'être passé.

Assise dans le salon, ma mère reposant sa tête dans le creux de mes bras, regardant PSYCHOSE comme à son habitude, mes pensées sont envahies par une angoisse croissante, ne sachant pas à quoi m'attendre de sa part. Ma mère est si imprévisible et dangereuse, mais cela reste un secret bien gardé. Sa passion pour ce film en noir et blanc me pousse à me demander si elle réalise sa ressemblance avec Norman. Peut-être est-ce cette similitude qui la fascine tant.

Alors que la scène emblématique de la douche dans "Psychose" se déroule actuellement, l'atmosphère devient de plus en plus haletante. La tension monte progressivement, accentuée par la musique stridente qui ajoute une couche d'angoisse supplémentaire. Les coups de couteau s'abattent de manière implacable, et la caméra tournoie, créant une séquence mémorable et pleine de suspense. Le regard fixe de ma mère sur l'écran ajoute une dimension troublante à la situation, enveloppant l'instant d'une aura mystérieuse et inquiétante.

Généralement, mes pensées étaient préoccupés uniquement par ma mère et sa maladie, et maintenant il y a lui.
Je me sens vulnérable et déstabilisée, cherchant des réponses à mes questions sans oser les poser.
Chaque fois que nos regards se croisent, un frisson me parcourt le corps. Son aura de mystère m'intrigue, et je me surprends à vouloir en savoir plus sur lui. Malgré ma réserve, je ressens une connexion spéciale, comme si nos âmes étaient liées d'une manière mystique. Chaque interaction avec lui laisse une empreinte indélébile dans mon esprit, et je suis impatiente de découvrir les secrets qu'il dissimule derrière son masque d'énigme.