Chapitre 6

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( Min-Jae )


Dans une tranquille périphérie de Séoul, loin des artères bruyantes de la ville, éloigner des foules nocturnes et des devantures illuminées par des enseignes au néon multicolores. Pendant que certains se reposent pour se préparer à une autre journée d'études, d'autres se livrent à une routine nocturne bien particulière.

Près de la dernière sortie de la gare du côté ouest de Séoul, Min-Jae se couvre la bouche d'un masque et enfile une casquette noire, Bien trop habitué à ce genre d'escapades. Il se rend dans le secteur indiqué un peu plus tôt par message.

Parcourant silencieusement la zone à la recherche de quelque chose en particulier, Il entend plusieurs personnes s'approcher. Se cachant instinctivement dos au mur, il perçoit le bruit s'arrêter. Deux jeunes hommes aux allures de fêtards discutent dans l'angle d'une ruelle, pensant être seuls.

- On ne va pas se faire choper s'il nous retrouve ? questionne l'un d'eux.

Le plus grand sort un petit paquet de sa poche, bien enveloppé dans du papier.

- S'ils sont tous aussi faibles que ce mec, on ne risque rien, ricane-t-il.

- C'est vrai qu'on l'a pas mal amoché !

« Ce sont eux. Vu leur discrétion, il n'y a pas de doute ! », se dit Min-jae, entendant sans difficulté chacune de leurs paroles. Il s'avère que ce qu'il était venu chercher ici, ce sont ces deux types, ou plutôt ce qu'ils détiennent.

Les deux hommes continuent de se vanter de leur prise sans se rendre compte que Min-Jae était sorti de sa cachette.

- Vous feriez mieux de rendre ça et vite ! hurle-t-il.

Les deux voleurs se retournent vers lui.

- Qu'est-ce que tu nous veux ? demande sèchement le plus grand. Tu veux finir comme ton pote ?

Le deuxième l'attrape par le bras pour le retenir, sentant la situation sur le point de s'envenimer.

- S'il nous a déjà trouvé, d'autre le ferons, alors cassons-nous !

Min-jae commence à se rapprocher d'eux.

- T'as raison, on se casse, conclu-t-il en rangeant le paquet dans sa poche.

- Vous n'irez pas loin ! ajoute Min-jae en accélérant le pas.

Mais à peine a-t-il progressé dans la ruelle que les deux hommes s'enfuient à toute vitesse.

Il s'arrête.

- Je n'avais vraiment pas envie de courir ce soir. soupire-t-il, exaspéré.

N'ayant pas le choix, il se lance à leurs trousses, puisant en lui le peu d'énergie qui lui reste.

Les deux individus sont toujours dans son champ de vision, ils le remarquent également, jetant quelques regards en arrière au cours de cette course effrénée. L'écart entre eux reste similaire. À cette allure-là, seul le plus athlétique l'emportera. Mais Min-jae ne lâche pas l'affaire. Il change de stratégie, prenant un chemin différent, s'enfonçant dans les rues les plus étriquées.

Les deux hommes, ne le voyant plus, ralentissent. Ils reprennent leur souffle, convaincus de l'avoir semé, jetant quelques coups d'œil par sûreté.

Ce quartier est son territoire. Tel un chat, il connait le moindre passage caché ou raccourcit quel qu'il soit. Rien ne peut lui échapper. Min-jae n'a pas eu le moindre souci pour retrouver leur trace et réapparaître en un rien de temps à l'opposé d'où il les poursuivait.

- Il nous suit encore ! s'étonne le plus grand.

L'homme plus petit au crâne rasé commence à s'irriter à la vue du garçon à la casquette, qui ne cesse de les pourchasser.

- Trouvons un autre moyen de nous en débarrasser. Comme tu le dis si bien, il est tout seul !

- Et bah alors, qu'est-ce que vous attendez ? provoque Min-jae d'un ton impassible. Vous comptez encore fuir ? Bande de lâches !

- C'est bon, il m'a saoulé celui-là ! Tu vas voir ce qui t'attend !

Les propos de l'étudiant les rendent fous de rage. Ils n'attendent pas une seconde de plus pour se précipiter sur lui.

Minjae ne laisse rien paraître en les voyants se ruer sur lui. Il se met en garde, bien décidé à se défendre. Dans cette soudaine montée d'adrénaline, il laisse entrapercevoir sur son visage inexpressif, un léger sourire se dessiner au bord des lèvres.

Le soleil s'est couché depuis plusieurs heures. Les rues les plus passantes se vident peu à peu à la fermeture des commerces et autre animations. Seuls les phares de quelques taxis illuminent les routes. Le dernier métro est parti, emportant avec lui ces derniers passagers.

Au paroxysme de cette nuit, Min-jae déambule encore dans les rues désertes. Dans un petit quartier calme, il aperçoit un bar-restaurant encore éclairé. La bâtisse est dans un style typiquement traditionnel, avec un toit courbé en tuiles, des portes en bois mobiles et une façade en pierre. Au-dessus de la devanture est inscris sur un panneau en bois « Gwishin », qui signifie fantôme.

C'est le nom d'une créature mythologique coréenne. On raconte que ce fantôme et associé à l'âme d'un défunt, se trouvant généralement dans des bâtiments ou des lieux abandonnés. Lorsqu'une personne meurt sans avoir accompli ce que son destin exigeait, comme une vengeance où être restée davantage auprès de sa famille, son esprit reste sur terre pour accomplir sa mission avant de retourner dans le monde souterrain.

Bien que « fermé » soit écrit en toutes lettres sur la porte, Min-jae prend place sur l'une des chaises placées sur le trottoir devant la boutique. La porte coulissante s'ouvre sûr un homme dans la cinquantaine, corpulent et au visage légèrement ridé, tenant dans sa main deux bouteilles de soju, un alcool de riz typiquement coréen. Il pose une bouteille sur la table devant le jeune homme et garde l'autre dans sa main après l'avoir ouverte.

- Encore en vadrouille ! déclare le vieil homme d'une voix rauque.

Min-jae regarde l'objet face à lui.

- Si seulement les gens savaient faire leur travail ! affirme-t-il dans le vide.

Le vieil homme prend une gorgée de sa boisson.

- C'est difficile de trouver du personnel compétent à cette époque.

Il reste fixé sur la bouteille perlée de gouttelettes d'eau.

- Tu diras au patron de mieux les choisir la prochaine fois, répond le garçon en fouillant dans sa poche.

- Tu sais bien qu'il n'a confiance qu'en toi.

- Je sais !

Il dépose le petit paquet sur la table face au gérant. Celui-ci le récupère avant de le glisser dans la poche de son tablier.

- Merci, pour le rafraîchissement, le vieux, remercie le garçon en se levant.

- Évite de te battre la prochaine fois !

Il commence à s'éloigner.

- Je vais essayer ! affirme-t-il d'un signe de main, avant de disparaître de nouveau dans l'angle d'une rue.

Dans l'ombre de l'académieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant