Penchant draconien

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Il n'était pas de notoriété publique que le grand Harry Potter soit devenu poète, et cela tombait bien, Drago n'aimait pas savoir ce que tout le monde savait déjà. Il aimait avoir accès aux informations les plus secrètes, les plus coupables, les plus intimes, c'était comme ça qu'il maintenait son illusion d'être toujours quelqu'un. Aussi il adorait lorsque Pansy passait lui faire une petite visite lui racontant les détails innécessaires de la vie de la communauté sorcière. Surtout ceux qu'elle ne pouvait se permettre de publier dans le magazine pour lequel elle bossait : Sorcière hebdo.

Il n'était pas non plus de notoriété publique que Drago Malefoy lise attentivement chacun des poèmes signés Sir Cassio, nom de plume de Harry Potter. Pourtant il aurait pu les citer par cœur, quasi tous et peut-être même dans l'ordre de parution s'il fournissait un effort. Ce n'était même pas si bien, juste... Les quelques vers, parfois, détenaient des morceaux de sa vie qu'il collectionnait comme des trésors dangereux.

Il n'avait pas l'intention de faire grand cas du nouveau poème de Sir Cassio, sortit ce même jour dans la Gazette littéraire des plumes à poètes. Pourtant, ce fragment-ci semblait plus conséquent que les autres, plus empreint de sentiments également. Et puis, il y avait cette histoire de miroir qui l'avait touché, les descriptions de ce reflet terrifié, brisé, de cet observateur amer, contraint... Cette main tendue restée en suspens dans un esprit qui se rêvait protecteur. Venin, colère, chagrin, lame vermeille... Le récit pudique d'un combat brouillon et violent, une issue terrifiante et sanglante. Le regret immédiat, sa responsabilité confessée, et puis... Penchant draconien...



Mon crime

C'était mû par ta peur,
Signé désespoir.

J'étais mû par aigreur,
Signé mon devoir.

Toi dans ce miroir,
Pâle et effondré,

Moi dans ce couloir,
Mal et agité.


Et j'aurais voulu te tendre la main,
Te protéger
T'enlever à cet être inhumain,
Te vénérer.


Amer ton venin,
Colère étenelle
Cruel mon chagrin
Lame vermeille


Sanglot criminel
Toi presque éteint
Ma folie mortelle
Penchant draconien


Gryffondor, j'aurais dû prendre ta main,
Te protéger.
Ne pas devenir cet être inhumain,
Te vénérer.



Les larmes se mirent à couler et Drago ne sortit pas de chez lui ce jour-là. Bien sûr c'était de la poésie, des demi-mots, des périphrases, des détours tortueux pour dire l'évidence, sublimer l'atroce, transcender les erreurs, parler directement au cœur.

Et pourtant, c'était comme s'il était devant lui et avait présenté ses excuses à genoux. Non, bien sûr que non. C'était plus, bien plus... C'était comme s'il avait ensorcelé ces mots, que ces vers ne parlaient pas à sa tête, mais allaient directement apaiser son cœur, l'ouvrait en deux... Non plus profond encore, le découpait en petits morceaux et le recollait avec un miel, mais un miel spécial, un miel pour guérir les âmes, pour guérir son âme.

Lorsqu'il reçut la Gazette littéraire des plumes à poètes les semaines suivantes, Drago se jeta dessus aussi rapidement que possible, cherchant un nouveau poème laissé par Sir Cassio. Mais rien. Tant pis. C'était juste au cas ou, il aurait bien aimé en lire un autre mais s'il n'y avait rien c'était aussi bien. Peut-être que Potter n'avait pas eu le temps d'en écrire un nouveau, pas l'inspiration ou bien qu'il avait été refusé pour ce mois-ci ? Non bien entendu que le Sauveur ne pouvait pas se faire refuser un poème, l'inspiration devait lui manquer.

Te VénérerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant